Une pêcheuse à la tête d’un empire


Patrick Campeau
Quand on entend d’incroyables histoires à succès, on a souvent l’impression que ça se passe ailleurs sur la scène internationale.
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Pourtant, un des plus gros et anciens manufacturiers de cuillères, avec une réputation mondiale, Brecks, est un de nos fleurons dans la Belle Province.
Un peu d’histoire
Après avoir trouvé un bon filon d’or au Klondike, les frères Williams bâtissent une raffinerie d’or afin de fournir le métal précieux aux dentistes qui en façonnent des plombages. Fervents pêcheurs de truite grise, les frères Williams décident de fabriquer leurs propres leurres. Après quelques expérimentations, ils découvrent qu’en plaquant les cuillères avec l’or de leur raffinerie, ils peuvent en accroître incroyablement l’efficacité. La firme Williams voit le jour alors, il y a 108 ans.
Lorsque John A. Greene inventa en 1938 des cuillères qui imitaient à la perfection des poissons-appâts, les Wobbler de Mooselook, ce fut un succès instantané pour cet artisan.
C’est en 1920 que le guide francophone H. Robare a découpé l’intérieur chromé d’un phare de voiture avec des pinces coupantes. La forme arrondie de la Lake Clear Wabbler et son action inimitable venaient de changer la donne dans l’industrie pour toujours.
Juste là, à cette échelle, on parle déjà de plus de 300 ans d’histoire de pêche. Ajoutez à ce superbe porte-folio des compagnies comme Mepps, longtemps connue comme étant la plus grande fabricante de leurres au monde, Mister Twister, Savant, etc.
Les échelons
Il y a 75 ans, la firme Brecks est fondée par le père de David Breckenridge. Ce brillant homme d’affaires, qui distribuait déjà les produits Mepps et des mouches, acquiert, au fil du temps, les diverses compagnies mentionnées ci-haut. En 1989, il achète la firme Williams et il déménage l’usine ainsi que toutes les installations à Sherbrooke, sur la rue Roy.
Vous connaissez certainement l’adage qui dit : « Derrière chaque grand homme, il y a une grande femme ». Eh bien, c’est le cas pour l’entreprise Brecks. Sharon Gautrey est à l’emploi de cette compagnie depuis plus de 40 ans. Elle y a occupé tous les postes avant de devenir contrôleuse. David et Sharon, qui avaient les mêmes passions, ont uni leurs destinées au fil du temps. À la mort de M. Breckenridge, cette battante a repris les rênes et elle dirige l’entreprise d’une main de maître, tout en refusant de faire comme de nombreux compétiteurs qui confient la production de leurs offrandes aux divers marchés asiatiques.
Conseils
Mme Gautrey passe plus d’une trentaine de journées par année à taquiner les diverses espèces de poissons qui nagent dans nos eaux. Je lui ai demandé de bien vouloir donner de bons trucs aux lecteurs du Journal sur l’utilisation des divers leurres de son entreprise. Très humble, cette dame m’a remis une liste avec ses secrets amalgamés à ceux de David Breckenridge et de ses fidèles employés, Mark Stiffel et Julien Morency. Voici l’essentiel de ses propos.
À la cuillère
Les gaspareaux et les ciscos de bonne taille sont des proies particulièrement attrayantes pour les touladis et les brochets. Nous avons créé la Whitefish C70 et C90 pour imiter cette source de nourriture à haute teneur en énergie qui n’a pas d’épines difficiles à avaler. On la lance au loin et on la laisse caler pendant 15-20 secondes, puis on la récupère sur 4-5 mètres, pour ensuite la laisser recaler pendant quelques secondes et ainsi de suite. Les prédateurs y voient une occasion de se régaler sans effort.
Au printemps, les menés sont petits. Mesurant 1 7/8 po et pesant à peine 1/12 d’once, la Mooselook 112 Midget ressemble à s’y méprendre à un poisson-fourrage. Son fini or ou argent véritable génère une quantité de reflets inégalée. Au lancer léger, ou encore mieux, avec soie flottante qui suit parfaitement le parcours de l’embarcation, vous pourrez déjouer toutes les espèces d’ombles et de truites.
De bonnes options
La mouchetée se cache souvent près des rives au printemps. Ces endroits qui accrochent sont parfois difficilement exploitables. La Winnie est une cuillère en forme de feuille de saule de 2 3⁄4 po et d’un poids de 1⁄4 d’once. Elle se faufile littéralement partout, surtout si vous prenez soin de refermer légèrement l’angle des trépieds. De plus, elle ondule différemment au rythme de la vitesse de récupération.
En début de saison, la Wabler Lite W55 est une autre bonne option. Ne pesant que 1⁄4 d’once, elle ne s’enfoncera pas comme sa grande sœur la W50 qui pèse le double, soit 1⁄2 once. Contrairement à l’été où on suggère des bas de lignes pouvant mesurer jusqu’à 48 po, on se limitera à une longueur de moins de 18 po. Ainsi, lors de chaque déhanchement, le ver derrière la cuillère ne sera pas propulsé sur un axe trop large, rendant la présentation beaucoup moins accrocheuse.
Une offrande méconnue
La Ridge Back est une offrande méconnue pesant 2/5 d’once. Elle est facile à catapulter au loin en plus de refléter toute la lumière ambiante. Cette cousine de la Little Cleo s’enfonce approximativement de trois pieds aux deux secondes. On peut ainsi facilement l’envoyer au cœur de l’action. Quand les attaques se font rares, on applique des saccades agressives pour faire réagir les salmonidés.
À la pêche blanche, on peut se servir de menés morts à certains endroits. Si c’est le cas, enlevez le trépied de l’anneau fendu d’une cuillère de votre choix pour l’espèce ciblée, comme une Williams Wabler, une Mooselook Midget ou Winnie, une Nipigon ou autre. Ajoutez-y une attache rapide sans nœud de type Fastach clip qui facilite l’installation et le retrait du trépied.
Sur la broche située au centre, empalez une tête de mené de part en part en vous assurant de positionner la gueule du vairon vers le ciel. Sécurisé bien en place, l’appât résistera à de nombreuses attaques tout en rehaussant de manière significative votre montage. Optez pour une tête de poisson proportionnelle en fonction de la taille du leurre.
Action plus vive
À l’époque, une des techniques préférées de David consistait à nouer une mouche de type Muddler de 9 à 12 po en avant d’une cuillère W10, W20 ou W30. Ce spectacle laisse croire aux autres spécimens des environs qu’un petit cyprin s’apprête à dévorer un insecte de belle taille. Tous les instincts primaires des prédateurs sont alors mis en alerte.
La cuillère Geneva G22 de Lake Clear est un attracteur en forme de larme. Elle mesure 3 1/8 po de longueur, par 1 1⁄2 po de largeur et elle pèse 2/3 d’once.
Un des secrets les mieux gardés est que cette offrande qui est conçue pour être récupérée en tandem avec un bas de ligne et un lombric peut être inversée sur elle-même.
Dans un tel scénario, son action sera beaucoup plus vive et soutenue, puis le ver se déplacera derrière le montage sur un axe vraiment plus large.