Mort violente d’une fillette à Laval : la mère n’ira pas en prison
Yves Poirier | TVA Nouvelles
La mort d’une fillette de 7 ans que l’on croyait avoir été ébouillantée et battue à mort dans une résidence de la rue Le Boutillier, dans le quartier Chomedey, à Laval a ébranlé le Québec en janvier 2021.
• À lire aussi: Fillette de sept ans décédée à Laval: sa mère ne l’a pas ébouillantée à mort
Deux ans plus tard, le tribunal confirme un tout autre récit des faits. Les brûlures n’ont aucunement été infligées par la mère.
Dans ce contexte, le tribunal a retenu jeudi la suggestion de l’avocat de la défense, soit de ne pas envoyer en prison la femme de 37 ans.
C’est une sentence suspendue qui lui a été imposée. Elle devra se soumettre à une ordonnance de probation avec suivi pour une période de deux ans. La mère de la fillette avait plaidé coupable en février d’avoir omis de fournir les choses nécessaires à l’existence de sa fille qui se trouvait dans le besoin.
La mère qui vivait une situation tendue avec sa fille s’en était remis à une autre membre de la famille qu’elle percevait comme une alliée pour prodiguer des soins.
La mère n’a pas poussé ses vérifications relativement aux blessures de sa fille. Elle a progressivement abdiqué ses responsabilités parentales afin d’éviter les crises et les manifestations de violence de sa fille.
Les autorités avaient reproché au départ à la mère d’avoir agi avec négligence criminelle.
Graves problèmes de comportement
Selon les faits exposés en cour, la fillette avait d’importants troubles de comportement depuis l’âge de cinq ans.
Elle disait notamment qu’elle aimait se faire mal et verbalisait son désir de tuer sa petite sœur alors âgée de trois ans.
La jeune victime est décédée le 3 janvier 2021 à la suite de sévères brûlures qui n’ont pas été soignées en temps opportun.
L’autopsie a révélé des «brûlures très sévères s’étendant sur 70 % de son corps». Ces dernières sont compatibles avec des brûlures causées par l’eau chaude.
Une preuve probante et convaincante révèle que dans les mois précédents le décès de la fillette, la mère a cherché de l’aide extérieure et a entrepris de nombreuses démarches pour aider sa fille à faire face aux problèmes de santé mentale dont elle souffrait malgré son jeune âge.
Les événements mettent en lumière le désarroi de la mère face aux graves problèmes de santé mentale ainsi que la sérieuse emprise exercée par certaines personnes de son entourage qui avaient, à toute fin pratique, pris charge de la situation sans que la mère ne puisse réellement intervenir, a souligné le juge Yvan Poulin. Il indique que la mère souffrait d’un épuisement mental, un effet conjugué de plusieurs facteurs.
Depuis son arrivée au Canada en 2007, la mère était sous l’emprise de la famille élargie de son mari, laquelle avait pris en charge le développement de l’enfant, en limitant au stricte minimum les interactions entre la mère et sa propre fille.
Dans les semaines précédents le décès de la fillette, la mère a elle-même était victime de violence physique de la part de sa fille qui s’en prenait à elle avec l’assentiment d’un membre de la famille.
Lors du décès de la fillette, le père se trouvait à Dubaï pour le travail. Sur ordre de l’oncle de la fillette, la famille n’a pas vraiment collaboré à l’enquête visant à faire la lumière sur les circonstances du décès.
La Couronne réclamait une peine d’incarcération ferme de deux ans moins 1 jour.
Mariage arrangé
La mère avait immigré au Canada en 2007 à la suite d’un mariage arrangé avec un homme afghan 10 ans plus vieux qu’elle.
Elle cohabitait avec six autres membres de la famille de son mari dans la résidence de Laval.
Elle n’était pas traitée sur le même pied que les autres membres de la famille. Ils exerçaient un contrôle sur ses sorties et activités quotidiennes. La mère a deux autres enfants.
La mère a beaucoup de peine et de remords depuis la mort de sa fillette de 7 ans qui sont entièrement sincères, ressentis et compréhensibles, a ajouté le juge.
Intervention de la DPJ et du CLSC
En 2020, la DPJ a fait une visite à domicile et constate que la mère doit s’isoler dans la chambre parce que sa fille l’empêche de socialiser avec des étrangers dans la maison.
La prise en charge avec une intervenante du CLSC est organisée.
En octobre 2020, la travailleuse sociale constate que la fillette est en bris majeur de fonctionnement et qu’il est impossible de la scolariser dans ce contexte.