Mégachantier du tunnel : chaque 15 minutes d'attente fait perdre 100$ à une entreprise de camionnage


Francis Halin
Un voyage de camion de 15 minutes entre Sainte-Julie et Montréal, via le pont-tunnel, a pris lundi matin presque trois fois plus de temps. Rien de bon pour les consommateurs, qui seront pris pour payer la facture salée de ces retards.
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« Ça a été deux à trois fois plus long pour aller à Montréal, comme je pensais. Pour le retour, ça a été plus vite que prévu », résume Denis Auclair, chauffeur pour le Groupe TYT, qui a fait le voyage matinal avec Le Journal, lundi.
« Chaque 15 minutes rime avec 100 $ de pertes de productivité, plus le client qui ne sera pas servi et la pression que ça vient mettre sur nos employés », se désole son patron, Patrick Turcotte, président du Groupe TYT.
« Les augmentations vont malheureusement être refilées aux clients », ajoute l’homme à la tête de la flotte de 125 camions, dont 40 serpentent la métropole.
En gros, chaque retard rime avec une hausse du coût de transport, qui fait ensuite gonfler le prix des biens.
« C’est une boucle sans fin, le taux d’inflation est déjà très haut », se désole Denis Auclair, qui a 28 ans d’expérience derrière la cravate.
- Écoutez le journaliste sur place Louis-Philippe Messier à QUB radio :
L'enfer s'en vient
Hier, à 6 h 15 du matin, notre camionneur s’était fait à l’idée d’aller se jeter dans la gueule du loup coûte que coûte.
Pour mesurer la congestion, il avait donné rendez-vous au Journal aux Camions Excellence Peterbilt de Sainte-Julie, dans la noirceur d’octobre.
Or, à peine atterri sur l’autoroute 20, le véhicule a dû s’arrêter cinq minutes plus tard, coincé, à la hauteur du boulevard de Mortagne, à Boucherville.
Rendu au pont-tunnel, tout a roulé rondement, à sa grande surprise.
« Ça doit être parce que c’est l’Halloween et que les gens ont pris congé », a laissé tomber notre conducteur.
Voies réservées
Arrivé sur l’île, à 6 h 45, c’est ensuite le labyrinthe de détours qui a enflé l’attente d’un autre bon 10 minutes sur la rue Notre-Dame, avant d’atteindre la cour de conteneurs réfrigérés Hunt.
« Les voies réservées pour les autobus près du port nous en enlèvent pour circuler. Ma crainte, c’est que ça reste permanent, après la fin des travaux », a soupiré Denis, en voyant la congestion en accordéon s’intensifier encore.
À plusieurs reprises, il a pointé du doigt des voitures avec une seule personne à bord, et même des camions dans les voies réservées aux autobus et au covoiturage.
Au total, il aura donc fallu 40 minutes pour effectuer ce trajet, alors qu’en temps normal l’on peut facilement s’en tirer en 15 maigrichonnes minutes.
Heureusement, sur le chemin du retour, la congestion a à peine grugé le chronomètre de cinq minutes, loin du cauchemar anticipé.
Pour Patrick Turcotte, numéro un du Groupe TYT, il est encore temps de se serrer les coudes pour éviter la catastrophe annoncée.
« On est ouvert à des solutions, comme l’augmentation du poids. On essaye d’amener certaines pistes. On cherche des idées créatives », a-t-il conclu.
- Chaque jour, plus de 120 000 véhicules passent par le tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, dont 15 600 camions, selon le gouvernement du Québec.