Caroline Dhavernas a fait des choix importants pour sa famille
Ravages est disponible dès maintenant sur illico+
Michèle Lemieux
Avec presque 40 ans de métier, une relation amoureuse qui se poursuit depuis une dizaine d’années, et un engagement de près de 10 ans à titre de porte-parole auprès de l’organisme Passages, Caroline Dhavernas incarne la constance. Véritable marathonienne de la vie, elle s’investit avec cœur tant dans sa vie personnelle que professionnelle, ainsi que pour sa cause. Ces jours-ci, c’est dans le thriller Ravages que nous avons l’occasion de renouer avec l’actrice.
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Caroline, tu tiens le rôle principal dans la nouvelle série Ravages. Compte tenu de l’intensité de certaines scènes, le tournage a-t-il été exigeant pour toi?
Ç’a été un bonheur à tourner. Quand on réussit les scènes qui semblent difficiles, c'est la catharsis! On est fier d’avoir accompli ça, fier de l’équipe. Sur le plateau, j’ai découvert Ako Chanoine, qui joue mon chum dans la série. J’ai retrouvé Benoît Brière après presque 20 ans, mais aussi Robin Aubert, qui est l'un des acteurs que j'admire le plus au Québec. Je n’avais jamais tourné avec Sophie Prégent ni Catherine Brunet. Ç’a été de belles rencontres. Idem pour Sophie Deraspe, avec qui je n’avais jamais travaillé. Elle a coécrit Ravages avec Frédéric Ouellet, mais c'était son idée originale, et elle a réalisé la série. Ce projet captivant parle d'enjeux environnementaux importants et très actuels.
Tu incarnes Sarah Deléan, une avocate qui sera confrontée à ses valeurs.
Effectivement. C'est un beau personnage qui fera un virage à 180 degrés. Elle travaille pour une compagnie minière, Minexore, et des événements dans sa vie intime la forceront à ouvrir les yeux sur certaines pratiques de la compagnie qu'elle représente. Elle n’aura d’autres choix que de se questionner sur ses valeurs. Fera-t-elle des choix en fonction de ses valeurs ou choisira-t-elle de fermer les yeux?
Ce rôle représentait-il un nouveau défi pour toi?
Chaque personnage est différent. Quelqu’un m’a fait réaliser que j'ai fait des séries au Québec toute ma vie, mais que je n'avais jamais réellement eu le lead sur une série québécoise. J'ai défendu de plus gros premiers rôles en anglais, comme dans Mary Kills People ou dans Wonderfalls. Ce rôle dans Ravages a donc été un grand bonheur pour moi.

En quoi ressembles-tu à Sarah Deléan?
C'est quelqu'un qui a travaillé fort pour arriver là où elle en est sur le plan professionnel. Je pense que nous avons ça en commun. Cela dit, elle est un peu plus carriériste que j'ai pu l'être. Elle ne s’est pas posé de questions sur ses valeurs, mais elle finit par le faire. Elle n'a pas de famille tandis que moi, je suis un peu ailleurs en ce moment... (rires)
Tu disais de ton personnage qu’elle a travaillé fort. C'est vrai pour toi aussi, puisque tu as commencé dans ce métier alors que tu étais enfant.
Ça fera 40 ans l'an prochain que je fais ce métier. Ça donne un coup de vieux... (rires) J’ai commencé à l’âge de huit ans. Je connais d’autres acteurs qui travaillent depuis qu'ils sont enfants au Québec et ailleurs au Canada anglais. Ça m'émeut de voir que j'aime toujours autant ce métier. Je suis encore à la bonne place. Je suis contente d'être toujours là et qu'on me fasse confiance pour tenir de beaux grands rôles, comme celui-ci.
Quarante ans de carrière, c'est tout un accomplissement...
Oui, mais je me donne le droit de créer autrement dans le même domaine. Par exemple, j'ai découvert que j'adorais écrire. Comme j’ai lu beaucoup de scénarios dans ma vie, ça m'a un peu formée. J'écris un scénario depuis trois ans. Je découvre une partie de ma créativité que je ne soupçonnais pas du tout. Ça me fait énormément de bien parce que comme comédienne, on attend que le téléphone sonne. Quand tu as une famille, écrire, c'est un peu du temps que tu dois «voler». Pour être heureuse dans la vie, j'ai besoin de créer. En racontant des histoires qui me touchent intimement, c'est tout un autre pan qui s'ouvre à moi. Je commence aussi un autre projet que j'aimerais réaliser éventuellement. Sinon, je dessine, je peins, je fais des collages, parce que si j'attendais de tourner pour créer, ça m’arriverait trop peu souvent.
Ton métier laisse-t-il beaucoup de temps à la femme et à la maman?
Absolument. J'ai eu envie d'être une maman présente tout en répondant à mon besoin d'être nourrie par mon travail. Pour ma famille et pour ma fille, j'ai fait des choix que je n’aurais jamais faits avant. Quand une offre m'amenait trop loin de Montréal, il m’est arrivé de dire: «Non, merci. La prochaine fois peut-être.» Je reste toutefois ouverte à des propositions qui m’amèneraient ailleurs, car si le rôle et le projet me plaisent, je m'adapterai à cette situation avec ma famille. Comme ma fille va à l'école, je bougerais probablement seule.
Faut-il rappeler que le bonheur d’une maman est essentiel pour élever un enfant heureux?
C'est tout à fait juste. Je pense que l'enfant apprend aussi en voyant son parent heureux au travail. D’après-moi, il est sain pour un enfant de voir ses parents cultiver d’autres sphères de leurs vies, que ce soit l’amitié, le couple, l’activité physique, et oui, le travail. Si l’enfant est leur seule et unique préoccupation, c’est peut-être lui mettre une grosse responsabilité sur les épaules.
Sur ce plan, tu as eu un bel exemple, puisque ta mère a travaillé toute sa vie.
Oh mon Dieu, oui! Mes deux parents ont travaillé fort. Ma mère faisait des heures de fou quand elle était à Samedi de rire ou quand elle jouait au théâtre. Même si elle était très occupée, elle trouvait le moyen de nous faire des costumes d'Halloween la nuit. Je ne sais pas comment elle a fait pour survivre à cette période-là... Lorsque nous étions au secondaire, ma sœur et moi, elle nous préparait de très beaux lunchs tous les jours. Il y avait beaucoup d'amour là-dedans. C'est vrai que j'ai eu un bel exemple. Je ne pourrai jamais égaler ce que ma mère faisait tellement c'était élaboré.
Quand on devient maman, on se rend compte à quel point on a été aimé...
Oui. Depuis que je suis mère, je le comprends autrement. Je le ressens de l'intérieur.

Ton amoureux et toi arrivez-vous à concilier vos horaires?
Oui, nous y arrivons. Nous avons été chanceux jusqu'à maintenant, car depuis la naissance de notre fille, c'est arrivé seulement deux fois que nous ayons tourné en même temps. Pour l'instant, ça se passe bien.
Cette relation amoureuse se poursuit à travers les années. La classes-tu au rayon des réussites?
Je suis assez loyale en amitié comme dans les autres domaines de ma vie, mais on dirait que j'ai de la misère avec le mot «réussite». Je pense qu'on est toujours en mouvement, que chaque relation demande de l'attention et de l'amour. Même chose au niveau professionnel. C’est dur de maintenir une carrière à long terme. Comme comédienne, il y a des tranches d'âge qui sont plus complexes que d'autres. Je suis un peu là-dedans en ce moment, avec la quarantaine. Le domaine a énormément changé depuis 20 ans. L’offre à travers le monde a beaucoup augmenté, il y a davantage de possibilités de faire voyager certaines de nos séries, mais en même temps, le Québec doit toujours lutter pour faire sa place alors que le financement de sa télé est mis à l’épreuve.
La carrière de ta mère s'est prolongée à tous les âges. Est-ce un modèle rassurant pour toi?
Tu as raison, ma mère a été un modèle absolument incroyable! Pendant la pandémie, de toutes les actrices que je connaissais, je pense que c’est celle qui travaillait le plus. Elle aura 80 ans bientôt. Elle travaille bien, les gens l'aiment. On dirait que plus elle vieillit, plus les gens l'apprécient. Elle vieillit en beauté et naturellement, et je trouve ça magnifique. J'espère faire comme elle.
Comment as-tu vécu ton été? As-tu passé du temps en famille?
Oui, j’ai eu beaucoup de temps en famille, avec ma fille. Mon chum était un peu occupé, mais nous avons eu des moments ensemble aussi. J'ai visité mes parents à la campagne avec ma fille. Cet été, je me suis baignée et j'ai fait du kayak. J’ai essayé de voir mes amis parce que c'est aussi important de prendre soin d'eux aussi. J'ai la chance d'avoir des amis exceptionnels. Ce sont aussi des femmes et des hommes qui ont une vie familiale. Ma fille vient d'avoir sept ans. Même si elle gagne en autonomie, c’est un âge qui occupe beaucoup les parents. J’ai aussi consacré du temps à mon rôle de porte-parole pour Passages, que j’assume depuis plusieurs années. On a lancé une collection de chaussettes dessinées par les Passagères, des femmes entre 18 et 30 ans qui ont besoin d'une pause.
Parle-nous de la mission de cet organisme.
Ce sont des femmes qui sont dans toutes sortes de situations. Certaines vivent de l'itinérance, d’autres sont des immigrantes qui arrivent au pays et qui ont besoin d'un refuge. Il y a aussi un programme d'insertion pour des femmes qui sont prêtes à retourner en appartement, mais qui ont besoin d'encadrement. La maison au centre-ville offre trois volets, dont le volet créatif. C'est dans le cadre de ces ateliers qu’elles ont peint et dessiné des personnages de type «cadavre exquis» — l’une dessine la tête, l'autre le corps et une autre les jambes —, sans voir ce que les autres font. Ça donne des personnages très éclectiques. Ces femmes vivent beaucoup de choses difficiles. Grâce à ces ateliers, elles peuvent exprimer leur créativité et être en contact avec ce qu'elles ont de plus intime. Passages est vraiment une maison exceptionnelle.
Est-ce par reconnaissance envers la vie que tu t’es engagée dans cette cause?
Il y a plusieurs années, je faisais partie des 80 marraines du Chaînon. Une femme qui témoignait a dit: «Moi, avant, j'avais un chum, des enfants, une maison, une voiture. Puis un jour, j'ai eu un coup dur et j'ai tout perdu.» Ça m'a vraiment frappée. J’ai compris que personne n’est à l'abri d'un tel drame. J’ai toujours été touchée par les gens qui sont vraiment démunis. J’ai envie d'aider, de faire une différence, de faire ma part. Pour moi, c'est la moindre des choses...