Magalie Lépine-Blondeau a dû apprendre un monologue de 32 minutes pour son rôle de France Charbonneau dans «L'Appel»

Bruno Lapointe
Magalie Lépine-Blondeau a beau ne pas avoir suivi de manière assidue la saga judiciaire entourant l’arrestation – puis la condamnation – de Maurice «Mom» Boucher à la fin des années 1990, elle en garde tout de même un souvenir vif. Et terrifiant. «La peur était palpable. Ça avait créé une vraie commotion, partout au Québec», se remémore la comédienne qui incarne la procureure France Charbonneau dans la série L’Appel.
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La guerre des motards a fait énormément couler d’encre à la fin du dernier millénaire, ses divers rebondissements faisant systématiquement la manchette des journaux. Un de ceux-ci a marqué les esprits, peut-être plus que les autres: le meurtre de deux gardiens de prison, abattus à la demande de Maurice «Mom» Boucher, figure influente des Hells Angels.

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Le prolifique auteur Luc Dionne (District 31, Omerta) trempe aujourd’hui sa plume dans cette période charnière de l’histoire judiciaire du Québec pour L’Appel, une série produite par Fabienne Larouche et Michel Trudel. Les six épisodes, tous réalisés par Julie Perreault, sont déposés sur illico+ à raison de deux par semaine jusqu’au 6 février.
Dans les coulisses
Mais attention, L’Appel fraie à contre-courant de la tendance actuelle en se refusant à braquer les projecteurs sur les membres du crime organisé. Si les studios américains ont une propension à consacrer d’importantes vitrines aux criminels de renom (Ryan Murphy a, entre autres, été pointé du doigt pour des séries entières vouées à Jeffrey Dahmer ou encore aux frères Menendez), le projet de Luc Dionne s’intéresse en majeure partie aux coulisses de l’enquête et du procès ayant mené à l’incarcération de Maurice «Mom» Boucher, condamné à la prison à vie, en 2002.

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Et c’est précisément cet angle qui a séduit Magalie Lépine-Blondeau, acceptant du coup d’interpréter le rôle de la procureure France Charbonneau.
«La glorification des criminels ou de la violence, ça ne m’intéresse pas vraiment. J’ai beau être une grande fan de true crime, je préfère qu’on raconte ces histoires-là du point de vue des victimes ou de la justice. Et ça, c’était unanime dans l’équipe. Tout le monde – autant pour Fabienne Larouche, Luc Dionne, Julie Perreault et toute la distribution – tenait à aborder ce chapitre de notre histoire sans célébrer Mom Boucher», raconte Magalie Lépine-Blondeau en entretien au Journal.
«D’ailleurs, dans la série, France Charbonneau réfère toujours à lui en l’appelant Maurice Boucher. On voulait éviter cette familiarité qui vient avec l’utilisation de son surnom, surtout que de l’appeler «Mom» – qui veut quand même dire «maman» – évoque une certaine appartenance et peut venir adoucir le personnage», poursuit-elle.
Vincent Graton «terrifiant»
Le personnage de Maurice Boucher sera tout de même bel et bien présent dans la série, empruntant ici les traits de Vincent Graton. Et Magalie Lépine-Blondeau se souvient d’une première rencontre «vraiment troublante» sur le plateau tant la ressemblance entre le comédien et le criminel est saisissante.

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«Vincent a beau être tellement affable – il est d’une gentillesse inouïe –, il est absolument terrifiant en Maurice Boucher. On a joué beaucoup ensemble, mais on n’a jamais échangé de répliques. En fait, il ne parle pas beaucoup dans toute la série; et c’est très menaçant de le voir à l’écran, un peu comme un spectre. On le craint et ça, ça crée énormément de suspense», explique la comédienne.
Outre les personnages de France Charbonneau et Maurice «Mom» Boucher, la série L’Appel compte sur une combinaison de personnages véridiques et fictifs. Pier-Luc Funk, par exemple, prête ses traits au délateur bien réel Stéphane «Godasse» Gagné. En revanche, l’enquêteur de l’escouade Carcajou Sylvain Provencher, qu’incarne Patrice Robitaille, est bien fictif, créé en amalgamant plusieurs policiers différents de l’époque.
- Les deux premiers épisodes de L’Appel seront disponibles sur illico+ à compter du 23 janvier.
«C’est une femme absolument redoutable»
Magalie Lépine-Blondeau a vu en L’Appel un «défi extraordinaire» comme elle n’en revivra «probablement jamais» dans sa carrière.
Incarner une procureure n’est pas une mince tâche, surtout quand l’intrigue desservie s’articule autour de faits véridiques. Ça, la comédienne l’a réalisé quand est venu le temps de tourner les scènes de plaidoirie sur le plateau de L’Appel, dans lequel elle prête ses traits au personnage de France Charbonneau.
«Pour des raisons légales et juridiques, on devait s’en tenir au verbatim de ce qui a réellement été dit au procès. Et ça, ça veut dire que j’avais un monologue de 32 minutes à livrer! Au théâtre, on aurait eu des semaines de répétition. Mais à la télévision, c’est très différent. Alors je me suis lancée dans le vide en arrivant sur le plateau à sept heures du matin», se souvient Magalie Lépine-Blondeau en riant.
«Mais c’est ça qui est excitant. Luc Dionne, c’est exactement ce qu’il aime faire: écrire des personnages et des scènes qui permettent aux acteurs de réaliser des prouesses techniques», ajoute-t-elle.
«Ce n’est pas un Bye Bye»
Précision importante, toutefois: Magalie Lépine-Blondeau évoque France Charbonneau davantage qu’elle ne la personnifie. Certes, elle en emprunte le look et la tessiture vocale, mais la comédienne a choisi de s’appuyer davantage sur les traits de caractère de la procureure pour lui donner vie à l’écran.
«On s’est rencontrées en amont, mais on ne s’est pas revues depuis le début du tournage. Il fallait que je me détache un peu de la réalité, que je prenne un certain recul. L’Appel, ce n’est pas un Bye Bye; on n’est pas dans l’imitation. Alors, [la réalisatrice] Julie Perreault et moi, on a surtout travaillé son débit et son aplomb. On s’est rendu compte que c’est là que le personnage apparaissait réellement», précise-t-elle.

Elle espère ainsi rendre hommage à celle qui a su faire sa place dans un monde dominé par les hommes... et peut-être même, qui sait, rectifier certains faits qui se seraient embrouillés dans notre mémoire collective.
«France, c'est une femme que j’admire énormément. À cette époque, tout le monde avait peur des Hells Angels. Mais France Charbonneau, elle, elle pointait Maurice «Mom» Boucher du doigt, elle le confrontait, elle regardait tout le monde dans les yeux. C’est une femme qui est absolument redoutable. Et il ne faut pas oublier que c’est grâce à elle qu’il a été arrêté et incarcéré. On pense qu’on connaît bien l’histoire, mais on va la découvrir de manière haletante, comme un bon feuilleton», avance Magalie Lépine-Blondeau.