Malgré la poursuite de 100 000$ contre elle, la présumée victime du cardinal Marc Ouellet persiste et signe
Elle a lancé une campagne de sociofinancement puisqu’elle fait face à une poursuite

Martin Lavoie
La présumée victime du cardinal Marc Ouellet ne baisse pas les bras malgré la poursuite de 100 000 $ pour diffamation dont elle fait l’objet, et compte mener à terme son combat, a-t-elle confié aujourd'hui.
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« Je survis. Je vis au jour le jour. Avec le processus qui perdure, je fais des cauchemars, de l’anxiété », a lancé celle qui est appelée Mme F, pour protéger son anonymat, lors d’une entrevue conjointe à TVA Nouvelles et au Journal.
Le 16 août, 101 présumées victimes – elles sont 134 depuis le 1er décembre – ont lancé une action collective contre une centaine de prêtres et de personnes du diocèse de Québec pour des gestes allégués commis entre 1942 et 2018.

Du nombre, Mme F reproche au cardinal Ouellet des « attouchements non sollicités, des massages d’épaules, une main qui descend dans le dos jusqu’au début des fesses et des commentaires déplacés ».
Ces éléments allégués auraient été commis à quatre moments, de 2008 à 2010, alors qu’elle était stagiaire au diocèse.
Le 19 août, le cardinal niait en bloc les accusations. Finalement, le 13 décembre, il déposait une plainte de 100 000 $ en diffamation contre Mme F.
Son Parcours
« J’avais 23 ans, j’étais stagiaire, je commençais dans le milieu. C’était difficile de mentionner ces gestes. J’étais face à un homme qui était une figure importante dans l’organisation. J’en avais parlé autour de moi et je sentais que ça rendait les gens mal à l’aise. On virait souvent cela en blague. J’ai gardé ça pendant longtemps », relate-t-elle aujourd’hui.
La femme a finalement déposé une plainte, il y a deux ans, à un comité du diocèse de Québec, qui lui a demandé d’écrire au pape.
La défense du cardinal Ouellet a mis en opposition la plainte de Mme F au pape, où il n’est pas question d’agression sexuelle, et sa déclaration dans le recours collectif, où cette fois le terme d’agression est utilisé.
« Quand je me suis adressée au pape, à la demande du comité-conseil, je n’étais pas nécessairement capable de nommer ce que j’avais vécu. J’espérais que quelqu’un de professionnel enquête et fasse la lumière. Malheureusement, ça n’a pas été le cas. C’est davantage lorsque je me suis tournée vers les avocats, vers des spécialistes, que j’ai pu comprendre la nature des gestes », plaide-t-elle.
Face au comité elle s’est sentie « dans le vide, sans réponse à mes questions, ne sachant pas trop ce qui allait arriver. C’était un peu du nouveau pour eux de ce que je comprenais. Je me présentais là en état de recherche, de questionnement. Si c’était à refaire, je ne m’adresserais pas au comité. »
Ses démarches ont aussi eu des répercussions dans son milieu de travail. « J’ai reçu des lettres anonymes. J’ai toujours un sentiment d’insécurité, d’avoir des répercussions. »
Sollicitation publique
La semaine dernière, Mme F a lancé une campagne de sociofinancement sur GoFundMe.
Derrière la nécessité d’amasser les fonds pour acquitter d’éventuels dommages se cache un autre objectif.
« C’est de rendre visible l’élan de solidarité derrière moi. C’est une façon de m’appuyer pour les gens qui ne peuvent pas s’exprimer publiquement ou pour mes proches qui ne veulent pas dévoiler mon identité », précise Mme F.
Extraits de la poursuite de Marc Ouellet
« Les propos de Mme F (...) ont profondément affecté M. Ouellet (...) Ils laisseront une trace indélébile sur son honneur, sa réputation et sa dignité. »
« Présenter des gestes allégués qui ne sont pas de la nature d’une agression sexuelle parmi d’autres pouvant revêtir une telle gravité est diffamatoire en soi et constitue un geste fautif. Considérant les impacts que de telles allégations peuvent avoir dans la vie d’une personne visée, cela commande la plus grande prudence, même dans le cadre d’une procédure judiciaire. »
— Me Dominique Ménard, avocate de Marc Ouellet, concernant le fait que ce dernier se retrouve cité dans un recours collectif dans lequel certains gestes allégués sont des actes de pédophilie
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