Née cinq semaines trop tard pour Ottawa, une victime de la thalidomide gagne sa cause en Cour fédérale


Guillaume St-Pierre
OTTAWA | Des victimes de la thalidomide comme Noëlla Hébert, dont la demande d’indemnisation a été rejetée d’emblée par Ottawa à cause de son âge, peuvent garder espoir que justice leur soit un jour rendue.
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La Néo-Brunswickoise est née cinq semaines trop tard pour être éligible au controversé programme d’indemnisation d’Ottawa, qui accumule les ratés depuis 2015.
«Ma preuve la plus crédible, c’est mon corps, lance en entrevue Mme Hébert. D’après moi, ça devrait être assez pour démontrer au gouvernement que je suis une victime de la thalidomide.»
Autre tuile
La semaine dernière, la Cour fédérale a infligé une nouvelle tuile au programme fédéral d’indemnisation des survivants de la thalidomide.
En 2019, après une autre décision de la cour, Ottawa a élargi le programme à toutes victimes de l’infâme pilule nées entre le 3 décembre 1957 et le 21 décembre 1967, mais qui ne détenaient pas de preuve documentaire comme une prescription.
Or, cela a eu pour effet d’exclure des victimes comme Noëlla Hébert, qui est née cinq semaines trop tard pour être éligible aux yeux du fédéral. Ils se sont donc tournés vers les tribunaux pour faire tomber ce critère.
La Cour d’appel leur a donné raison la semaine dernière, en jugeant cette condition «déraisonnable».
Le juge Peter Pamel reproche au fédéral d’avoir établi ce critère «sans aucune information fiable sur la quantité de thalidomide encore disponible ou sur la durée de conservation du médicament à l’époque», écrit-il.
Le juge Pamel a donc ordonné à l’administrateur du programme de ne plus tenir compte du critère d’âge.
Par courriel, Santé Canada a laissé la porte ouverte à la possibilité de porter le jugement en appel.
Répit
Noëlla Hébert ne demande pas la charité. Elle souhaite simplement être indemnisée pour des années de souffrance et les coûts exorbitants qu’entraîne son état de santé, affirme-t-elle.
Les victimes admissibles ont droit à une somme de 250 000 $, une pension d’invalidité annuelle et des ressources médicales adaptées à leurs besoins.
«Tout, toute ma vie, a coûté deux ou trois fois plus cher qu’une personne normale parce que rien n’est accommodé à mes difformités. Rien, pas même une chaise», lance-t-elle au bout du fil.
«En ce moment, j’aurais besoin d’une chaise roulante, une rampe, une toilette, une douche, des vêtements, des chaussures», énumère-t-elle.
Les victimes de la thalidomide ont jusqu’au 3 juin pour présenter une demande d’indemnisation. Ils doivent toutefois s’armer de patience, car les délais de traitement peuvent s’étirer sur des mois, sinon des années.
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