Trudeau: un parfum de fin de régime


Mathieu Bock-Côté
La politique est une affaire de cycles.
Les grands leaders apparaissent, fascinent, gouvernent, inspirent, puis déclinent, avant de lasser, et même d’exaspérer.
Une fois qu’ils ont quitté le pouvoir, souvent, on les redécouvre, et on en devient nostalgiques. Churchill, de Gaulle, Lévesque, Bouchard, Reagan, Thatcher et d’autres ont connu cette trajectoire.
J’ajoute une chose : cette «loi» des cycles politiques est aussi valable pour ceux qui, sans être de grands leaders, ont su capter l’attention de leurs contemporains et faire une carrière politique.
Je parle ici de Justin Trudeau.
Ceux qui lisent cette chronique le savent: je n’appartiens pas à son fan-club, et l’ai toujours tenu pour un farfelu égaré en politique, faisant carrière sur un nom de famille et un visage avenant.
Mais il avait aussi su capter, il faut le reconnaître, l’esprit de notre temps, que j’associe à l’idéologie diversitaire. Les médias l’aimaient, les mondains aussi, sans oublier les autres personnages d’abord soucieux de leur réputation dans la bonne société.
Avant même de parler anglais ou français, Trudeau parlait le langage de l’époque. Qui parle anglais, précisons-le aussi.
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Mais voilà, Justin Trudeau ne passionne plus.
On ne le sent plus inspiré par grand-chose. L’homme des jours ensoleillés, qui voyait la vie publique sous le signe du carnaval, qui aimait se déguiser partout et tout le temps, est désormais en décalage avec une époque qui renoue avec le tragique.
Il ne semble plus trop aimer son travail, d’ailleurs. On ne le sent s’animer que lorsqu’il est question de diaboliser Pierre Poilievre : alors là, la politique redevient compréhensible pour lui. Son combat redevient simple. Les gentils affrontent les méchants, le bien s’oppose au mal, l’ouverture combat la fermeture. Là Trudeau comprend. Là ses repères fonctionnent.
Mais la pandémie, la crise migratoire, la guerre en Ukraine, les tensions avec la Chine, le dépassent. Et ce sont d’ailleurs ces dernières qui pourraient le faire tomber.
Pas nécessairement demain ou après-demain. Mais la crise de l’ingérence chinoise pourrait bien être celle qui achève sa disqualification comme politicien.
Car cette crise a vu son logiciel se retourner contre lui.
D’abord, il s’est drapé dans la vertu. Et il a voulu faire croire que le simple fait de s’inquiéter de cette ingérence était une manifestation de racisme antiasiatique et antichinois. Car Justin Trudeau, quelle que soit la situation, veut prendre la pose du chevalier vertueux en lutte contre l’intolérance.
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Chine
Mais il y a eu un effet boomerang. La tentative d’ingérence est avérée. Reste à évaluer ou à dévoiler son ampleur. Justin Trudeau a été obligé de le reconnaître en nommant un rapporteur spécial pour éclairer la situation.
Mais c’est trop peu, trop tard. Les Canadiens n’en peuvent plus vraiment de lui. Il y a comme un parfum de fin de règne. Ils sont las. D’ici quelques mois, ils seront tout simplement exaspérés.
Justin Trudeau a fait son temps. Il est temps qu’il parte. Il est temps de lui dire adieu. La politique est une affaire de grandes personnes.