Fillette de sept ans décédée à Laval: sa mère ne l’a pas ébouillantée à mort

Camille Payant | Journal de Montréal
Une fillette de 7 ans que l’on croyait avoir été ébouillantée et battue à mort à Laval se serait plutôt infligé les blessures qui se sont avérées mortelles lors d’une crise, selon ce qui a été présenté au procès de sa mère.
D’abord accusée de négligence criminelle ayant causé la mort et de voies de fait, la femme de 37 ans a finalement plaidé coupable jeudi matin au palais de justice de Laval à une accusation réduite d’avoir omis de fournir les choses nécessaires à l’existence de sa fille.
La dame originaire d’Asie centrale, qu’on ne peut nommer en raison d’un interdit de publication, évite ainsi un procès devant jury qui devait débuter le mois prochain.
L’affaire avait fait grand bruit en janvier 2021 lors du décès de l’enfant. Or, le résumé des faits remis au tribunal dévoile une version cauchemardesque des mois précédant le drame qui tranche avec ce qui avait été rendu public à l’époque.
Troubles de comportement
Selon les faits exposés en cour, la fillette avait d’importants troubles de comportement depuis l’âge de cinq ans. Elle disait notamment qu’elle aimait se faire mal et verbalisait son désir de tuer sa petite sœur.
«Elle ne peut pas parler ouvertement des problèmes de sa fille avec les membres de sa communauté en raison des jugements que cela pourrait occasionner», peut-on lire au sujet de la mère dans l’exposé conjoint des faits.
Puis l’enfant est devenue de plus en plus anxieuse et agressive en raison du confinement. La fillette a alors commencé à frapper à répétition au visage sa mère, qui n’arrivait pas à la contrôler.
Elle est alors «épuisée et à bout de ressources», a lu la procureure de la Couronne, Me Karine Dalphond, devant l’accusée, le visage rougi par les pleurs.
La situation entre l’accusée et sa fille a continué de se dégrader au point où, à l’automne 2020, la victime refusait tout contact avec sa mère. Celle-ci lui interdisait même de la regarder et lui ordonnait de demeurer enfermée dans sa chambre.
Quelques semaines avant la mort de la fillette, sa mère a été vue dans un magasin, le visage complètement tuméfié et couvert d’ecchymoses, résultat des crises de son enfant.
Au moment où une connaissance tente d’aborder la mère, la fillette «se met à la frapper en lui donnant de forts coups de poing et en lui disant d’arrêter de parler», peut-on lire aussi dans l’exposé conjoint des faits.
Jours fatidiques
Le 31 décembre 2020, l’accusée a vu le chandail de sa fille taché de sang dans le lavabo de sa salle de bain.
«Elle se dit qu’elle est peut-être blessée, mais n’ose pas sortir de sa chambre pour le demander de peur d’engendrer une crise», a-t-on expliqué à la cour.
À trois reprises au cours des 72 heures suivantes, une membre de la famille, qui habitait sous le même toit et qui prenait habituellement soin de la victime, a demandé à l’accusée d’aller à la pharmacie afin d’acheter des bandages et de l’eau saline.
Questionnée à savoir ce qui s’était produit, la femme qui prenait soin de l’enfant a répondu que la victime «s’est fait ça toute seule dans la douche du sous-sol et ajoute qu’il s’agit probablement d’une réaction de peau à l’eau chaude».
L’accusée n’a pas posé plus de questions et n’a fait aucune démarche auprès de sa fille, qu’elle a vue de dos une seule fois.
Elle a revu pour la première fois son enfant le 3 janvier 2021, lorsque l’enfant est amenée au pied de son lit. La petite était alors déjà décédée.
L’accusée a appelé le 911 plusieurs minutes plus tard, après être allée porter sa plus jeune fille chez des connaissances.
La victime est alors emmenée à l’hôpital, où son décès est officiellement constaté. Selon l’autopsie, celui-ci a été causé par des «brûlures très sévères s’étendant sur 70 % de son corps». Ces dernières sont compatibles avec des brûlures causées par l’eau chaude.
La petite sœur de la victime a toutefois révélé, plusieurs mois plus tard, que la femme qui prenait soin de sa sœur «la pinçait et pouvait lui mettre de l’eau chaude sur le corps».
L’enquête policière est toujours en cours, mais aucun autre membre de la famille n’a été accusé dans cette affaire.
La Couronne a demandé une peine d’emprisonnement de deux ans moins un jour, tandis que la défense a plutôt plaidé pour une sentence suspendue assortie de travaux communautaires.
Le juge Yvan Poulin rendra sa sentence en avril prochain.