Les parents veulent être écoresponsables, mais ont besoin d’un coup de pouce


Maude Carmel
BILLET — Je suis maman depuis maintenant un an et je réalise que mener un mode de vie écoresponsable avec un enfant n’est pas de tout repos. Ça demande du temps, de l’organisation et beaucoup de volonté, mais surtout: du soutien.
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Enceinte, je m’imaginais passer mon congé de maternité à faire mon épicerie à vélo avec mon bébé cramponné d’une quelconque façon derrière moi.
Ça, c’était avant de réaliser qu’il est impossible d’y installer un nourrisson qui ne tient pas assis et qu’il est même déconseillé de faire du vélo avec un enfant de moins d’un an, puisque le casque n’est pas assez sécuritaire avant cet âge.
Enceinte, je m’imaginais aller dîner avec mes amies à Montréal un jour de semaine, accompagnée de petit poucet en transport en commun à partir de ma banlieue.
Ça, c’était avant de constater que ma poussette ne passait pas dans la rangée du bus voyageur et que ce n’était pas toutes les stations de métro qui avaient un ascenseur.
Enceinte, je m’imaginais ne faire que des collations maison pour mon garçon et ne jamais acheter d’items à emballage unique.
Ça, c’était avant de me rendre à l’évidence que lorsqu’on est pressé et que bébé ne coopère pas, les compotes en sachets vendues en épicerie qui se gardent sous vide des mois dans le sac à couches sont particulièrement commodes.
Donner la chance au coureur
Je célèbre toutefois une victoire importante depuis le début de ma parentalité: j’ai réussi à trouver une garderie à distance à pied de chez moi, nous permettant de conserver notre promesse de n’avoir qu’une seule voiture en banlieue.
Si j’avais dû me résoudre à envoyer mon enfant dans un milieu de garde, genre, à Saint-Hubert, notre désir de rester écoresponsable en périphérie de Montréal aurait été drôlement compliqué.
Comment encourager les familles à diminuer leur dépendance à l’automobile si les seules garderies disponibles se trouvent à des kilomètres de chez elles?

Comment faire la promotion du transport collectif s’il est encore difficilement accessible aux personnes à mobilité réduite ainsi qu’aux parents dont le bébé est encore trop jeune pour tenir assis dans une poussette parapluie?
Plus largement, comment demander à des parents débordés de fabriquer les jouets de leurs enfants au lieu de les acheter sur Amazon, de cuisiner des compotes avec les fraises du jardin et de se rendre à la garderie en tricycle fisher price quand ils ont à peine le temps de dormir?
Les gouvernements devraient, une fois pour toutes, prendre au sérieux cette grande et importante mission qu’est d’encourager le mode de vie climato-sympathique auprès de ses contribuables... qu’ils soient parents ou pas.
Une solution en son temps
Certes, on ne peut pas tout régler. Je doute qu’il y ait une solution simple et sécuritaire pour faire du vélo avec un bébé naissant. D’autant plus qu’aucune physiothérapie périnéale ne recommandera d’enfourcher un engin à deux roues après avoir expulsé un enfant de ses entrailles, même si c’est juste pour aller chercher des couches pour adultes au Jean-Coutu.
Mais dans notre société individualiste où chaque cellule familiale habite un espace isolé (en opposition à l’époque où un village entier aidait à maintenir les enfants en vie), il doit y avoir une autre option que de se fendre en quatre quotidiennement pour appliquer la routine des rejetons après une journée de huit heures de travail, déplacements non inclus.
Imaginez si, par exemple, on allait de l’avant avec la semaine de quatre jours. Ou si tout simplement on offrait de l’aide gratuite aux parents débordés, ou mieux: si on proposait un revenu minimum garanti à un parent qui décide de rester à la maison avec les enfants... À quel point on disposerait de plus de temps pour trier ses matières résiduelles, revaloriser les robes trouées par le temps, cuisiner, jardiner, etc.!
Imaginez si tout simplement, on se penchait RÉELLEMENT sur le problème de places en garderies, à quel point on réduirait de beaucoup les gaz à effet de serre des parents sur la route. Ou si on construisait davantage d’écoquartiers axés sur l’esprit de communauté, où se mêleraient jeunes familles, adolescents, retraités et où tous les services se trouveraient à moins de 15 minutes à pied... À quel point le quotidien deviendrait plus simple, équitable et sensé.
Le plus beau dans ce recadrage collectif, c’est que ce ne sont pas que les parents et leurs enfants qui en bénéficieraient, mais bien toutes générations confondues, qui s’entraideraient et se côtoieraient enfin au lieu d'être seuls tous ensemble.
Avec comme grande gagnante, bien évidemment... madame la planète Terre.
En regardant mon fils manger sa barre-tendre achetée au supermarché parce que, comme j’y suis allée à pied, je n’avais pas le temps d’en cuisiner moi-même, je me demande: à quoi ça sert de vouloir semer des petites graines de changement si le terreau dans lequel elles sont dispersées n’est même pas fertile?