Sa Lexus est exportée aux Émirats arabes unis même si elle est déclarée volée
Notre Bureau d'enquête a découvert 148 cas semblables qui sont passés sous le radar des douaniers
Nora T. Lamontagne
Une conductrice ontarienne n’en revient pas que son véhicule Lexus ait pu être exporté à partir du port de Montréal comme si de rien n'était, même s'il avait été déclaré volé une semaine plus tôt.
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«Ça me fâche, j’adorais cette voiture. Il me semble qu’il faudrait au minimum vérifier le numéro de série avant que l’auto soit mise dans le conteneur», s’indigne Eliza Estrella, une résidente du grand Toronto.
Notre Bureau d’enquête l’a contactée la semaine dernière en découvrant que son véhicule faisait partie des 148 à avoir été exportés cette année, même s’ils avaient dûment été déclarés volés au préalable.
- Écoutez le segment judiciaire avec Félix Séguin où il revient sur le sujet via QUB radio :
Pour le retrouver, nous avons comparé les données de l’Agence des services frontaliers sur les 74 000 véhicules qui ont été exportés au port de Montréal en 2023 avec la base de données nationale des véhicules volés.
La Lexus blanche 2022 se trouvait dans les deux registres, ce qui signifie que les voleurs ont eu le culot d'inscrire un numéro de série déclaré volé sur leur déclaration d'exportation, et que les douaniers ont laissé le conteneur quitter le port de Montréal malgré tout.
ET CHEZ VOUS ? Municipalité (nombre de vols)
Nombre de vols à une même adresse
Cette carte des vols de véhicules sur le territoire du Québec couvre l’année 2023, du 1er janvier jusqu’à une date entre le 30 juin et le 12 octobre, selon la ville.
Les données proviennent de la Sûreté du Québec, du service de police de la Ville de Montréal, de la ville de Laval, de la ville de Longueuil, du service de police de la Ville de Gatineau, du service de police de la ville de Québec, du service de police de la ville de Lévis, du Service de police de Sherbrooke, de la ville de Blainville, du service de police de Châteauguay, du service de police de la ville de Mascouche, de la ville de Granby, de la ville de Trois-Rivières, du service de police de la ville de Bromont, de la Régie de police du Lac des Deux-Montagnes, de la Régie de police de Memphrémagog, du service de police de la Ville de Saint-Eustache, du service de police de Saint-Jean-sur-Richelieu, de la ville de Repentigny, de la ville de Mirabel, et d’Équité Association. Certaines ont été obtenues par accès à l’information.
À noter que des municipalités peuvent avoir compté des véhicules comme des motos, des camions ou des bateaux dans leur bilan. Quant aux données de localisation, elles nous ont été transmises sous différentes formes : code postal, coin de rue, rue ou quartier.
Compilation des données : Nora T. Lamontagne et Philippe Langlois, Bureau d’enquête
Direction les Émirats
Mme Estrella raconte que son véhicule lui a d’abord été dérobé un dimanche soir de mars, dans le stationnement d’un cinéma de Scarborough. À 0 h 07, une plainte à la police était officiellement déposée.
Et en l’espace de quelques heures tout au plus, selon la procédure habituelle de la police, la voiture a dû être inscrite dans la base de données canadienne des biens volés, CIPC.
Or, selon les données de l'Agence, la fameuse Lexus blanche a quand même pu être exportée en direction des Émirats arabes unis, le 25 mars dernier, soit six jours après le vol.
«Wow, quelqu’un est en train de conduire mon auto à Dubaï? J’espère qu’il en profite!», s’est exclamée en l’apprenant Eliza Estrella, qui avait fait immatriculer son véhicule au nom de son agence de placement pour infirmières, EZCARE.
Pas infaillibles
Questionnée au sujet de l’exportation des 148 véhicules volés, l’Agence a assuré que ses employés «vérifi[aient] dans la base de données du CIPC si un véhicule [était] déclaré volé».
Mais alors, comment expliquer le départ de la Lexus RX? «Des conteneurs qui sont chargés [sur des navires] par accident, ça peut arriver. On met [parfois] une cible sur le conteneur, et il quitte malgré la demande de retenue», a reconnu en entrevue le superintendant de l’ASFC, Yannick Béland.
Dans les dernières semaines, nous avons révélé plusieurs lacunes de l’ASFC dont profitent les criminels pour exporter un nombre grandissant de véhicules volés au Canada. L'an dernier seulement, 70 000 véhicules ont été volés au pays, mais seulement 1050 ont été interceptés au port de Montréal.
L’Agence a affirmé avoir déjà apporté des changements à sa base de données pour mieux cibler les conteneurs jugés à risque de contenir des véhicules volés à la suite de nos reportages.
- Avec la collaboration de Philippe Langlois
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