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L'article provient de TVA Nouvelles
Politique

Déploiement catastrophique de SAAQclic: Karl Malenfant rejette le blâme sur ses équipes et un employé en Inde

Il témoigne pour une dernière fois à la commission Gallant

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Photo portrait de Nicolas Lachance

Nicolas Lachance

2025-09-24T14:44:26Z
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L’architecte du projet SAAQclic, Karl Malenfant, refuse de porter la responsabilité du déploiement raté et plaide que ses équipes ne lui ont pas transmis des informations exactes et complètes. Le faux départ aurait également été causé par un employé situé en Inde.

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«Je ne veux pas leur lancer la pierre. Mais si j'avais reçu de mes équipes des signaux différents, on aurait fait les choses autrement», a déclaré Malenfant devant le commissaire Denis Gallant.

L’ex-vice-président à l’expérience numérique de la SAAQ a conclu son témoignage mercredi matin, après six jours sur le gril.

Il a reconnu qu’à la suite de la fermeture des centres de services pendant trois semaines en janvier 2023, «le plan de reprise aurait pu être pensé autrement», concédant ainsi une part de responsabilité. «Je n’ai jamais challengé les équipes pour qu’elles y réfléchissent.»

En mêlée de presse, Malenfant a soutenu que ses équipes avaient agi de bonne foi. 

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Lors du lancement, Karl Malenfant savait que son visage ferait la une des journaux. En tant que gestionnaire principal du projet, il était conscient d’être le «paratonnerre».

«C’est de la lucidité», a-t-il affirmé. Malenfant refuse toutefois qu’on lui attribue l’imputabilité des ratés. Selon lui, son équipe ne lui a pas transmis les bonnes informations.

Il a aussi admis que les tests d’intégration finaux ont été complétés à la dernière minute.

«Ce n’est pas une bonne pratique, j’en conviens», a-t-il dit, ajoutant que la SAAQ avait «pris des risques».

• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Richard Martineau, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :

Un problème en Inde

Le retraité soutient que «personne n'aurait souhaité un déploiement aussi difficile».

La journée fatidique de février, marquant le lancement de la plateforme SAAQclic, a été une véritable catastrophe. Il pointe du doigt une ressource informatique travaillant en Inde.

«Ma vie a basculé ce lundi matin à 7h», a-t-il déclaré. «Tout le monde attendait la plateforme Web» à 7h, a-t-il rappelé, mais elle a finalement été lancée à 9h.

«En Inde, un technologue s’est trompé», a signalé Malenfant. L’employé devait ouvrir le portail Web, mais il a plutôt activé un test.

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La «théorie des dominos» s’est ensuite enclenchée. Rien ne fonctionnait et les files d’attente se multipliaient, a-t-il admis.

En colère contre LGS

En plein fiasco, au printemps 2023, l’entreprise LGS (IBM) menace de se retirer du projet. Elle estime que SAAQclic est livré et que la SAAQ lui doit encore 28 millions $ pour du travail accompli.

Furieux, Malenfant rédige une lettre cinglante à son homologue de LGS, Michel Dumas. Un avenant de 45 millions $ avait même été signé quelques mois plus tôt.

«Malheureusement, comme vous le savez, de nombreuses anomalies affectent toujours considérablement la solution. Les équipes de l'Alliance et de la SAAQ ont identifié ensemble un reste à faire de 372 problèmes qui provoquent l'arrêt ou une dégradation importante de services liés à la mission de la Société», signale-t-il.

La SAAQ n’exclut pas de poursuivre l’entreprise. Toutefois, elle doit faire fonctionner le système pour ses clients. IBM poursuivra le travail à ses frais durant trois mois, soutient-il.

Mauvaise information au PM

En mars 2023, après une publication de l’homme d’affaires Mitch Garber sur le réseau social X, le premier ministre a demandé des explications sur les coûts du projet CASA/SAAQclic. Une discussion s’en est suivie entre les cabinets des ministres Geneviève Guilbault et Éric Caire.

C’est la SAAQ qui a finalement préparé une note pour le premier ministre François Legault. On y indique que le budget du projet était de 458 millions $. Pourtant, les coûts étaient déjà plus élevés et un avenant avait été signé.

C’est Malenfant qui a approuvé la note. Une erreur, reconnaît-il.

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«J’ai l'impression qu'on a caché de l'information» – Denis Gallant

L’estimation du projet, établie à 200 millions $ en 2015 pour convaincre le gouvernement de réaliser la transformation numérique de la SAAQ, «n’avait pas d’allure», avance le commissaire Denis Gallant.

«Est-ce que je me trompe?», a demandé le commissaire à l’architecte du projet, Karl Malenfant. «Je suis d’accord», a répondu ce dernier.

En avril 2015, la PDG de la SAAQ, Nathalie Tremblay, et l’ex-ministre des Transports, Robert Poëti, ont convaincu le gouvernement de lancer un appel d’offres en présentant un projet estimé à 200 millions $ sur 10 ans.

En signant le document, le ministre s’est fié à la présentation des besoins exposés dans la demande adressée au Conseil du trésor.

Selon le commissaire, ce qui est inscrit dans le document est «exhaustif».

L’élaboration des besoins dans la demande au CT était très complète.

Néanmoins, la SAAQ a évalué les coûts du projet à 200 M$.

«La Société savait pertinemment que ça n’avait pas d’allure. Quand je regarde ce qui est inscrit dans le CT, c’est encore plus déconcertant. La Société signera un seul contrat de 10 ans avec l’Alliance. La valeur de ce contrat est estimée à 125 M$, même pas 200 M$», a lancé le commissaire.

Karl Malenfant s’est défendu d’avoir participé à cette évaluation. Il venait d’arriver à la SAAQ et devait rédiger les besoins nécessaires à la mise en place de la solution.

Denis Gallant a pris soin de préciser qu’il ne visait pas directement Karl Malenfant.
«J’ai l'impression qu'on a caché de l'information», a-t-il ajouté.

Pas des Pee-Wee

La décision d’inscrire 200 millions $ a été prise par le vice-président aux Finances, Yves Frenette.

«La raison : compte tenu de l'obligation du Trésor de mettre un chiffre et du fait que nous voulions forcer le marché à soumissionner au plus bas... nous avons publié au plus bas. Nous ne sommes pas des Pee-Wee. Je vous épargne l'explication pour le 125 M$, mais j'ai le rationnel», indique un courriel écrit par M. Frenette en 2015.

Selon le commissaire Gallant, l’argument de M. Frenette ne tient pas, car la demande au CT n’est pas publique et ne sera jamais connue du marché.

Suivez les audiences publiques en direct à LCN, dans la vidéo ci-dessus.

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