Vaste fraude hypothécaire de plus de 5 M$: deux Montréalais ont échoué à créer un doute dans la tête du juge
Sacha Anawati et Jean Carlos Mejia ont été déclarés coupables de recyclage de produits de la criminalité


Michael Nguyen
Deux Montréalais qui avaient participé à une vaste fraude hypothécaire de plus de 5 millions $ pendant la pandémie viennent d’être reconnus coupables, même s’ils avaient tenté de plaider l’ignorance pour s’en sortir.
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«De grosses sommes d’argent n’apparaissent pas comme par magie sur un compte bancaire sans raison», a lancé le juge Salvatore Mascia, en scellant le sort des accusés ce vendredi au palais de justice de Montréal.
Assis l’un à côté de l’autre dans la salle d’audience, Sacha Anawati et Jean Carlos Mejia n’ont pas dit un mot en écoutant le magistrat rappeler comment un groupe de fraudeurs a pu flouer des propriétaires, en 2020 et 2021.
Selon la preuve de la Couronne, la fraude consistait à usurper l’identité de propriétaires dont l’immeuble était libre de toute dette.

Par visioconférence
Des «personnificateurs» se faisaient alors passer pour les véritables propriétaires, et signaient de fausses procurations. Cela se faisait devant notaire et, pandémie oblige, souvent par visioconférence.
Le champ était alors libre pour effectuer des demandes d’hypothèques faramineuses.
«Des employés de banque complices, comme une gérante d’une succursale TD à Brossard, facilitaient les transactions importantes et les retraits d’argent», a noté le juge.
De nombreux virements ont été effectués depuis l’adresse résidentielle d’Anawati. Il était aussi impliqué dans des étapes cruciales du stratagème, comme le recrutement de complices.

Mejia, de son côté, avait blanchi 1,5 million $ via des sociétés-écrans, dont une de vêtements. Selon une analyse juricomptable, pratiquement tout l’argent injecté dans cette compagnie provenait «directement ou indirectement» de prêts hypothécaires frauduleux.
Les retraits du compte de l’entreprise étaient «massifs» et surtout en argent comptant, a rajouté le juge.
Le stratagème du groupe a toutefois été éventé quand un propriétaire de Westmount a voulu obtenir un prêt, pour se faire dire que sa maison était déjà lourdement hypothéquée.
Défense rejetée
Pour Mes Sarah-Audrey Daigneault et Émilie Robert de la Couronne, il était évident qu’Anawati et Mejia, âgés de 45 et 32 ans, avaient participé sciemment au stratagème.
Mais pour la défense, s’il était clair qu’il y avait bien eu fraude, les deux accusés ne pouvaient pas savoir que l’argent provenait d’activités illégales.

«À tout le moins, il a fait preuve d’aveuglement volontaire, a rétorqué le juge à propos de Mejia. Toute suggestion selon laquelle il aurait été trompé par des fraudeurs professionnels ne repose que sur de pures spéculations.»
Le juge n’ayant pas cru la théorie de la défense, Anawati et Mejia ont ainsi été reconnus coupables de recyclage de produits de la criminalité.
Ils reviendront à la cour ultérieurement, pour les plaidoiries sur la peine à leur imposer.
D’autres coaccusés, tels que Phuoc Hung Luu, Xu Yi Huang et Emma Gonzalez, avaient pour leur part plaidé coupables avant le procès. Cette dernière avait d’ailleurs témoigné pour la Couronne. Dans leur cas, leur sentence sera connue lors d’une prochaine audience.
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