Stéphanie Lapointe nous confie avoir eu des réticences à laisser sa fille jouer dans le film «Mlle Bottine»
«Fanny» est en salle depuis le 9 mai.
Alicia Bélanger-Bolduc
On a connu Stéphanie Lapointe quand elle a participé à Star Académie 2004, dont elle a été la grande gagnante. Depuis, elle a délaissé le chant pour l’écriture, et le premier tome de sa série Fanny Cloutier se retrouve au grand écran. Entrevue avec une artiste à part entière qui n’a jamais voulu quitter le monde de la création.
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Stéphanie, quelle a été ta première réaction en voyant que ton livre allait prendre vie sur grand écran?
Je suis dans le milieu depuis que j’ai 18 ans, mais c’est la première fois que je suis aussi fébrile et nerveuse. On a tellement travaillé fort! Ce projet a commencé dans mon appartement, alors que j’étais toute seule avec mon crayon. C’était à un moment où ça n’allait pas très bien: les portes se fermaient devant moi et je vivais une séparation. Je crois que les plus beaux projets naissent de ces moments-là. Je sentais que tout s’écroulait autour de moi, alors qu'aujourd’hui c’est tout le contraire, puisque je vis des instants remplis de joie. J’ai plein de lectrices derrière moi qui ont hâte de voir leur héroïne à l’écran.
De quelle façon as-tu participé au film?
J’ai écrit le scénario complet. On a été chanceux puisque, dès la sortie des livres, on a eu du succès. La proposition d’en faire un long métrage est donc arrivée rapidement. La productrice, Annie Blais, qui avait déjà travaillé sur les films sur Aurélie Laflamme, connaissait le processus. Je ne voulais pas m’imposer, mais je désirais vraiment être partie prenante de l’écriture. Puis, il y a quatre ans, Yan England est arrivé sur le projet. On forme une très belle équipe.

Est-ce que tu as participé au tournage à quelques reprises?
Quand j’ai mis les pieds sur le plateau pour la première fois, j’ai vraiment été impressionnée. C’est tellement beau de voir 200 personnes travailler, chacun avec sa propre expertise, sur une œuvre commune. J’étais en processus d’écriture pour un autre projet, alors, je n’ai pas pu aller dans le Bas-du-Fleuve aussi souvent que je l’aurais voulu, mais j’ai assisté aux scènes d’action. J’étais curieuse de voir comment le réalisateur serait capable de mettre de telles scènes en action. J’ai également participé aux auditions ainsi qu’à la postproduction.
Quelle est la genèse des livres Fanny Cloutier?
Le périple a commencé il y a neuf ans quand j’ai eu le goût d’écrire un livre qui comporterait le même nombre de mots qu’un roman, mais aussi des images, des couleurs et des enveloppes qui se déplient. J’ai toujours rêvé, quand j’étais petite, de tomber sur un produit semblable, mais je n’en ai jamais trouvé. J’avais un projet audacieux en tête. Ç’aurait très bien pu être un échec, mais la mise en marché a été un vrai succès. Je voulais dépeindre l’histoire d’une fille pour qui la mort de sa mère se transforme finalement en un moteur pour grandir et devenir une jeune femme. Au final, on a tous des relations imparfaites avec nos parents.
Tu as aussi scénarisé la série Les cavaliers. Qu’est-ce qui t’intéresse tant dans l’écriture jeunesse?
Mon prochain projet sera une série pour les adultes, mais je ne mets pas pour autant un terme à mes projets pour la jeunesse. J’écrirai toujours pour les adolescents, puisqu’il y a tellement de choses à dire pour ce public. Les jeunes sont dans la vérité et dans l’explosion des sentiments. Je me rappelle cette période comme celle qui a été la plus intense de ma vie. Je n’ai pas terminé d’explorer ces sujets.
Comment a été ton adolescence?
Elle n’a pas été trop difficile. Ç’a été une belle période de ma vie et j’ai eu beaucoup de plaisir. C’est plus le rapport avec ma famille qui a été complexe. Toute notre vie, on pense que les choses fonctionnent d’une telle façon, mais au moment où on est dans l'adolescence, on se remet beaucoup en question. Je dis souvent que c’est une grosse phase de solitude où on ne sait plus vers qui ou quoi se tourner. C’est vraiment de la belle nourriture créative pour les scénaristes!
Tu es toi-même maman de deux filles. Est-ce que le fait d’écrire avec une tête d’adolescente te donne des outils en tant que mère?
Il y a beaucoup d’auteurs dont la trajectoire change quand ils deviennent un parent, puisque ça les ramène soudainement à leur propre enfance. On est maintenant sur la sellette et on ne doit pas se tromper, car on veut tous être de bons parents. Mes personnages aussi sont imparfaits. J’ai écrit ma collection de livres pour ma fille Marguerite, qui avait quatre ans à l’époque, parce que je voulais lui créer le plus beau des livres. J’ai appelé la collection Fanny à cause du film Bach et Bottine - Fanny était mon héroïne préférée! Je ne savais pas que, 10 ans plus tard, Marguerite interpréterait ce rôle à l’écran!
On sait que ce métier peut être ingrat. Est-ce que tu as eu une certaine réserve pour ta fille quand elle a voulu y faire ses premiers pas?
J’étais assez craintive. Le désir est venu d’elle. Elle m’en voulait de la retenir, mais elle n’avait que six ans. Quand il y a eu les auditions pour Mlle Bottine, j’ai senti que c’était le plus beau projet pour elle. De plus, elle était vraiment capable de m’expliquer, avec beaucoup de maturité, pourquoi elle souhaitait le faire. On ne veut pas que notre enfant soit blessé ni qu'il subisse de mauvaises influences, mais j’ai constaté que ce genre de chose peut tout aussi bien arriver à l’école. Et elle a eu la chance d’être jumelée avec Antoine Bertrand, qui en a pris soin d’une manière très attendrissante. Ils vont toujours au cinéma ensemble.

Comment se portent tes deux filles?
Sam a maintenant cinq ans et elle appelle Marguerite sa maman qui, elle, la traite comme sa fille. Je suis complètement impressionnée par leur relation qui est pour l’instant très maternelle. Elles grandiront et vivront leurs propres enjeux, mais pour le moment, je suis vraiment chanceuse de vivre cette belle unicité avec mes enfants.
Tu as aussi débuté très jeune ta carrière dans les médias. Est-ce que tu as déjà pensé à quitter cet univers?
J’ai toujours souhaité au moins travailler dans la création. Au moment où la musique fonctionnait moins bien, j’ai décidé d’arrêter ma tournée parce que je ne voulais pas attendre que ça s’étiole. Je suis allée travailler pour France Beaudoin, qui m’a accueillie à bras ouverts durant une période où j’avais vraiment besoin de gagner ma vie. Elle m’a donné un poste de recherchiste sur la série Banc public, dont j’ai même fini par réaliser des épisodes à la fin. Quand je revenais à la maison le soir, j’écrivais Fanny. Je dis souvent que, si ça n'avait pas été de France, mes livres n’existeraient pas. Je ne serais jamais sortie du milieu, car j’aime trop l’art et les gens. Je suis vraiment heureuse de ne plus être sous les projecteurs - ça n'a jamais été ce qui me motivait. Il n’y a pas juste cette façon-là d’être comblé et c’est ce que je trouve beau dans ce métier.
Est-ce que la réalisation t’intéresse encore?
À force d’écrire, j’ai trop de respect pour ce milieu pour dire que je pourrais en faire demain matin, mais je ne ferme pas la porte parce que ça m'intéresse toujours. Je ne peux pas dire que je ne voudrais plus jamais m’impliquer dans la réalisation, puisque je comprends de plus en plus comment tout fonctionne en voyant les méthodes de travail des autres. J’ai touché à beaucoup de facettes de l’art dans ma carrière et je veux vraiment rester dans ce milieu. Je ne crois pas que je vais aller vendre des fleurs de si tôt! (rires)
Parle-moi de tes autres projets. Tu mentionnais une série plus tôt...
Je suis en période d’écriture d’une série pour adultes. Je ne peux pas en dire davantage, mais on devrait partir en production à l’automne prochain. Je planche aussi sur le deuxième film de Fanny; j’en suis encore au début de la rédaction. Disons qu'on n'aura pas de vacances en famille bien longues, puisque je serai bien occupée.
Les filles de Caleb symphonique
Stéphanie fera aussi partie du projet Les filles de Caleb symphonique qui sera présenté en janvier à Montréal ainsi qu’au printemps 2026 à Québec. Le projet promet de revisiter l’histoire d’amour d’Émilie et Ovila qui a marqué plus d’une génération, avec des chansons originales, accompagnées de danseurs et d’un orchestre symphonique. Stéphanie fera équipe sur scène avec le slammeur Élémo ainsi qu’avec la chanteuse lyrique Lucie Saint-Martin. Le public pourra redécouvrir des moments et des personnages emblématiques de la série tout en mettant en lumière les compositions de Blair Thomson, qui ont fait partie du succès de la série.