Bilinguisme des juges: une intervention «illégale» du ministre Jolin-Barrette, tranche la cour
Agence QMI
Le ministre de la Justice Simon Jolin-Barrette vient de perdre une manche importante dans sa bataille qui l’oppose à la juge en chef de la Cour du Québec.
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La Cour supérieure a jugé « illégale » une intervention du ministre dans le dossier du bilinguisme des juges.
Selon la Cour, M. Jolin-Barrette a eu tort en tentant d’empêcher la juge en chef Lucie Rondeau d’imposer le bilinguisme comme condition d’embauche pour certains postes de juge.
« Le ministre de la Justice ne jouit d’aucun pouvoir quant à la rédaction des avis de sélection des candidats à la fonction de juge à la Cour du Québec », a déterminé sans détour le tribunal.
L’an dernier, M. Jolin-Barrette, aussi responsable de la Langue française, avait entamé un bras de fer avec la juge en chef Rondeau, en s’immisçant dans le processus de sélection des juges pour éviter que leur bilinguisme soit exigé.
La juge Rondeau, qui souhaite le bilinguisme quasi systématique des juges, avait décidé de faire valoir sa position en poursuivant le ministre, une procédure plutôt rare.
La juge souhaitait ainsi protéger l’indépendance judiciaire et dépolitiser le processus de sélection.
Le gouvernement a répété qu’il n’est pas contre le bilinguisme, mais n’accepte pas le recours systématique à cette exigence lorsque ce n’est pas justifié.
Québec estimait que les avocats devraient tous pouvoir espérer accéder à la magistrature et la maîtrise d’une langue autre que la langue officielle ne devrait pas d’emblée représenter un obstacle.
Défense du français
Le cabinet du ministre Jolin-Barrette a indiqué être en train de prendre connaissance du jugement.
« Une chose est certaine, nous ne ménagerons aucun effort pour défendre, promouvoir et valoriser la langue française et s’assurer que tous les Québécois puissent accéder à tous les postes, peu importe lesquels », a indiqué le cabinet dans une courte déclaration écrite.
Le ministre n’a pas indiqué s’il comptait faire appel de la décision.
Aux yeux du gouvernement, le bilinguisme ne devrait pas être une condition imposée presque automatiquement par crainte d’écarter des candidats unilingues francophones.
Des modifications
En octobre dernier, le gouvernement avait publié des avis de sélection de juges qui ne contenaient pas de critère de bilinguisme pour des postes à Montréal, Joliette, Labelle, Laval et Terrebonne.
Ces avis devront finalement être remplacés.
Le torchon brûle depuis un certain temps entre la juge Rondeau et le ministre Jolin-Barrette.
Ce dernier avait aussi dû modifier son projet de loi sur la création d’un tribunal spécialisé en violence sexuelle et conjugale, dans la foulée de critiques de la juge en chef.
-Avec Jean-François Racine