Carambolage mortel sur la 440: c’est la SAAQ qui l’aurait échappée
Voilà l’argument de la défense au procès d’un camionneur pour le carambolage mortel sur la 440, en 2019

Erika Aubin
C’est la Société de l’assurance automobile du Québec qui serait à blâmer pour le carambolage monstre ayant coûté la vie à quatre personnes sur la 440 à l’été 2019, plutôt que le camionneur accusé de négligence criminelle, car on lui avait redonné un permis par erreur, disent ses avocats.
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«Oui. Jagmeet Grewal a menti dans sa demande d’emploi. Toutefois, ces mensonges ne remettent pas en cause le fait [qu’il] était un chauffeur de camion expérimenté et manifestement qualifié.»
C’est ce que font valoir les avocats, Mes Jean-Daniel Debkoski et Philipe Knerr, dans leurs plaidoiries écrites déposées récemment au dossier.
Jagmeet Grewal, 56 ans, subit son procès pour négligence criminelle causant la mort et des lésions. Le 5 août 2019, le camionneur circulait sur l’autoroute 440 Ouest quand il a percuté une série de véhicules immobilisés par le trafic, à Laval.

Gilles Marsolais, 54 ans, Michèle Bernier, 48 ans, Sylvain Pouliot, 55 ans, et Robert Tanguay Laplante, 26 ans, ont péri.
Quatre autres personnes ont subi des blessures.
- Écoutez l'entrevue avec Maitre Marc Bellemare à l’émission de Richard Martineau via QUB radio :
Inapte à vie
En 2014, après une collision survenue deux ans plus tôt aux États-Unis qui a laissé à Grewal des séquelles psychiatriques, la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) lui a interdit à vie de travailler comme chauffeur de camion. L’organisme lui versait des indemnités de revenus.
Malgré cela, il a été capable de ravoir «légitimement, et honnêtement» son permis de classe 1 auprès de la SAAQ... par erreur.
Pour ce faire, il a fourni un rapport médical légitime qui le déclarait apte à conduire, rappellent ses avocats.
«Comment pouvait-il savoir que les départements de la SAAQ ne communiquaient pas entre eux ou que leurs procédures internes étaient défaillantes? questionnent-ils. Si quelqu’un a échappé la balle, c’est la SAAQ.»
De son côté, la Couronne estime plutôt que «c’est M. Grewal qui a décidé de jouer avec cette balle de façon négligente, assumant volontairement le risque» de sa conduite pour la sécurité d’autrui.
Une catastrophe annoncée
Ce carambolage mortel était plutôt «une catastrophe annoncée», selon la Couronne.

«À force de jouer avec le feu, on finit par se brûler. C’est exactement ce qui est arrivé», avancent les procureurs, Mes Simon Blais, Alexis Marcotte Bélanger et Lyly-Anne Ratelle.
La collision ne peut être expliquée que par sa manière «dangereuse» de conduire. Dans les 10 secondes avant l’impact, la semi-remorque n’a jamais freiné ni même ralenti.
«L’accusé n’a pas prêté attention à la circulation pendant une période de temps inacceptable et n’a eu aucune réaction pour éviter la collision.»
Cet argument doit être rejeté, selon la défense, car personne ne sait ce qui s’est passé dans la cabine de Grewal avant l’impact. L’accusé n’a pas donné sa version des faits à son procès.
Accablé de problèmes
La Couronne plaide également que Grewal était accablé de problèmes de santé qui sont incompatibles avec la conduite.
Antidouleurs, relaxants musculaires, antidépresseurs: il prenait un cocktail de médicaments pouvant causer des effets secondaires, comme de la somnolence et des étourdissements, pour ne nommer que ceux-là. Or, il n’y a aucune preuve que cela a eu un impact sur sa capacité à conduire, estime la défense.
Celui-ci n’avait pas divulgué son récent diagnostic de diabète à la SAAQ, en plus de négliger le traitement de sa maladie.
«Un chauffeur de camion professionnel raisonnable aurait été conscient des risques [...] et se serait abstenu de prendre le volant» le jour du carambolage, conclut la Couronne en invitant la juge, Yanick Laramée, à le reconnaître coupable.
Les plaidoiries orales auront lieu en juin prochain au palais de justice de Laval.
– Avec Valérie Gonthier
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