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L'article provient de TVA Nouvelles

«On est des esclaves à pourboires»: les bonnes affaires se font rares à travers une marée de commandes Uber Eats

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Photo portrait de Jean-Philippe Guilbault

Jean-Philippe Guilbault

2025-08-16T04:00:00Z
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Pour qu’un livreur d’Uber Eats puisse dégager un revenu satisfaisant, il doit flairer les rares bonnes affaires parmi la marée d’offres de livraisons proposée par l’algorithme.

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Le téléphone cellulaire de Sébastien sonne frénétiquement, alors que les propositions de livraisons défilent les unes après les autres. Le livreur de 42 ans les consulte quelques secondes, puis les refuse les unes après les autres.

Photo JEAN-PHILIPPE GUIBAULT
Photo JEAN-PHILIPPE GUIBAULT

«Regarde ça: 34 kilomètres pour 8$, ça s’en allait à Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier. Ben oui, tsé!» s’esclaffe-t-il, à bord de son auto, stationnée devant la Pyramide de Sainte-Foy.

Le livreur n’est pas difficile, c’est que les bonnes occasions sont rares dans la marée d’offres que lui envoie l’algorithme d’Uber Eats. Sébastien, qui effectue des livraisons pour la plateforme américaine depuis le début de l’année, souligne qu’il a un taux d’acceptation de seulement 12%.

L’application Uber Eats présente aux livreurs les «zones chaudes», où la demande est plus forte.
L’application Uber Eats présente aux livreurs les «zones chaudes», où la demande est plus forte. Photo JEAN-PHILIPPE GUIBAULT

«Ça veut dire que 88% des commandes, je les refuse, note-t-il. Il va toujours [y] avoir une commande intéressante qui va arriver, il faut juste attendre.»

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Cette première commande intéressante, elle survient quelques instants plus tard: on lui offre 7$ pour livrer du poulet à un seul kilomètre d’où nous sommes.

C’est comme ça que Sébastien raconte gagner près de 600$ par semaine en livrant quelques heures par jour, lui qui compte sur un autre «vrai travail», à temps partiel, dans la fonction publique.

«Avec un temps partiel, je ne fais pas assez d’argent», selon ce père de deux enfants en garde partagée avec son ex-conjointe.

Il le fait aussi pour «la liberté totale» offerte par la plateforme.

«C’est très facile et flexible. Tu télécharges [l’application], tu t’inscris [...]. Quelques jours après, ils vérifient tes antécédents, et voilà, tu es parti! explique-t-il. Ça me donne une liberté totale d’en faire quand j’en veux, comment je le veux.»

«Esclaves à pourboires»

Une bonne part de sa rémunération provient des pourboires laissés par les clients. Et encore là, les bonnes affaires se font de plus en plus rares, surtout que la plateforme accorde un délai d’une heure aux clients pour qu’ils ajustent le pourboire laissé aux livreurs.

«Il y a des clients qui, pour s’assurer qu’on livre, font miroiter un pourboire de 5$, mais ils vont l’enlever par la suite, raconte Sébastien. Uber ne devrait pas tolérer ça.»

Le livreur Sébastien s’assure de laisser une preuve au client que sa commande a bien été laissée à la bonne adresse.
Le livreur Sébastien s’assure de laisser une preuve au client que sa commande a bien été laissée à la bonne adresse. Photo JEAN-PHILIPPE GUIBAULT

Selon le livreur, il y a aussi une méconnaissance de leur rémunération par le grand public. La plateforme verse effectivement une somme en fonction du trajet parcouru, mais «la moitié» des revenus de Sébastien provient des pourboires.

«Ce que Uber nous verse par commande, ce n’est pas assez, selon lui. On est des esclaves à pourboires.»

En près de deux heures, nous compléterons sept livraisons pour permettre à Sébastien d’empocher 45$. Un début d’après-midi «moyen», aux dires du travailleur.

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