«Convoi de la liberté»: la Police d’Ottawa fait son mea culpa
Les agents étaient démoralisés face aux manifestants


Anne Caroline Desplanques
La police d’Ottawa fait son mea culpa pour avoir échoué à prévenir l’occupation de la capitale fédérale et témoigne de la confusion totale qui régnait dans ses rangs, effrayés et démoralisés face aux manifestants, en février dernier.
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« Nous n’étions pas au meilleur de nous-mêmes », a avoué aujourd'hui la cheffe adjointe par intérim du Service de police d’Ottawa (SPO), Patricia Ferguson, devant la Commission sur l’état d’urgence.
Mme Ferguson a expliqué qu’une frange de la police, en s’incluant dans celle-ci, souhaitait négocier avec les manifestants, quitte à ce que cela prenne plus de temps pour résoudre la crise.
Elle craignait qu’une stratégie plus dure ne mette en danger ses agents, en particulier face à un groupe de Québécois que la cheffe adjointe par intérim a identifié comme les Farfadaas.
La police d’Ottawa a associé cette organisation complotiste aux motards criminels.
Cela a fait éclater de rire André Durocher, inspecteur à la retraite du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), qui indique qu’aucun service de police du Québec n’a peur de ces agitateurs.
Pat Morris, qui dirige le Bureau du renseignement des opérations provinciales de l’OPP, a en plus déclaré devant la commission mercredi que ses équipes n’avaient pas de renseignements crédibles qui laissaient présager une menace de violence ni même une preuve d’activité criminelle.
Information ignorée
Un rapport du bureau de M. Morris, fourni aux policiers d’Ottawa huit jours avant l’arrivée des premiers camions, prévenait néanmoins que les manifestants avaient l’intention de rester autant de temps qu’il faudrait pour lever les mesures sanitaires.
Patricia Ferguson a expliqué que ses services ont douté de ces avertissements en raison de la désinformation et de la propagande en ligne qui entoure les groupes complotistes.
« C’est une façon polie de dire “on l’a échappé” », déduit André Durocher.
Il explique que « la population est en droit de s’attendre à ce que la police se prépare à l’imprévisible » et qu’elle se prépare au pire dans le doute.
Pour lui, sur la base des informations fournies et du climat social tendu de l’époque, la police d’Ottawa aurait dû demander de l’aide avant même l’arrivée des premiers camions au centre-ville de la capitale fédérale.
Du même avis, Mario Berniqué, capitaine retraité de la Sûreté du Québec et spécialiste en gestion de foule, a dit au micro de QUB radio aujourd'hui que l’événement était trop gros pour la police municipale.
Racisme contre le chef
Quand l’ex-chef de la police d’Ottawa, Peter Sloly, s’est finalement rendu à l’évidence et a réclamé un plan d’action pour ramener l’ordre, ses troupes ne l’ont pas suivi.
Mme Ferguson a plaidé le manque de personnel.
Mais mercredi, Diane Deans, ex-présidente de la Commission de services policiers de la Ville d’Ottawa, a déclaré que M. Sloly, premier chef noir de la police de la capitale fédérale, était la cible de racisme dans ses rangs et faisait face à « une sorte d’insurrection ».
À la police provinciale de l’Ontario (OPP), on était manifestement consterné par le travail des collègues d’Ottawa.
Dans des notes déposées en preuve à la commission aujourd'hui, l’OPP décrit sans détour un leadership incompétent.
On se demandait même si le SPO était « digne de recevoir de l’aide » d’autres services policiers.
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