TES Canada: un projet d’énergie privée bien branché
D’ex-employés de Power Corporation sont à la tête du projet de TES Canada
Sylvain Larocque et Francis Halin
Le projet controversé «d’hydrogène vert» de TES Canada, qui veut planter ses éoliennes en Mauricie, est porté par des gens bien branchés qui ont réussi à le vendre au ministre de l’Énergie, qui s’était désintéressé un temps de l’hydrogène.
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Au cœur de la Mauricie, le projet de TES Canada projette une usine «d’hydrogène vert», dont une partie de l’énergie doit venir du solaire et de l’éolien.
Alors que des firmes se battent chez nous pour l’énergie, TES Canada a réussi à obtenir un bloc de 150 mégawatts (MW) d’Hydro-Québec et souhaite aller chercher 1000 MW de solaire et d’éolien pour son électrolyseur de 500 MW.
Qui est TES Canada?
Son PDG est un ex-directeur de Power Sustainable (Eric Gauthier), sa gestionnaire de bureau, une ex-adjointe de son président (Josée Migneault) et sa cofondatrice, l’épouse du président délégué du conseil de Power Corporation (France Chrétien Desmarais).

«Power Corporation n’a absolument aucun lien avec ce projet», indique Stéphane Lemay, vice-président de Power au Journal.
Il y a un an, Le Journal rapportait qu’une firme belge proche du clan Desmarais, qui a pour deuxième actionnaire France Chrétien Desmarais, sollicitait Hydro-Québec, le premier ministre François Legault, le ministre de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, pour de l’énergie.

Dix mois plus tard, TES Canada, entreprise cofondée par France Chrétien Desmarais, fille de l’ex-premier ministre Jean Chrétien et femme d’André Desmarais, a annoncé être parvenue à convaincre le gouvernement caquiste.
- Écoutez l'entrevue avec Francis Halin, journaliste économique au JDM à l’émission de Richard Martineau via QUB :
Selon Bloomberg, la firme belge Tree Energy Solutions est actionnaire à 60% de TES Canada et France Chrétien-Desmarais l’est à 40%.
Parmi les membres du conseil d’administration de TES Canada figure Marcel Van Poecke, cofondateur de Tree Energy Solutions et vice-président de Carlyle International Energy Partners, un géant mondial de l’énergie.

Rôle de Jean Chrétien
D’après Radio-Canada, Jean Chrétien serait à l’origine de l’implantation du projet en Mauricie.
«Il m’a appelé chaque semaine depuis un an et demi environ. Il m’a appelé très régulièrement pour voir où on en était rendu. Il a été un peu la courroie de transmission, le lien entre le projet du conseil d’administration de TES Canada et la ville de Shawinigan», a raconté au diffuseur public le maire de Shawinigan, Michel Angers, l’an dernier.
Ces derniers jours, Jean Chrétien a refusé la demande d’entrevue du Journal.
De son côté, Eric Gauthier assure que ce n’est pas la présence de France Chrétien Desmarais et de son père dans le projet qui explique l’acceptation rapide de ce dernier par le gouvernement Legault.
«Hydro-Québec avait une grille [d’analyse] pour chacun des projets qui étaient évalués. Notre projet est celui qui a le plus grand impact au niveau de la décarbonation du Québec», affirme-t-il.
«Une forme de colonialisme»
Au cœur de la MRC de Mékinac, Roman Pokorski, conseiller municipal à Saint-Adelphe, n’aime pas la façon de faire de TES Canada, qui se promènerait de village en village pour cibler des lots. Hydro-Québec aurait fait mieux, selon lui.
«C’est comme une forme de néolibéralisme ou de colonialisme. C’est quasiment une organisation étrangère qui vient implanter son projet là, sans considération aucune envers la population. Leur gros argument, c’est l’argent», dénonce l’homme de la municipalité de 1000 âmes.

«C’est fait à l’envers. La compagnie s’impose avec son modèle, et c’est à nous de nous adapter. Il commence à y avoir des chicanes entre agriculteurs et citoyens», soutient le cosignataire d’une lettre ouverte avec d’autres élus du coin.
«C’est non renouvelable. Quand tu mets du béton à la base d’une éolienne, tu viens carrément de détruire des terres», conclut celui qui est producteur maraîcher depuis 15 ans.
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