Une première pour Pascal Dion

Richard Boutin
Pascal Dion a été au cœur de l’action toute la journée alors que le rideau est tombé, dimanche à Montréal, sur la Coupe du monde de patinage de vitesse courte piste.
Victime d’un accrochage, samedi, qui lui a coûté ses chances de médaille, Dion a rebondi de belle façon en remportant sa première médaille d’or individuelle dans une épreuve olympique. Il a gagné le 1000 m après avoir orchestré un dépassement avec trois tours à franchir pour filer vers la victoire devant les Coréens Kyung Hwan Hong et Tae Sung Kim.
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L’an dernier, il avait gagné le 3000 m du championnat mondial présenté à Montréal, mais il ne s’agit pas d’une épreuve olympique.
«C’est une belle sensation de gagner cette première médaille d’or à la maison, a-t-il exprimé avec son plus beau sourire. C’était frustrant samedi, mais je savais que j’avais de bonnes jambes. J’ai joué dans le trafic et bien géré ma course en économisant mes jambes avant d’attaquer avec trois tours à faire.» Champion du classement de la Coupe du monde l’an dernier sur 1000 m, Dion a un objectif différent cette année.
«J’ai prouvé ma constance l’an dernier en obtenant plusieurs deuxième et troisième positions, a-t-il raconté. Je tirais plusieurs tours en avant, mais mes jambes se fatiguaient. Cette année, je veux miser sur la stratégie pour gagner des courses.»
«J’aime toujours mieux gagner des courses qu’être constant, d’ajouter Dion. La constance m’a permis de terminer premier au classement cumulatif, mais j’aime mieux la victoire au risque de sacrifier le général.»
Pénalisé en finale A, Maxime Laoun a terminé en quatrième place au 1000 m.
Le tout pour le tout
Champions olympiques au 5000 m à Pékin, les Canadiens ne visaient rien d’autre que la plus haute marche du podium à cette première Coupe du monde de la saison même si ça pouvait signifier prendre des risques.
Alors que le Canada occupait le troisième rang avec huit tours à franchir, Dion a dépassé l’Italien par l’extérieur avant de se glisser à l’intérieur pour devancer le Coréen. Il a toutefois chuté tout juste après avoir pris les commandes de la course.
«On ne veut pas courir pour de deuxième, troisième et quatrième places, a-t-il expliqué au sujet de son dépassement audacieux. J’ai réussi un super bon dépassement, mais nous étions en fin de course et la glace a cédé. Aucun de mes coéquipiers n’est fâché.»
«Réussir trois dépassements en huit tours c’est risqué, mais nous sommes encore l’équipe à battre, de poursuivre Dion. La médaille de bronze c’est le fun pour les partisans, mais c’est important de courir pour l’or.»
Médaillés d’argent à Pékin, les Coréens ont savouré leur revanche. Quant aux Italiens qui avaient mérité le bronze aux Jeux, ils ont été pénalisés, ce qui a permis au Canada de monter sur la troisième marche du podium. Le Kazakhstan a mérité l’argent.
Appui de ses coéquipiers
Steven Dubois, Maxime Laoun et Jordan Pierre-Gilles abondaient dans le même sens.
«On aurait pu rester en deuxième ou en troisième place, mais on court pour gagner, a souligné Dubois. Les quatre patineurs, on était prêts à prendre un risque. Nous avions les jambes pour passer et nous aurions dû le faire plus tôt. Les Italiens protégeaient leur deuxième place et ils ralentissaient le rythme. On a suivi ce rythme au lieu d’attaquer plus tôt, mais nous allons apprendre et modifier notre stratégie quand le départ sera plus lent.»
«Pancarte dans le dos»
Laoun a bien illustré la perception des autres nations à l’égard des Canadiens.
«Nous avons été dominants l’an dernier et nous avons une pancarte dans le dos cette année, a-t-il mentionné. Ils nous attendent et nous avons été trop patients même si nous étions bien placés. On reste l’équipe à battre.»
Laoun est solidaire de la décision de Dion. «Notre mot d’ordre, c’est l’or ou la bande, a-t-il imagé. J’aime mieux perdre une médaille que de ne pas tenter un dépassement risqué.»
«On court le relais pour gagner, de renchérir Pierre-Gilles. Nous sommes prêts à prendre des risques.»
«Pascal a fait un gros dépassement et cela aurait été cool si ç’avait fonctionné avec la foule partisane qui nous appuyait.»
SENTIMENT D’INCOMPRÉHENSION POUR KIM BOUTIN
Kim Boutin a connu une fin de semaine difficile et elle ne parvenait pas à expliquer ce qui s’est produit.
«Ça fait mal et je ne veux pas revivre une telle situation, a exprimé la quadruple médaillée olympique la gorge nouée par l’émotion. J’ai tout donné, mais je n’étais pas au niveau. Je me suis investie à 100 % dans le plan d’entraînement. Je ne comprends pas ce qui s’est passé.»
Inscrite aux deux épreuves de 1000 m, Boutin a atteint la finale B, samedi, avant de se retirer pour se concentrer sur le relais 2000 m. dimanche, elle a été écartée en quarts de finale.
«En parlant avec les entraîneurs, ils pensent que j’aurais besoin de repos, a-t-elle indiqué. On va voir ce qu’on va faire avant la prochaine Coupe du monde à Salt Lake City la fin de semaine prochaine.»
Le relais en argent
Malgré son incompréhension, Boutin a pris le départ du relais 3000 m, où le Canada a remporté la médaille d’argent derrière les Néerlandaises, qui étaient trop fortes pour le plateau avec notamment la quadruple médaillée olympique des Jeux de Pékin Suzanne Schulting et la championne du monde en titre sur 500 m, Xandra Velzeboer, pour les mener sur la plus haute marche du podium.
«Nous avons fait une belle course et les filles ont tout donné chacune dans leur rôle, a souligné Boutin. J’aime toujours faire le relais et m’amuser avec les filles. Les Pays-Bas misent sur des patineuses d’expérience. C’est une belle combinaison de miser sur une patineuse de la trempe de Suzanne et une fille comme Xandra qui excelle pour finir les courses.»
Les limites tombent
En plus de sa médaille au relais, Danaé Blais s’est qualifiée pour sa toute première finale en carrière sur 500 m.
Elle a pris le quatrième rang dans une course où Velzeboer a pulvérisé la compétition.
«J’ai appris en fin de semaine qu’en enlevant mes barrières mentales et mes limites, je peux réussir de belles choses, a-t-elle expliqué. Longtemps j’ai été identifiée uniquement comme une spécialiste du 1500 m. Je suis très contente de ma performance et je veux continuer de briser mes limites.»
Vu l’absence des olympiennes Florence Brunelle et Alyson Charles, qui pourraient être de retour en janvier, le Canada a misé sur Renee Steenge et Rikki Doak en finale. Claudia Gagnon a patiné en demi-finale, tout comme au relais mixte. Elle a remporté ses deux premières médailles en Coupe du monde.
STEVEN DUBOIS PROFITE D’UN DÉPART CANON POUR S’IMPOSER
Auteur d’une spectaculaire remontée pour enlever l’argent au 1500 m de samedi, Steven Dubois n’a pas pris le risque de se retrouver en queue de peloton cette fois-ci et il a mené de bout en bout pour décrocher l’or au 500 m de dimanche.
Dans une finale A regroupant trois Canadiens parmi les cinq patineurs, Dubois a connu un départ canon et il n’a jamais laissé de doutes sur ses intentions de devancer le Coréen June Seo Lee et l’Italien Pietro Sighel.
Pour une deuxième journée de suite, Jordan Pierre-Gilles a fini au pied du podium après sa quatrième place au 1000 m de samedi, alors que Mathieu Pelletier à sa première finale A en carrière à l’âge de 16 ans seulement a pris le cinquième rang.
«Mes premiers pas sont plus rapides que le Coréen et je l’ai dépassé dans le premier virage, a expliqué Dubois, qui remporte sa deuxième médaille d’or en carrière en Coupe du monde après celle de Dresden au cours de la saison 2019-2020. J’ai tout donné par la suite afin de créer une bonne distance avec mes poursuivants. J’avais confiance en mon plan de match et je sais ce que je suis capable de faire, mais je savais aussi que j’allais ralentir beaucoup dans les deux derniers tours. C’est un aspect que je dois travailler.
«Malgré mon avance, on ne sait jamais ce qui peut arriver en courte piste, de poursuivre Dubois, qui termine la première Coupe du monde avec deux médailles individuelles et deux au relais (5000 m et 2000 m mixte). Je n’étais pas certain de l’écart qui nous séparait et j’ai resserré mes tracés trop rapidement. Ce fut un week-end parfait.»
Déception et progression
Pierre-Gilles était fâché de conclure au pied du podium pour une deuxième course de suite, mais il était aussi en mesure de voir les aspects positifs de sa performance.
«La quatrième place est la pire position où tu peux finir, a-t-il résumé. Je suis fâché et ce n’est pas là où je voulais terminer, mais j’ai connu une énorme progression au cours de la dernière année. J’apprends beaucoup et des résultats comme en fin de semaine font que j’ai encore plus faim.»
Avec le recul, le patineur de Sherbrooke estime qu’il aurait dû embarquer dans le train nommé Dubois.
«J’aurais dû me servir de Steven comme lapin, a-t-il évoqué, mais je ne me sentais pas trop bien sur mes lames. J’ai néanmoins réussi à garder mon sang-froid. Il n’y a pas de marge d’erreur au 500 m. J’ai fait beaucoup d’apprentissages et j’ai hâte à la prochaine course.»
Incroyable pour les Canadiens
Pierre-Gilles a pleinement savouré la présence de trois Canadiens en finale.
«C’était incroyable de se retrouver les trois en finale, a-t-il souligné. Quand j’ai vu que Steven et Mathieu s’étaient qualifiés dans la première demi-finale, ça m’a donné une motivation de plus pour faire la même chose.»
Pierre-Gilles était particulièrement heureux de voir Pelletier atteindre la finale à sa première Coupe du monde.
«C’est malade. Ce fut plus difficile au 1000 m, mais il a gardé son sang-froid et il a fait des dépassements intelligents au 500 m. Je suis fier de lui.»