Une belle grande famille dysfonctionnelle avec Trump comme principale attraction réunie en Alberta pour le G7
Est-ce que Donald Trump fera un coup d’éclat? C’est la grande question de ce sommet

Guillaume St-Pierre – analyse
Les grands sommets internationaux sont rarement le théâtre de confrontations entre chefs d’État. Mais avec Donald Trump, on ne sait jamais. On se souvient de son départ précipité du G7 de Charlevoix en 2018. Aux prises avec des tensions sociales dans son propre pays, serait-il tenté de détourner l’attention avec un autre coup d’éclat? Le bouillant président a connu récemment des clashs diplomatiques violents avec deux des invités de Mark Carney, soit Volodymyr Zelensky et Cyril Ramaphosa, de l’Afrique du Sud. De dimanche à mardi, les yeux de la planète seront tournés vers les Rocheuses canadiennes.
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Mark Carney (Canada)
Ce sera la grande rentrée internationale du nouveau premier ministre Carney, qui veut faire bonne impression. Il a haussé drastiquement, à quelques jours du sommet, nos dépenses militaires, soucieux de jouer dans la cour de grands. Son grand défi sera d’apaiser les tensions commerciales avec Donald Trump sans avoir l’air trop amical avec le président qui lui a servi d’épouvantail durant la campagne électorale. Un exercice délicat. Comment réagira-t-il si Trump ose revenir à la charge avec ses menaces sur le 51e État, ici même, au Canada?
Emmanuel Macron (France)
Le doyen du G7 n’a jamais eu la langue dans sa poche face à Donald Trump. Visiblement, le président français ne craint pas de déranger. En route vers l’Alberta, il s’arrêtera au Groenland, un territoire du Danemark que convoite Trump. Il sera le premier chef étranger à s’y rendre depuis les menaces d’annexion du président. Le message est on ne peut plus clair... Macron tente aussi de recoller les pots cassés avec l’Italienne Giorgia Meloni, plus proche idéologiquement de Trump.
Keir Starmer (Royaume-Uni)
Le premier ministre anglais passera beaucoup de temps avec Mark Carney. Il arrive au Canada samedi, avant tout le monde, pour souper en privé avec lui à Ottawa. Au G7, Starmer voudra éviter tout choc ou accrochage avec Donald Trump, alors que l’accord commercial entre les deux pays demeure fragile. Starmer pourrait se retrouver sur la défensive si Trump lui remet sur le nez la poussée dans les sondages du parti anti-immigration de son ami et admirateur Nigel Farage.
Shigeru Ishiba (Japon)
Comme bien des pays, le Japon est à la recherche d’un accord avec les États-Unis pour mettre fin à la guerre commerciale mondiale lancée par Trump. À quelques heures du sommet, il aurait convaincu le président d’accélérer les discussions afin d’en arriver à une entente. Mais il souffre dans son pays de la comparaison avec l’ex-premier ministre Shinzo Abe, mort assassiné en 2022, qui avait réussi à tisser des liens étroits avec Donald Trump.
Friedrich Merz (Allemagne)
Le nouveau chancelier allemand a joué la carte de l’émotion lors de son passage dans le Bureau ovale, début juin, en offrant à Trump une copie encadrée en or de l’acte de naissance de son grand-père d’origine allemande. Merz voudra poursuivre sur sa lancée pour se faire une place dans les discussions sur la guerre en Ukraine entre Trump et l’Europe, menées par Emmanuelle Macron et le Royaume-Uni. Il arrive au sommet avec un énorme chéquier de dépenses militaires.
Donald Trump (États-Unis)
Donald Trump fera-t-il son show? C’est LA grande question de ce sommet. En 2018, le président avait quitté Charlevoix en insultant Justin Trudeau. À l’époque, il était entouré de gens plus ou moins normaux, ce qui n’est plus le cas de son entourage actuel, composé de fidèles. Ce sera la première fois qu’il met les pieds au Canada après nous avoir menacés d’annexion économique. Encore une fois, Trump sera le principal caillou dans le soulier de l’unité du groupe du G7.
Giorgia Meloni (Italie)
Celle qui chuchote à l’oreille de Trump avait soulevé l’ire des États-Unis, dirigés à l’époque par Joe Biden, et de la France lors du dernier G7, qui se tenait en Italie l’an dernier. La leader identifiée à l’extrême droite s’était alors opposée à ce que le groupe fasse référence au droit à l’avortement dans la déclaration finale. Elle est, au sommet de Kananaskis, la principale alliée idéologique de Donald Trump.
Narendra Modi (Inde)
La venue du premier ministre indien est loin de faire l’unanimité. Les liens entre le Canada et l’Inde sont dans un creux historique en raison de l’assassinat d’un Canadien d’origine sikhe possiblement orchestré par le gouvernement Modi. Mark Carney semble vouloir rétablir les ponts avec cette invitation qui crée un énorme malaise au sein même des libéraux. Mais pour M. Carney, il vaut mieux avoir le pays le plus populeux de la planète autour de la table lorsqu’il est question d’enjeux aussi importants.
Volodymyr Zelensky (Ukraine)
Trump et Zelensky se sont vus en personne pour la dernière fois au Vatican, fin avril, à l’occasion des funérailles du pape François. Il s’agissait d’un premier tête-à-tête depuis l’infâme choc dans le Bureau ovale, fin février. À Kananaskis, Zelensky tentera de convaincre Trump d’imposer de nouvelles sanctions contre la Russie, qui refuse un cesser-le-feu, pour lui couper des sources de financement pour sa guerre. Trump, pour l’instant, fait la sourde oreille.
Claudia Sheinbaum (Mexique)
Tout comme le Canada, le Mexique est frappé de plein fouet par la guerre commerciale lancée par Donald Trump. La présidente mexicaine a accepté l’invitation du Canada dans l’espoir de s’entretenir avec Donald Trump sur le sujet. La guerre tarifaire a aussi détérioré la relation entre le Canada et le Mexique. Le premier ministre ontarien, Doug Ford, est prompt à jeter le Mexique sous l’autobus dans sa recherche d’une entente avec les Américains.
Cyril Ramaphosa (Afrique du Sud)
Le président sud-africain a goûté à la même médecine que Volodymyr Zelensky dans le Bureau ovale cette année, avec un échange corsé et controversé avec le président américain. Trump a accusé Cyril Ramaphosa de laisser faire un génocide blanc dans son pays, avec de fausses accusations largement démenties. Le Sud-Africain a confirmé qu’un tête-à-tête est prévu avec Trump dans l’espoir d’apaiser les tensions. Une des rencontres les plus anticipées du sommet.
Anthony Albanese (Australie)
Comme pour le Canada, l’effet Trump a frappé de plein fouet la scène politique australienne en mai dernier, avec la défaite surprise des conservateurs, dont le chef a même perdu son siège, comme Pierre Poilievre. Mais le premier ministre Albanese subit maintenant des pressions dans son pays pour régler la guerre commerciale avec les États-Unis. Cela commence par obtenir un tête-à-tête avec Trump à Kananaskis, ce qui était encore, à quelques heures du sommet, incertain.
Luiz Inácio Lula da Silva (Brésil)
Le président brésilien est un habitué des G7. Il y a été invité en 2023 et 2024. Le Brésil est un incontournable, faisant partie du top 10 des pays avec les économies les plus puissantes, même si la pauvreté demeure étendue dans sa population. C’est le genre de pays de plus en plus influents que souhaite attirer dans son giron le G7 pour notamment faire contrepoids à la Chine.
Lee Jae-myung (Corée du Sud)
Élu il y a quelques jours à peine, le président sud-coréen a du pain sur la planche. Son économie, basée sur les exportations de grandes entreprises technologiques comme Samsung, Hyundai et LG, est frappée de plein fouet par l’incertitude économique mondiale. Le vieillissement rapide de sa population pourrait aussi compromettre le niveau de vie des Sud-Coréens. Le pays se retrouve coincé entre l’arbre et l’écorce entre les États-Unis, qui assurent sa protection, et la Chine, son principal partenaire commercial.