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L'article provient de Le Journal de Montréal
Monde

Une victoire molle, un climat explosif

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Photo portrait de Mathieu Bock-Côté

Mathieu Bock-Côté

2022-04-25T09:00:00Z
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Sur le papier, la victoire d’Emmanuel Macron semble éclatante. Avec 57 % d’appuis, il pourrait même parler d’un triomphe. Et, de son côté, Marine Le Pen, vaincue avec 43 % des suffrages exprimés, aurait pu se sentir humiliée. 

Ce n’est pourtant pas l’impression qui ressortait de la soirée électorale du second tour de la présidentielle. 

Pour le président de la République, il s’agit d’une victoire molle, sans enthousiasme : ses militants rassemblés se sont d’ailleurs vite dispersés.

Le score est élevé, mais il manque de consistance, et il résulte essentiellement d’une campagne de peur menée contre Marine Le Pen, présentée comme un danger pour la démocratie. 

Emmanuel Macron a profité d’un vote contre, mais pas d’un vote pour. 

De l’autre côté, Marine Le Pen a présenté sa défaite comme une victoire morale, et se montrait particulièrement agressive contre le président tout juste réélu, comme si elle disposait d’une légitimité équivalente à la sienne.

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Revers

Marine Le Pen croyait pourtant à sa victoire. Comment peut-elle alors se contenter de son score ?

Il s’agit assurément d’un sommet électoral dans l’histoire du Rassemblement national. Mais il s’agit d’une vraie défaite quand même.

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Quoi qu’il en soit, pour elle, la bataille continue : à l’horizon, les élections législatives du mois de juin. 

Mais elle n’est pas la seule à voir les choses ainsi : Jean-Luc Mélenchon, le candidat vaincu du premier tour associé à la gauche radicale, s’est aussi lancé à l’assaut du président réélu et claironne qu’il veut devenir le prochain premier ministre français, en transformant le président en spectre, en figure impuissante. 

L’homme est charismatique, et après la défaite de Marine Le Pen contre Emmanuel Macron, il espère canaliser l’énergie contestataire qui traverse un pays profondément divisé.

J’ajoute une observation : sur les plateaux de télévision français, il n’y avait aucune sérénité.

3 groupes

Personne n’acceptait les résultats, sauf, évidemment, les partisans du président reconduit.  

Ce refus est symptomatique de fractures profondes, qui divisent la France et que représentent désormais ce que j’appelle les trois blocs de la politique française, qui remplacent les traditionnelles forces de gauche et de droite. 

On trouve à gauche un bloc anticapitaliste, écologiste et multiculturaliste autour de Jean-Luc Mélenchon.

On trouve à droite un bloc national divisé, qui peine à se réunir, mais qui, théoriquement, rassemble ceux qui sont préoccupés par l’immigration massive et l’identité. Marine Le Pen et Éric Zemmour s’en disputent le leadership.

Ces deux blocs sont associés aux « extrêmes » par le pouvoir médiatique.

Et il y a le bloc central, libéral, européiste, progressiste, rassemblé autour d’Emmanuel Macron, qui rassemble les élites du pays et qui est de plus en plus hégémonique. 

La France est divisée, extrêmement divisée, et même avec un président élu à 58 %, on ne l’imagine pas se rassembler.

  • Écoutez la chronique de Mathieu Bock-Côté sur QUB radio :

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