Le Centre montréalais de propagande chinoise s'en prend au Canada et aux États-Unis
Des propos hargneux publiés régulièrement sur son site web
Sarah-Maude Lefebvre et Yves Levesque
«Monstres anti-Chine», «voleurs étrangers», «traîtres»; le centre communautaire montréalais qui fait de la propagande pro-Chine ne mâche pas ses mots envers ceux qui se mettent en travers du chemin de Beijing.
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Sur son site web, le Centre uni de la communauté chinoise de Montréal émet régulièrement des opinions antiaméricaines, contre l’indépendance de l’île de Taïwan ou encourageant la répression de la minorité ouïgoure.
À propos de la minorité ouïghoure:
- (après l’adoption d’une motion par le Parlement canadien en 2021 sur le génocide dont elle est victime en Chine): « Cette motion est une démarche provocatrice qui déforme sérieusement les faits, attaque de manière malveillante la politique ethnique de la Chine et s'ingère grossièrement dans les affaires intérieures de la Chine. »
À propos des États-Unis:
- « La montée en puissance de la Chine et le succès du “modèle chinois” ont ébranlé l’ordre hégémonique du “modèle américain” établi par l’Occident au cours des deux cents dernières années. Il est donc inévitable que les États-Unis tentent par tous les moyens d’entraver le développement de la Chine dans une tentative d'étouffer le renouveau national de la Chine. »
À propos de l'invasion potentielle de Taïwan par la Chine:
- « Tous les fils et filles de Chine (...) doivent travailler ensemble, avancer dans l'unité, briser résolument tout complot visant « l'indépendance de Taiwan » et créer ensemble un avenir radieux pour le renouveau national. Personne ne devrait sous-estimer la forte détermination, la ferme volonté et la forte capacité du peuple chinois à défendre la souveraineté nationale et l'intégrité territoriale. »
Influence
Plusieurs des textes les plus hargneux sont signés par Shao Liping, le superviseur en chef du centre, également conseiller auprès de la All-China Federation of Returned Overseas Chinese, une agence officielle du gouvernement dirigée par le Front uni. Cette agence a comme mandat de servir les intérêts politiques de Beijing à l’étranger, mais également de surveiller la diaspora chinoise.
La liberté d’expression est protégée par la Charte canadienne des droits et libertés. Mais la ligne entre le droit de parole et l’influence est parfois trouble, souligne l’ONG espagnol de défense des droits de la personne Safeguard Defenders, qui suit de près la politique chinoise.
- Écoutez l'expert en politique international Loïc Tassé à l'émission de Benoit Dutrizac via QUB radio :
«La liberté d'expression est [...] un principe fondamental d'une société démocratique. En ce sens, tenter d’influencer l’opinion d’autrui est à la fois parfaitement humain et légitime [...] Cependant, nous savons que les régimes autoritaires cherchent à abuser de ce droit pour saper les principes mêmes d’une société libre et ouverte. L’ingérence étrangère et les opérations de désinformation sont autant d’exemples de la manière dont ces régimes cherchent à influencer le débat dans une autre société et à établir un discours aligné sur leurs intérêts», explique la porte-parole Laura Harth.
Mercredi, notre Bureau d’enquête révélait que ce centre, qui représente plusieurs groupes de la diaspora chinoise du grand Montréal, est lié de près au Département du travail du Front uni, l’outil d’ingérence politique du Parti communiste chinois.
Il est également intervenu à deux reprises dans la vie politique canadienne au cours des dernières années, à la défense des intérêts et idées de Beijing.
Le Centre n’a pas donné suite à notre demande d’entrevue avec M. Liping.
- À propos des États-Unis :
- « Le développement rapide de la Chine a suscité anxiété et peur dans certains pays occidentaux comme les États-Unis. Certains hommes politiques américains et occidentaux (…) tentent d’isoler la Chine. Ils répandent des rumeurs, calomnient la Chine et utilisent tous les moyens possibles, malgré leur propre incapacité à gérer l’épidémie de COVID-19.» » Sur l’arrestation de la directrice financière de la compagnie chinoise Huawei, Meng Wanzhou, en décembre 2018
- « Le Canada a arrêté Meng Wanzhou (...) principalement à l'instigation des États-Unis. La raison pour laquelle les États-Unis veulent arrêter Meng Wanzhou est que la technologie de Huawei, en particulier la technologie du réseau 5G, se développe trop rapidement (…) et les États-Unis se sentent « menacés ». Le but de la répression américaine contre Huawei est d'entraver (...) le développement technologique de la Chine ; l'alliance Five Eyes dirigée par les États-Unis a calomnié la technologie de réseau 5G de Huawei comme une menace pour sa sécurité nationale sans preuve. » À propos de la guerre russe en Ukraine et la volonté de la Chine d'annexer Taiwan
- « Il est désormais clair que la guerre entre la Russie et l’Ukraine s’est transformée en une guerre entre 40 pays dirigés par les États-Unis contre la Russie (...) Une fois qu'une guerre (sera) éclatée dans le détroit de Taiwan, même si les États-Unis et le Japon se joignent à la guerre, la Chine doit être la gagnante (...) Une fois la guerre éclatée, la Chine n'aura plus aucune issue. Pour atteindre cet objectif, 1,4 milliard de personnes, dont près de 100 millions de membres du Parti communiste chinois, près de 2 millions de militaires actifs et des dizaines de millions de réservistes à la retraite, accompliront sûrement cette tâche sacrée à tout prix. »
- Avec la collaboration de Yves Lévesque
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