Qui va dire aux Ukrainiens que plusieurs les attendent?
Des citoyens de l’Outaouais veulent créer une communauté de familles réfugiées


Olivier Faucher
Des citoyens de l’Outaouais se sont mobilisés pour accueillir plus d’une centaine de réfugiés ukrainiens, mais ils ne savent pas vers qui se tourner pour qu’on entende leur appel.
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« On est à peu près une soixantaine de bénévoles ici prêts à recevoir des gens et à aider pour n’importe quoi. On attend juste après le gouvernement », explique Richard Brisebois, qui habite Wakefield, un village de 700 habitants situé à 30 minutes de Gatineau.
Depuis plusieurs semaines, il passe ses journées à mettre sur pied un réseau d’entraide dans son village, mais aussi dans Chelsea et Cantley, deux municipalités avoisinantes.
M. Brisebois a non seulement mobilisé des familles qui pourraient accueillir un total de 140 Ukrainiens, mais aussi des interprètes de langue ukrainienne, une professeure de français et la Société Saint-Vincent-de-Paul, qui amasse des vêtements et autres articles essentiels.
Prête s’ils arrivent demain
L’objectif de M. Brisebois, c’est de créer une communauté entre les familles ukrainiennes qui s’y installeront.
« On veut qu’ils se sentent vraiment chez eux et qu’ils oublient le plus possible ce qu’ils viennent de vivre. »
Josée Riopel, qui fait partie de ceux qui sont prêts à héberger des Ukrainiens, ne pouvait pas rester les bras croisés devant ce qu’elle voyait sur la guerre.
« On a une grande maison, alors on aurait de la place pour accueillir deux mamans ayant chacune deux enfants. Si quelqu’un arrive demain matin, moi, je suis prête ! »
Bien des membres communiquent souvent avec des familles ukrainiennes fuyant la guerre qui sont intéressées par leur offre d’hébergement. Il n’existe encore aucun processus officiel de jumelage dans leur région.
« Comment je fais pour que les personnes qui les accueillent à l’aéroport leur disent de venir ici ? C’est ce lien-là qui ne se fait pas présentement », explique Mme Riopel.
Pas de garantie
Malgré sa quête d’information qu’elle trouve ardue, elle n’a pas eu la garantie qu’elle allait accueillir une famille.
« Je ne peux pas croire que je n’aurai personne. Il y a une crise du logement épouvantable au Canada », mentionne-t-elle.
Moins de 5000 Ukrainiens fuyant la guerre sont arrivés au Canada, selon des données du gouvernement fédéral publiées par Le Journal la semaine dernière.
Plusieurs suivent les démarches à partir d’autres pays pour venir au Canada, alors qu’environ 20 000 demandes ont été reçues depuis l’entrée en vigueur de l’Autorisation de voyage d’urgence Canada-Ukraine (AVUCU).
La Ville de Montréal comme porte d’entrée
Les Québécois souhaitant accueillir chez eux des Ukrainiens pourront bientôt compter sur un processus officiel de jumelage sur lequel travaillent le Congrès ukrainien canadien et la Ville de Montréal. Il comprendra des mesures de vérification pour s’assurer que chaque jumelage sera sécuritaire.
D’abord, ceux qui souhaitent accueillir les réfugiés ukrainiens ou les aider par d’autres moyens peuvent s’inscrire via un formulaire sur leur site web, car l’organisme dresse actuellement des listes de volontaires.
« La Ville va donner les détails du processus cette semaine », indique au Journal le président du conseil du Québec du Congrès ukrainien canadien, Michael Shwec, qui a reçu plus de 1000 offres d’hébergement à travers le Québec.
Ainsi, c’est surtout à Montréal que se fera l’accueil de réfugiés à court terme, car c’est là qu’existent les meilleures ressources, notamment pour que les Ukrainiens puissent se faire comprendre dans leur langue et pour qu’ils puissent avoir de l’aide psychologique.
Ensuite, les autres régions du Québec pourront mettre la main à la pâte, fait savoir M. Shwec.
« C’est sûr qu’on va être capables et qu’on va vouloir étendre les structures ailleurs », dit-il, en évoquant les nombreux Québécois hors de Montréal qui ont levé la main pour accueillir des Ukrainiens.
Manque d’aide d’Ottawa
M. Shwec aimerait toutefois une meilleure collaboration du fédéral pour faciliter l’accueil et le jumelage des familles, car il n’a pour l’instant aucun moyen d’obtenir des informations sur les Ukrainiens qui s’en viennent au pays avant que ceux-ci n’arrivent en sol canadien.
« De notre côté, on doit savoir qui vient, combien vont s’en venir », dit-il.
L’organisme souhaite également envoyer une délégation du congrès ukrainien à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne afin de diffuser des informations aux réfugiés.
« On veut donner des informations sur le Québec, sur ce qu’on offre, fait savoir M. Shwec. La pauvre femme là-bas qui a laissé son mari avec son enfant dans les bras, elle ne sait pas où elle s’en va. »