Salons de beauté: de petits investisseurs se disent bernés par cette entreprise faussement prospère
Soins Karismä a fait une faillite de près d'un million de dollars

Élizabeth Ménard
De petits investisseurs qui ont perdu des centaines de milliers de dollars estiment avoir été bernés par une jeune entreprise présentée comme étant prospère... alors qu’elle était au bord de la faillite.
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Fondée par Michel Cuero et Yannick Savage, Soins Karismä proposait des salons de beauté par abonnement donnant accès à des soins illimités pour 90$ par mois. Une application révolutionnaire devait maximiser la prise de rendez-vous.


Entre 2022 et 2024, ils ont ouvert cinq salons à Québec, Mascouche, Montréal et Laval et récolté au moins 700 000$ de fonds provenant d’une vingtaine d’investisseurs.
«C’était vraiment bien expliqué, comment c’était rentable», confie Jimena Mazzuca à l’émission J.E, diffusée ce soir, 20h, à TVA.
Le rêve tourne au cauchemar
Cette mère de famille de Terrebonne a emprunté 100 000$, en novembre 2023, pour investir dans cette compagnie. Ce montant devait lui permettre d’ouvrir son propre salon Soins Karismä et lui donner 5% des actions de la société.

«À les entendre parler, ça explosait au Canada et ils se dirigeaient vers les États-Unis», mentionne-t-elle.
Mais son rêve a vite tourné au cauchemar.
«Michel recherchait constamment des investisseurs», confie une ex-actionnaire qui a perdu 200 000$, en août 2023. Nous protégeons son identité parce qu’elle craint une atteinte à sa réputation.
Ces deux femmes ont perdu leur investissement et ignorent encore à ce jour comment ces centaines de milliers de dollars ont été dépensées.
Au bord de la faillite
Pire encore, Soins Karismä savait qu’elle était au bord de la faillite lorsque Jimena Mazzuca a investi 100 000$.
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Mario Dumont, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
C’est du moins ce que laisse croire le contenu d’un courriel, découvert par J.E dans une poursuite déposée contre eux:
«Je regrette de devoir vous informer qu'[...] il manque actuellement la somme de 22 000$ pour couvrir nos engagements pour le payroll des employés de cette semaine. Dans le cas de non-payment (sic) des employés, l'entreprise sera contrainte de faire faillite», écrit Yannick Savage, dans une missive datée du 13 novembre 2023.
C’était quatre jours avant la signature du contrat de Mme Mazzuca.
Faux investissements
En janvier 2024, Michel Cuero est allé jusqu’à prétendre faussement qu’il avait sécurisé des investissements majeurs, dont deux provenant de sociétés d’État, laissant croire qu’il avait le vent dans les voiles.

Un mois plus tard, Soins Karismä a fermé ses portes, juste avant de déclarer faillite pour près d’un million de dollars, laissant derrière elle ses investisseurs ruinés, mais aussi des clientes qui avaient acheté des abonnements ainsi que des employés.
Endettée
Jimena Mazzuca n’a évidemment jamais pu ouvrir son salon. L’application tant attendue n'a jamais vu le jour.
«J’ai été vraiment chanceuse de trouver du travail rapidement. Tout ce que je fais au travail, je le mets pour payer la dette», confie-t-elle, incapable de retenir ses larmes.
Enquête en cours
Notons qu’au moins trois personnes ont porté plainte à la police à la suite de cette mésaventure. Une enquête est en cours.
Joint au téléphone, Michel Cuero a accepté de rencontrer l’équipe de J.E, mais ne s’est finalement jamais présenté au rendez-vous. L'homme de 28 ans, qui s'appelle aussi Michel Angelo et Miguel Culma sur différentes plateformes en ligne, nous a ensuite bloqué l'accès à ses réseaux sociaux.
De son côté, Yannick Savage rejette toute responsabilité sur son ancien partenaire avec qui il était en conflit à l’automne 2023. «Je n’ai jamais discuté de quoi que ce soit avec un investisseur afin de le convaincre d’investir», a-t-il dit par courriel, mentionnant que c’est Michel Cuero qui s’occupait de cet aspect, sans le consulter.
Soins Karismä avait de bons revenus, dit-il, mais encore plus de dépenses. «La majorité des clientes étaient heureuses que l'on puisse offrir ceci [...] Par contre, ce fut très difficile à gérer, car on se faisait “abuser” par un groupe de clientes qui prenait énormément de rendez-vous et qui ne laissait pas de place pour les autres», a-t-il allégué.