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L'article provient de Le Journal de Québec
Sports

Aux portes de la NFL après avoir songé à tout abandonner

Matthew Bergeron a fait beaucoup de chemin depuis ses débuts à Victoriaville

Le Québécois a passé les quatre dernières saisons avec l’Université de Syracuse où il a même été élu capitaine par ses coéquipiers.
Le Québécois a passé les quatre dernières saisons avec l’Université de Syracuse où il a même été élu capitaine par ses coéquipiers. Photo d’archives fournie par l’Université de Syracuse
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Photo portrait de Stéphane Cadorette

Stéphane Cadorette

2023-03-04T00:27:06Z
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Les meilleurs espoirs en vue du repêchage de la NFL sont rassemblés depuis le début de la semaine au camp d’évaluation à Indianapolis et du lot, Matthew Bergeron est l’un des rares Québécois invités à l’événement. C’est loin d’être banal pour le bloqueur de Victoriaville qui a préféré les petites voies aux grands boulevards pour atteindre son rêve et qui, un jour, avait même décidé de tout larguer. 

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Bon an mal an, le camp d’évaluation, mieux connu sous l’appellation anglophone « Combine », regroupe plus de 300 prospects à Indianapolis. Pour la toute première fois cette année, deux Québécois font partie de la liste, en Bergeron et Sidy Sow, un garde originaire de Bromont.

Dans le cas de Bergeron, plusieurs analystes affectés au repêchage l’identifient comme un potentiel choix de deuxième ou troisième ronde. Il pourrait donc avoir l’occasion de devenir le Québécois sélectionné le plus hâtivement depuis que Thshimanga Biakabutuka avait été le huitième choix des Panthers de la Caroline, en 1996.

Après avoir discuté à plusieurs reprises avec Bergeron au cours des dernières années, Le Journal s’est cette fois-ci entretenu avec quelques-uns de ses anciens entraîneurs au Québec afin de revenir sur le parcours atypique du joueur de ligne offensive.

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Décision fructueuse

C’est avec les Vicas de Victoriaville, à l’école secondaire du Boisé, que la belle aventure de Bergeron a débuté. Le plus étonnant, c’est que tout juste avant d’atteindre les rangs du midget en quatrième secondaire en 2016, cet envol a bien failli ne jamais lever de terre.

Le joueur de ligne offensive à l’époque des Vicas de Victoriaville, au football midget.
Le joueur de ligne offensive à l’époque des Vicas de Victoriaville, au football midget. Photo fournie par Jean Bourassa, Vicas de Victoriaville

« Quand on a commencé le camp d’entraînement pour le midget, Matthew ne s’est pas présenté. Les autres joueurs m’ont dit qu’il arrêtait de jouer. Pour nous, les coachs, ça n’avait tout simplement pas d’allure », raconte son entraîneur de l’époque, Jean Bourassa. 

« Je me rappelle encore que je suis allé le rencontrer. Il avait commencé à jouer au basketball et je lui ai dit qu’on allait s’organiser côté horaire, qu’on trouverait des solutions, mais qu’il devait continuer. Je lui ai dit : “viens faire la prochaine semaine et après tu prendras ta décision.” »

Bergeron a finalement choisi d’écouter ce sage conseil. Une décision qui s’est avérée fort judicieuse. 

« On voyait en lui un talent particulier. On ne sait pas, peut-être qu’il serait revenu de lui-même après avoir réfléchi. On n’a pas pris de chance. Par la suite, il n’a plus jamais eu d’interrogation. Quand Matthew s’implique, il est tellement all in. Depuis, il a dépassé toutes les attentes », a noté Jean Bourassa.

Un choix surprenant

Quand est venu le temps de poursuivre sur la scène collégiale, Matthew Bergeron s’était déjà fait connaître, notamment grâce à ses prouesses sur l’équipe du Québec. Son talent et son dévouement au football ne laissaient aucun doute. Si bien que tous les gros programmes l’ont courtisé.

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À la surprise générale, c’est avec les Filons du Cégep de Thetford Mines, en deuxième division, qu’il a décidé de poursuivre son développement.

Avant de s’illustrer dans la NCAA, Matthew Bergeron a fait ses classes sur la scène collégiale québécoise avec les Filons de Thetford Mines.
Avant de s’illustrer dans la NCAA, Matthew Bergeron a fait ses classes sur la scène collégiale québécoise avec les Filons de Thetford Mines. Photo fournie par Diego Ratelle, cégep de Thetford Mines

« Il aurait pu aller jouer partout au niveau collégial. À son année de recrutement, on lui a vendu le fait qu’il pouvait aller en division 1, mais qu’il allait faire partie de quelque chose qui roulait déjà. En venant chez nous, il avait l’occasion de faire la différence et de devenir un pilier important. 

« Il a embarqué là-dedans, même si personne ne comprenait son choix. Son chemin était tracé pour aller dans un gros club de division 1. Tout le monde était après lui. Plutôt que de lui parler juste de football, on lui a parlé de nos valeurs humaines. On est très centrés sur la famille chez nous et c’est un message qui a résonné fort chez lui », se souvient son entraîneur-chef de l’époque, Diego Ratelle.

Une inspiration

Pour son ex-entraîneur, c’est la preuve que le potentiel peut être développé partout et qu’un objectif n’est pas atteint uniquement par la voie toute tracée.

« Matthew, son histoire est encore plus belle que ce qu’il est en train d’attendre. Ses réussites, il les mérite tellement. 

« La plupart des joueurs au Québec qui ont percé dans la NFL viennent de Montréal ou des gros centres urbains. Matthew est dans un contexte complètement différent. C’est le petit gars de Victoriaville qui a joué à Thetford Mines. C’est son expérience et il en est fier. Il peut influencer d’autres jeunes qui viennent de petits patelins, qui vivent dans des milieux modestes, et leur dire que c’est possible de rêver grand », se réjouit Diego Ratelle. 

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Durant son séjour dominant de deux saisons à Thetford, Bergeron a pris part à un camp d’essai à l’Université de Syracuse, où les entraîneurs sont immédiatement tombés sous le charme. 

Mike Lynch, qui était coordonnateur offensif et entraîneur de la ligne offensive, a passé des heures au téléphone avec les entraîneurs à Thetford pour faire enquête sur Bergeron. Il le voyait dans sa soupe.

C’est Maxim Lépinay, qui agissait comme coordonnateur offensif et préparateur physique des Filons, qui faisait le pont avec Syracuse.

« Je disais à Matthew qu’il avait une vraie opportunité là-bas avec un coach qui croyait en lui. Il est arrivé dans un environnement modeste où il n’était pas dépaysé. Il aurait pu attendre l’appel des gros programmes, mais il se sentait à l’aise et on lui a recommandé de foncer », a-t-il expliqué.

Bergeron a finalement écoulé les quatre dernières années à Syracuse, où il a terminé à titre de capitaine élu par ses coéquipiers. Le voilà, à 23 ans, aux portes de la NFL.

« On savait qu’il était un bon joueur, que c’était toute une bibitte. Dans ma tête, c’était sûr qu’il allait jouer pro, mais avec Matthew on ne parlait jamais de NFL. C’est dur d’imaginer la progression d’un joueur dans la NCAA », se souvient Lépinay.

Toujours surprendre

« Ce qui m’a toujours impressionné, c’est son athlétisme pour son poids. Il a toujours bougé comme un chat, avec le gabarit d’un éléphant. Côté personnalité, il a toujours voulu plus que les autres et on pouvait deviner qu’il irait loin. Il a une attitude différente. Il a compris assez vite que tu embarques dans la parade ou que tu te contentes des restes», a louangé celui qui l’a aidé en peaufinant son entraînement.

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Bergeron joue évidemment très gros, actuellement à Indianapolis. D’innombrables entrevues avec les équipes de la NFL le tiennent bien éveillé. C’est sans parler des nombreux tests physiques prévus dimanche et lundi pour les joueurs de ligne offensive.

« C’est une fierté énorme pour nous. Au-delà de l’athlète, ce jeune-là a quelque chose de spécial comme individu. Il va encore surprendre au Combine, j’en suis convaincu. À chaque fois qu’il se retrouve avec les meilleurs, il superforme », a prédit Diego Ratelle.

Le repêchage de la NFL se déroulera du 27 au 29 avril, à Kansas City. 

DES ÉLOGES

Au secondaire, il s’alignait avec les Vicas de Victoriaville. L’un de ses mentors, l’entraîneur-chef Jean Bourassa, est en sa compagnie lorsqu’il a gagné le titre de meilleur joueur de ligne offensive
Au secondaire, il s’alignait avec les Vicas de Victoriaville. L’un de ses mentors, l’entraîneur-chef Jean Bourassa, est en sa compagnie lorsqu’il a gagné le titre de meilleur joueur de ligne offensive Photo fournie par Jean Bourassa, Vicas de Victoriaville

Daniel Jeremiah analyse le repêchage pour NFL Network et fait partie des voix les plus respectées. Voici ce qu’il a dit sur Matthew Bergeron lors d’une téléconférence avec les médias. 

«Il a une très bonne base. Il fait un bon travail pour tenir longtemps son bloc et il a une bonne vitesse sur ses déplacements latéraux. Je le vois comme un joueur très solide dans l’ensemble. Il a tous les mouvements et aptitudes pour jouer bloqueur au prochain niveau. Certains disent qu’il pourrait être déplacé à l’intérieur comme garde. Je sais qu’il pourrait le faire, mais je ne vois pas de raisons de le changer de position. »

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