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L'article provient de Le Journal de Montréal
Santé

Cancer du poumon: Le vapotage n’est guère mieux

Les jeunes sont nombreux à fumer la cigarette électronique, dont on ne connaît pas encore tous les effets à long terme.
Les jeunes sont nombreux à fumer la cigarette électronique, dont on ne connaît pas encore tous les effets à long terme. Photo d'archives
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Photo portrait de Nora T. Lamontagne

Nora T. Lamontagne

2022-05-07T04:00:00Z
2022-05-07T19:27:29Z
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Le peu que l’on sait sur les conséquences à long terme du vapotage n’augure rien de bon pour la santé pulmonaire, surtout alors qu’il connaît une popularité fulgurante chez les jeunes.

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« Comme les cigarettes électroniques sont assez récentes, on n’a pas encore d’études sur les risques après 30 ans d’utilisation. Mais elles sont loin d’être banales, selon nos données et celles d’autres chercheurs », prévient Kim Lavoie, codirectrice du Centre de médecine comportementale de Montréal.

Avec des collègues, cette dernière a produit un résumé exhaustif des études disponibles portant sur les effets physiologiques aigus du vapotage.

Résultats ? Côté cardiaque, fumer la cigarette électronique fait augmenter la fréquence cardiaque et la pression artérielle tout autant que la cigarette traditionnelle.

Gare aux poumons « popcorn »

Côté pulmonaire, le risque semble moins important, même si le vapotage a été aussi associé à une inflammation accrue des poumons.

« On peut estimer que plus cette inflammation sera déclenchée souvent, plus grand sera le risque de développer des maladies pulmonaires, dont le cancer du poumon », précise Mme Lavoie.

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Parmi les pires effets secondaires recensés, les médecins sont confrontés à des vapoteurs aux « poumons popcorn », le surnom donné à l’inflammation des bronchioles.

En date d’août 2020, 20 cas de maladie pulmonaire associée au vapotage avaient aussi été signalés à l'Agence de la santé publique du Canada, selon les derniers chiffres publiés.

Bien que des recherches soient encore nécessaires, Kim Lavoie cite des études qui démontrent un lien entre les produits chimiques des liquides aromatisés de vapotage et des lésions aux poumons.

Facile de s’en procurer

C’est d’autant plus inquiétant quand on connaît la popularité de ces saveurs – pamplemousse, cerise ou même barbe à papa – chez les adolescents, dit-elle.

Bien qu’il soit interdit de vendre des produits de vapotage aux mineurs au Québec, 35 % des étudiants en 5e secondaire sont des consommateurs, indiquent les plus récentes recherches.

« Les jeunes nous rapportent qu’ils n’ont pas de grandes difficultés à se procurer les produits des grandes marques », affirme d’ailleurs Flory Doucas, porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac.

« Et les compagnies ont un marketing assez spectaculaire pour les attirer, surtout les filles », ajoute Kim Lavoie.

Si le vapotage a son utilité pour les fumeurs qui veulent écraser, la chercheuse conseille d’éviter à tout prix de commencer à vapoter en pensant que c’est un comportement sans effet sur la santé.

Un moindre mal

Quant au cannabis, Sean Gilman, pneumologue spécialisé en cessation du tabac, soutient que son usage récréatif est plus sécuritaire que la cigarette.

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Néanmoins, il conseille de privilégier les huiles et les produits comestibles.

La consommation devient un problème lorsque du tabac est mélangé à un joint, ce qui est fréquent chez les plus grands consommateurs, affirme le Dr Gilman.

La Coalition québécoise pour le contrôle du tabac revendique l’interdiction de la vente de tout produit de vapotage aromatisé à l’exception de ceux au tabac, comme c’est le cas au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.

Avec Hugo Duchaine

Un cancer qui suscite moins d’empathie  

Josée Savard, professeure en psychologie à l’Université Laval.
Josée Savard, professeure en psychologie à l’Université Laval. Photo Agence QMI, Marcel Tremblay

Le cancer du poumon est souvent perçu comme « mérité » en raison des années de tabagisme du malade, ce qui rend l’expérience encore plus difficile à vivre pour eux.

« Les gens peuvent avoir un sentiment fort de culpabilité ou de honte et hésiter à parler de leur diagnostic », constate Josée Savard, professeure en psychologie à l’Université Laval. 

C’est encore plus vrai si ces fumeurs se sont fait répéter pendant des années que la cigarette était mauvaise pour leur santé et qu’ils devraient arrêter. 

Réactions mitigées

En plus de la culpabilité qu’ils ressentent, les malades doivent composer avec la réaction de leurs proches à ce cancer à la mauvaise réputation.  

« L’entourage va peut-être réagir avec moins d’empathie que si c’était un autre type de cancer. Sans que ce soit verbalisé, certains vont penser que c’est mérité », explique Mme Savard. 

Ce genre d’opinion peut même affecter la qualité du soutien que les malades reçoivent pendant des moments qui sont parmi les plus difficiles de leur vie. 

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« Et ça, ça peut avoir un effet dévastateur », poursuit-elle, en insistant sur l’importance de la compassion et de la bienveillance envers le malade, peu importe le cancer. 

La spécialiste en psycho-oncologie recommande tout autant à ses patients de faire preuve d’empathie envers leurs décisions passées. 

« On peut reconnaître que fumer ait eu une influence sur le diagnostic, tout en essayant de comprendre pourquoi on était aussi dépendant à la cigarette. »

Loin du ruban rose

Mais même à l’échelle de la société, les cancers n’attirent pas tous la même sympathie ou la même mobilisation.

On n’a qu’à penser à la campagne du ruban rose contre le cancer du sein, ou encore à Movember pour la lutte contre le cancer de la prostate. 

Rien d’aussi populaire n’existe pour le cancer du poumon, pourtant le plus mortel pour les Québécois. 

« On n’en parle pas beaucoup pour la quantité d’individus qu’il touche », croit la pneumologue Catherine--- Labbé, de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec.

« Et je pense qu’il y a beaucoup de patients qui ne se sentent pas aussi compris et épaulés que s’ils avaient un cancer avec plus de publicité. » 

Les patients atteints d’un cancer qui en font la demande peuvent obtenir un suivi psychologique gratuitement avec la prescription d’un médecin. 

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