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L'article provient de Le Journal de Montréal

Verdissons nos berges pour sauver nos lacs et nos rivières

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Photo portrait de Albert Mondor

Albert Mondor

2023-09-10T04:00:00Z
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Les années 1970 et 1980 ont été une époque sombre durant laquelle les berges de nombreux lacs et rivières furent dénudées de leur végétation pour y construire des chalets, des murs de béton et des empierrements ou pour y implanter des plages et des pelouses.

Dans plusieurs écosystèmes aquatiques, l’érosion des berges passée et présente est un problème qui mène à des déséquilibres importants dans les lacs, dont la prolifération des fameuses cyanobactéries. Heureusement, il est maintenant interdit d’éliminer les végétaux qui poussent sur les rives de la plupart des cours d’eau du Québec. Toutefois, certains lacs et rivières sont actuellement en mauvais état et doivent être renaturalisés afin de pouvoir retrouver leur santé.

Des phénomènes combinés

Le fait d’éliminer les plantes qui poussent sur les rives d’un cours d’eau peut avoir pour effet de rendre l’eau trouble et plus chaude. Lorsqu’il n’y a plus de végétaux pour stabiliser les berges, les eaux de ruissellement tombent directement dans l’eau, chargées de terre, de matières organiques et de fertilisants, sans être filtrées. Les berges nues sont aussi plus sujettes à l’érosion par les vagues – particulièrement celles causées par certains bateaux –, ce qui contribue à augmenter la quantité de terre et de matière organique en suspension dans l’eau.

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L’absence de plantes sur les berges a également pour effet d’élever la température de l’eau. Les végétaux ombragent l’eau et permettent d’éviter qu’elle soit directement exposée aux rayons du soleil à certains moments de la journée, tandis que la terre nue et les pierres accumulent beaucoup de chaleur qu’ils transmettent ensuite à l’eau. Ces deux phénomènes combinés – augmentation des sédiments en suspension dans l’eau et augmentation de la température de l’eau – figurent parmi les causes de la prolifération des cyanobactéries.

Autre phénomène important : le fait qu’il y ait peu de plantes autour d’un lac ou d’une rivière a un impact direct sur la biodiversité animale. Une diminution du couvert végétal se traduit habituellement par une raréfaction des abris et des lieux de ponte pour les poissons et les batraciens, ainsi que par une -diminution de la quantité de nourriture disponible pour ces animaux.

Les Cyanobactéries

Les cyanobactéries, appelées communément algues bleu-vert, sont des organismes microscopiques qui existent sur notre planète depuis environ 3,5 milliards d’années. Êtres vivants primitifs semblables aux bactéries, elles se distinguent toutefois de ces dernières par le fait qu’elles sont capables d’effectuer la photosynthèse – c’est-à-dire de convertir la lumière provenant du soleil en énergie – comme le font les algues.

Dans les cours d’eau en santé, les cyanobactéries sont habituellement invisibles, car elles sont présentes en faibles quantités. Lorsqu’elles deviennent surabondantes, elles forment à la surface de l’eau des plaques qui ressemblent à de l’écume ou à de la peinture dont la couleur varie du vert olive au turquoise. Ces plaques sont généralement formées de cyanobactéries mortes. À ce stade, elles perturbent l’équilibre des milieux aquatiques et libèrent des toxines dangereuses pour les humains et certains animaux. 

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Lorsqu’on est en présence de cyanobactéries en bordure d’un lac, il faut s’abstenir d’inhaler les vapeurs émises par celles-ci. Il faut également éviter de se baigner et de consommer du poisson ou de boire l’eau provenant du lac contaminé.

La prolifération excessive des cyanobactéries dans certains cours d’eau est causée par leur enrichissement en azote et en phosphore. Ces éléments nutritifs proviennent de diverses sources. Dans certaines régions, c’est la fertilisation et l’épandage de fumiers sur les terres agricoles qui sont la cause du problème, alors qu’en d’autres endroits l’élimination des végétaux vivant sur les rives, la déforestation du bassin versant, les installations septiques déficientes, les rejets d’eaux usées ainsi que la fertilisation des pelouses et des terrains de golf sont les principales sources d’azote et de phosphore qui favorisent la croissance effrénée des cyanobactéries.

Essentiels végétaux

Le moyen le plus sûr pour redonner vie à un cours d’eau en mauvaise santé est de planter des végétaux sur ses berges nues, idéalement des plantes indigènes typiques des milieux aquatiques de notre province. Essentielles au bon fonctionnement des cours d’eau, les plantes aquatiques empêchent entre autres la prolifération des algues et fournissent également nourriture, abris ainsi que lieux de ponte et de nidification pour une foule d’espèces animales.

Il existe quatre groupes de plantes aquatiques distincts. 

Les plantes à feuilles flottantes, telles que le nymphéa odorant et le grand nénuphar jaune, ombragent l’eau grâce à leurs grandes feuilles et servent d’abri aux poissons ainsi qu’à certaines larves d’insectes utiles et de repères aux grenouilles et quelques espèces d’oiseaux pour guetter leurs proies.

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Les plantes flottantes, elles, comme la lentille d’eau, flottent librement sur la surface de l’eau sans être enracinées au substrat.

Les plantes submergées, comme l’élodée du Canada, vivent sous la surface de l’eau. Elles servent de nourriture pour certains poissons et sont essentielles pour oxygéner l’eau.

Finalement, les végétaux des lieux humides, comme l’iris versicolor, le myrique baumier et la pontédérie, sont des plantes dont le pied peut être recouvert d’eau, mais dont le feuillage doit toujours être à l’air libre. En plus de retenir le sol avec leurs racines, ces plantes abritent une grande quantité d’insectes, de grenouilles, d’oiseaux ainsi que de petits mammifères et servent de frayère à certains poissons. Leurs feuilles et leurs fruits nourrissent bon nombre d’espèces animales et leurs fleurs constituent une source de nectar pour les insectes pollinisateurs.

Voici la description de certaines des plantes des lieux humides les plus utiles pour la revitalisation des berges des cours d’eau. Si vous désirez regarnir les berges du lac ou de la rivière qui borde le terrain où vous habitez, privilégiez ces plantes indigènes robustes. Toutefois, avant de planter des végétaux sur les berges d’un cours d’eau, assurez-vous de consulter le service de l’environnement de votre municipalité. 

Sanguisorbe du Canada

Photo fournie par Illinois Wildflowers
Photo fournie par Illinois Wildflowers

  • Hauteur : 1,20 m
  • Largeur : 70 cm
  • Floraison : blanche en août et septembre
  • Ensoleillement : soleil, mi-ombre
  • Sol : riche et humide, voire détrempé
  • Rusticité : vivace rustique en zone 1 

La sanguisorbe du Canada est une plante indigène de l’est de l’Amérique du Nord. Elle est très rustique puisqu’elle survit aux conditions hivernales qui sévissent en zone 1. En août et en septembre, elle produit des fleurs blanches regroupées en épis bien dressés portés par des tiges atteignant un peu plus de 1 mètre de hauteur.

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Cette plante est à l’aise au plein soleil ou à la mi-ombre dans les sols riches et humides, voire détrempés, situés aux abords des cours d’eau. Elle peut aussi pousser dans une plate-bande au sol frais ou humide. 

Eupatoire perfoliée

Photo Albert Mondor
Photo Albert Mondor

  • Hauteur : 1,50 m
  • Largeur : 1 m
  • Floraison : blanche en septembre
  • Ensoleillement : soleil, mi-ombre, ombre légère
  • Sol : riche et humide
  • Rusticité : vivace rustique en zone 2 

La floraison blanche de cette vivace, qui survient à la fin de l’été, constitue une excellente source de nectar pour les abeilles, les bourdons ainsi que certains papillons. Bien qu’elle puisse bien pousser dans un sol temporairement sec, l’eupatoire perfoliée donne le meilleur d’elle-même lorsqu’elle est plantée sur la rive d’un cours d’eau. 

Céphalanthe occidental 

Photo tirée du site web plantedehaies.be
Photo tirée du site web plantedehaies.be

  • Hauteur : 2 m
  • Largeur : 2,50 m
  • Floraison : blanche à la fin de juillet et au début d’août
  • Ensoleillement : soleil, mi-ombre, ombre légère
  • Sol : riche et humide, voire détrempé
  • Rusticité : arbuste rustique en zone 3 

Le céphalanthe occidental est un arbuste indigène d’Amérique du Nord qui atteint dans le sud-ouest du Québec sa limite septentrionale de répartition. On le retrouve aussi aux États-Unis, au Mexique ainsi que dans l’île de Cuba, dans les marécages et aux abords de certains cours d’eau. 

Les petites fleurs blanches de ce gros arbuste, qui éclosent pendant quatre ou cinq semaines, sont disposées en inflorescences parfaitement sphériques et exhalent un sublime parfum. 

Le céphalanthe occidental occupe une place importante dans l’écologie de plusieurs d’animaux. Ses inflorescences attirent de nombreux insectes pollinisateurs et papillons. Cet arbuste est d’ailleurs l’hôte de la larve du sphinx du céphalanthe. De plus, ses fruits brunâtres sont mangés par divers oiseaux. 

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Le céphalanthe occidental pousse bien au plein soleil, à la mi-ombre ou à l’ombre légère dans un sol riche en humus et toujours humide ou détrempé. Il accepte même que son pied soit immergé sous 5 à 10 cm d’eau. 

Pontédérie à feuilles cordées

Photo fournie par Devon Pond Plants
Photo fournie par Devon Pond Plants

  • Hauteur : 1 m
  • Largeur : 75 cm
  • Floraison : bleue à la fin de juillet et en août
  • Exposition : soleil
  • Sol : riche et détrempé, la base des plants peut être immergée sous l’eau
  • Rusticité : vivace rustique en zone 4 

La pontédérie est une plante indigène qui pousse spontanément dans les étangs, les lacs et les marais d’Amérique du Nord. En juillet et en août, cette vivace aquatique arbore des épis de fleurs bleu vif.

La pontédérie à feuilles cordiformes affectionne les sols riches et détrempés. Il est possible de la planter dans la vase à une profondeur de 10 à 40 cm sous la surface de l’eau. Pour bien profiter, cette vivace nécessite le plein soleil. 

Myrique baumier 

Photo Albert Mondor
Photo Albert Mondor

  • Hauteur : 1 m
  • Largeur : 1 m
  • Floraison : jaune orangé en mai
  • Ensoleillement : soleil, mi-ombre, ombre légère
  • Sol : s’adapte à divers types de sols humides ou détrempés
  • Rusticité : arbuste rustique en zone 1 

Le myrique baumier est une plante typique de la flore de nos lacs et rivières. Comme il pousse habituellement sur les berges, il est essentiel à la stabilisation du sol des rives de nombreux cours d’eau. Plante à croissance rapide, robuste, et rarement affectée par les maladies et les insectes, le myrique baumier s’accommode des sols détrempés comme des sols temporairement secs. De plus, les racines de cet arbuste sont associées à des bactéries qui absorbent l’azote atmosphérique.

Les feuilles et les fruits du myrique baumier sont comestibles. Les fruits ont une saveur piquante et sont moulus afin de remplacer le poivre. D’autre part, on utilise les feuilles du myrique baumier de la même façon que les feuilles de laurier, pour aromatiser les bouillons et les sauces ou comme succédané du houblon dans la bière.

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