L’or après avoir vaincu le cancer: Maxence Parrot écrit un scénario de rêve
Son compatriote Mark McMorris a aussi sa place sur le podium en slopestyle

Richard Boutin
ZHANGJIAKOU | C’est la médaille du courage et de la persévérance. Le triomphe d’un athlète qui, après avoir combattu le cancer, n’a pris aucune journée de congé en trois ans pour atteindre son objectif ultime, l’or olympique.
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Dans un scénario digne d’Hollywood, Maxence Parrot a grimpé sur la première marche du podium, lundi, à l’épreuve de slopestyle. Il y a à peine trois ans, il était couché dans un lit d’hôpital après s’être fait diagnostiquer un lymphome de Hodgkin.
Une descente 🏂 en OR 🥇
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Après l’argent 🥈 à PyeongChang 2018, Max Parrot est CHAMPION OLYMPIQUE 🙌🤩 à #Beijing2022
Regardez @MaxParrot glisser vers la conquête du titre olympique ⤵️
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Les Jeux de Pékin avaient déjà une saveur particulière pour lui en raison de son retour au plus grand rendez-vous planétaire après avoir subi 12 traitements de chimiothérapie en six mois à l’hiver 2018. Ce titre olympique vient couronner le tout.

« Gagner l’or, après tout ce que j’ai vécu, signifie vraiment beaucoup pour moi », a exprimé le planchiste de Bromont aux journalistes de la presse écrite dans la zone mixte, après une tournée de toutes les télévisions internationales qui voulaient connaître son incroyable histoire.

« Il y a trois ans exactement, j’étais couché dans un lit d’hôpital sans muscles, sans énergie et sans cardio, a-t-il ajouté. Trois ans plus tard, je suis sur la plus haute marche du podium aux Jeux olympiques. Ça veut dire beaucoup et c’est la preuve que tout est possible dans la vie. Depuis trois ans, je n’ai pas pris une journée de congé et je récolte aujourd’hui les fruits de mes efforts. »

Meilleure de sa vie
Dans une deuxième descente à couper le souffle, lors de laquelle il a réussi son triple tire-bouchon 1620 degrés, Parrot a obtenu 90,06 points pour se hisser au sommet. Sa prestation a tenu jusqu’à la fin, permettant au Canada de mettre la main sur son premier écu d’or en Chine.
🥇 Un moment en OR🥇 @MaxParrot devient le premier champion olympique du Canada 🇨🇦 en snowboard slopestyle à #Beijing2022 👏 pic.twitter.com/9nt6A77eDe
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« Je suis vraiment fier de moi, de ma descente qui fut la meilleure de toute ma carrière, a raconté Parrot. Je n’ai jamais fait une descente aussi difficile et aussi parfaite. »

Vedette dans son pays et premier après les qualifications, le Chinois Su Yiming a mis le grappin sur l’argent. Le Canadien Mark McMorris a complété le podium en empochant la troisième médaille olympique de sa carrière.

La médaille manquante
Depuis son retour de la Corée du Sud, Parrot avait un objectif bien précis en tête.
« Après ma médaille d’argent en 2018, j’avais dit à tout le monde que je voulais gagner l’or à Pékin parce que c’est la seule médaille qui manquait à mon palmarès. Je m’étais mis beaucoup de pression sur les épaules et j’ai été capable de livrer la marchandise. »
- Écoutez l'entrevue de Mario Dumont avec Yves Mailhot, entraîneur de Max Parrot sur QUB Radio:
S’il a toujours gardé à l’esprit l’objectif de remonter sur sa planche, l’athlète de 27 ans n’avait pas la tête à Pékin au plus fort de ses traitements.
« Je n’ai jamais pensé que je ne serais pas de retour sur ma planche parce que je n’ai jamais voulu donner une chance au cancer, a-t-il souligné. Ce n’était pas une option de ne pas retrouver ma passion. C’était aussi une motivation. Cependant, c’était difficile à certains moments de me rendre au lendemain, et c’est clair que je ne pensais pas aux Jeux olympiques dans ces circonstances. »

Bonne Stratégie
Parrot a décidé de limiter son nombre de compétitions avant les Jeux afin de se concentrer sur son entraînement.
« Ma stratégie aurait pu ne pas fonctionner, mais on ne doit pas toujours suivre le courant de pensée dans la vie. On doit aller au-delà. Au cours des 10 dernières années, je faisais 10 à 15 compétitions annuellement et je n’avais pas le temps d’apprendre de nouvelles choses parce que je devais toujours performer. »
« Parce que j’étais déjà qualifié, j’ai décidé de tenter le tout pour le tout avec l’objectif d’aller gagner la seule médaille qu’il me manquait. J’ai maintenant la preuve que la stratégie a fonctionné. »
Un homme et un athlète transformé

La vie de Maxence Parrot a basculé en décembre 2018 lorsqu’il a reçu un diagnostic pour un lymphome de Hodgkin.
Sous le choc après avoir encaissé la nouvelle, le Québécois souhaitait poursuivre sa saison avec les X Games qui approchaient à grands pas et retarder les traitements, mais son médecin lui a fait réaliser l’urgence de s’attaquer rapidement au mal.
C’est après une visite chez son médecin de famille pour une bosse au cou à son retour d’une Coupe du monde en Chine au début décembre que Parrot a été confronté à la perspective qu’il souffre d’un cancer. Le verdict est officiellement tombé le 21 décembre.
Le 17 janvier, il annonçait publiquement qu’il souffrait d’un lymphome de Hodkin. Il a entrepris une série de 20 traitements de chimiothérapie en six semaines qui ont pris fin en juin.
De plus en plus malade entre chaque traitement, Parrot souhaitait arrêter. L’annonce que les X Games allaient être repoussés en août en Norvège lui a servi de motivation.
En juin, il complétait ses 12 traitements et reprenait l’entraînement dans l’espoir de se rendre à Oslo.

Retour triomphal
Il a effectué un retour triomphal en remportant l’or au big air, seulement deux mois après avoir complété sa chimiothérapie.
Sa bataille, ses premiers traitements et son retour aux X Games ont été filmés et le documentaire Max le combat d’une vie a été lancé quelques semaines avant son départ pour les Jeux olympiques. Il est disponible aumaxparrot.com. Le planchiste espère recueillir 100 000 $ qui seront versés à la Société de leucémie et de lymphome du Canada, dont il est le porte-parole.
Des honneurs
Sa persévérance et sa résilience ont été récompensées par l’attribution du prix Laureus en 2021. Cette prestigieuse récompense lancée par Nelson Mandela a été décernée à Tiger Woods, Roger Federer et Rafael Nadal, notamment, dans le passé.
Parrot a aussi reçu la médaille de l’Assemblée nationale.

Le champion olympique soutient que la maladie l’a profondément changé.
« Je ne suis plus le même homme et le même athlète. Je pensais que tout était acquis alors que maintenant j’apprécie chaque moment. Je souris plus et je vois la vie de manière positive. Je me mets moins de pression, ce qui me rend encore meilleur. »
« Amplement mérité »
Son coéquipier Mark McMorris lui a rendu un vibrant hommage, lundi.
« Ça fait trois cycles olympiques qu’on fait ensemble et il est définitivement un grand planchiste. Je suis super fier de partager le podium avec lui. Comme moi, il est passé au travers de plusieurs épreuves et il mérite pleinement sa médaille d’or. »
Une page d'histoire pour McMorris

Mark McMorris s’est assuré de laisser sa marque dans l’histoire du surf des neiges en montant sur le podium lors de trois Jeux consécutifs à l’épreuve du slopestyle.
McMorris a remporté le bronze, comme ça a été le cas à Sotchi, en 2014, lorsque la discipline a fait ses débuts dans le giron olympique, et en 2018, à Pyeongchang.
#PyeongChang2018 ➡️ #Beijing2022@markmcmorris et @MaxParrot sont devenus des habitués du podium olympique de slopestyle! 🏂 #ÉquipeCanada pic.twitter.com/HIr55hwU3y
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« C’est un honneur d’être encore au sommet de mon sport à mon âge [28 ans] et de continuer de progresser, a souligné le planchiste de la Saskatchewan. J’avais fait ma meilleure descente en carrière aux X Games il y a deux semaines et j’ai répété la même chose ici. C’est vraiment spécial et je suis très reconnaissant pour ma longévité. »
In 2017, Mark McMorris crashed in Whistler and was left close to death in the snow with multiple injuries.
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He came back to win a #Snowboard Slopestyle bronze at PyeongChang 2018.
Today he added another Olympic medal to his collection, taking the #Bronze! 👊 pic.twitter.com/wwqbawn80P
La mort de près
À l’instar de Maxence Parrot, qui a obtenu l’or lundi, McMorris a traversé des épreuves au cours des dernières années, dont la plus sérieuse est survenue en mars 2017, où l’on a même craint pour sa vie.
Un accident lors d’une sortie hors-piste en planche lui avait valu des fractures à la mâchoire, au bras gauche, au bassin, aux côtes, une rupture de la rate et un affaissement d’un poumon.
« Je suis très heureux de pouvoir continuer de compétitionner à ce niveau après tout ce que j’ai vécu. Je n’ai pas subi d’opération depuis un an, mais on m’a enlevé des vis et des plaques dans un fémur et la mâchoire. J’espère continuer jusqu’aux Jeux de 2026. »

Pointage surprenant
Sur le podium, McMorris et Parrot étaient accompagnés du Chinois Su Yiming, 17 ans.
Au quatrième rang après deux descentes, McMorris a très bien fait à son dernier essai, ce qui lui a permis de grimper au classement. Il pensait toutefois mériter un meilleur sort que les 88,53 points que les juges lui ont accordés.
« C’est clair que je m’attendais à un meilleur score. Nous avons tous les trois fait une descente très similaire. Je pensais me retrouver au premier ou au deuxième rang, mais je me suis retrouvé en troisième place. C’est correct. Nous pratiquons un sport jugé et je n’envie pas les juges. Parfois, à l’arrivée, on ne réalise pas qu’on a eu des petits problèmes. Il faudra que je revoie la reprise. »
Une déception pour Toutant

Champion olympique en titre au big air, Sébastien Toutant voulait ajouter une médaille en slopestyle à son palmarès, mais il n’a pas été en mesure de réussir l’atterrissage du dernier saut de sa première descente, lundi.
Le planchiste a chuté à sa deuxième tentative. À son dernier essai, tout allait bien jusqu’à ce qu’il rate la conclusion de son dernier saut. Toutant a terminé en neuvième position.
« Ça pourrait aller mieux, et c’est clair que c’est une déception, a-t-il mentionné. J’ai super bien fait à l’entraînement et je me sentais bien dans le haut du parcours. Nous avons eu une bonne finale et c’est bon pour notre sport. »

Toutant croit qu’il avait les manœuvres nécessaires pour se hisser sur le podium.
« Si j’avais atterri mon dernier saut à ma première descente, j’aurais eu de bonnes chances d’être sur le podium avec les gars, a-t-il affirmé. J’avais obtenu de bons pointages à tous mes trucs, mais on ne connaîtra jamais mon score final. Je suis content pour Max [Parrot] et Mark [McMorris] et j’aurais aimé être sur le podium avec eux. »
Difficile aux Jeux
L’athlète de 29 ans avait également chuté en 2018 à Pyeongchang, terminant 11e à cette épreuve.
« On dirait qu’il se passe toujours quelque chose à chaque participation aux Jeux olympiques, a-t-il dit. Je ne suis pas capable d’atterrir ma descente en finale. Je voulais gagner une médaille au slopestyle. Le niveau est tellement élevé que tu y vas pour la plus grosse descente possible. Parfois, ça marche ; parfois, ça ne fonctionne pas. »
« Ce n’est pas la première fois que je chute, mais je vais bien, malgré la déception, a ajouté Toutant. J’ai vécu une autre belle expérience et je vais grandir de ces moments-là. »
Une autre chance
Il souhaite se reprendre à l’épreuve du big air.
« J’ai quelques jours pour décompresser et oublier ma déception. Contrairement à d’autres athlètes qui n’ont qu’une chance de médaille, j’aurai une deuxième opportunité de monter sur le podium. J’utilise ça comme motivation. »
Les qualifications, tant chez les hommes que chez les femmes, auront lieu lundi, et les finales se dérouleront dès le lendemain.
Su Yiming, un gamin qui a surpassé son idole canadienne
Mark McMorris et le Chinois Su Yiming ont partagé un beau moment sur le podium lundi.
Parmi les meilleurs planchistes de la planète depuis une décennie, le Canadien est un habitué de la Chine, qu’il fréquente depuis 10 ans. En plus des compétitions, l’athlète de Regina était invité à l’occasion pour faire la promotion du snowboard.
« Je voyais cet enfant tout petit qui était toujours dans les environs, raconte McMorris. Depuis cet automne, il est devenu un homme et un planchiste vraiment bon. C’est un honneur de partager le podium avec lui et d’avoir pu l’inspirer. Moi aussi quand j’ai débuté, j’avais des idoles. Je sais exactement ce qu’il ressent. »
« Il a profité de l’occasion de s’illustrer à la maison, de poursuivre le médaillé de bronze au sujet de l’ado de 17 ans, qui a gagné l’argent. Il avait beaucoup de pression de compétitionner chez lui et il a livré la marchandise. ll possède un très beau futur. »
Des amis
Su Yiming partageait le plaisir du vétéran quand il s’est présenté à la rencontre de presse des médaillés, applaudis par les nombreux journalistes chinois qui remplissaient la salle.
« C’est incroyable de me retrouver sur le podium avec mon idole et de remporter une médaille dans ma région natale, a exprimé le jeune homme, qui souhaite devenir acteur. On est maintenant des amis. On s’encourage et on se motive. C’est ici à cette station de ski que tout a commencé et j’avais l’objectif de participer aux Jeux olympiques dans mon pays sur le même parcours où tout a débuté et où j’ai grandi. »
Amoureux des animaux, McMorris arborait un panda sur sa planche.
« Quand j’ai opté pour le panda, je ne savais pas que c’était la mascotte des Jeux de Pékin. Ça convient parfaitement. »