Absolution d'un ingénieur: les pardons sont rares pour des agressions sexuelles
Ces condamnés finissent le plus souvent en prison


Michael Nguyen
Les absolutions en matière d’agression sexuelle sont excessivement rares, suggère une recension de jugements rendus ces 18 derniers mois effectuée par Le Journal.
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«On voit clairement une mouvance qui met l’accent sur la nécessité de dissuader les hommes à commettre des agressions sexuelles», affirme la criminaliste Me Véronique Robert.
La juge retraitée Nicole Gibeault explique de son côté que depuis quelques années, les tribunaux ont eu une «prise de conscience» sur l’impact de ce type de crimes sur les victimes, si bien que ce n’est que dans des cas exceptionnels qu’un accusé peut maintenant s’en tirer sans casier judiciaire.
Quatre sur des centaines
En fait, selon un recensement d’une centaine de jugements disponibles publiquement, il n’y a eu que quatre absolutions depuis janvier 2021.
«Si on considère que des centaines de verdicts de culpabilité dans ces causes de violence sexuelle sont rendus annuellement au Québec [...] il est possible d’affirmer que l’imposition d’une absolution pour ces crimes est une peine exceptionnelle», a pour sa part commenté Me Audrey Roy-Cloutier, porte-parole du Directeur des poursuites criminelles et pénales.
Le cas de Simon Houle, cet ingénieur qui s’en est sorti sans casier après avoir abusé d’une amie saoule et avoir pris en photo ses parties intimes, semble une exception.

Surtout qu’il s’agit du seul des quatre cas où il y a eu pénétration.
«Contrairement à d’autres affaires, il n’y a pas eu de pénétration [...] parce que l’accusé a repris ses sens et s’est arrêté avant de poser des gestes plus intrusifs», avait d’ailleurs dit une juge en accordant l’absolution à un accusé [voir ci-bas].
En fait, l’absolution est si rare en matière d’agression sexuelle que la majorité des accusés ne s’essayent même pas.
Le Journal n’a recensé que 10 cas où une telle demande a été faite.
La confiance du public
«Les tribunaux doivent reconnaître et dénoncer le mal profond et durable qu’entraîne ce genre d’infraction», avait rétorqué une juge de Gatineau en refusant d’accorder sa clémence à un ancien massothérapeute pour des attouchements sexuels sur des patientes.
Dans un autre cas, à Longueuil, un juge avait refusé l’absolution à un homme qui avait commis une agression sexuelle «d’une ou deux secondes», car cela «ne refléterait pas la gravité de l’infraction, banaliserait les actes du délinquant et pourrait miner la confiance du public dans le système de justice pénale».
Ainsi, tant Me Robert que la juge Gibeault rappellent que l’évolution de la société sur la compréhension des agressions sexuelles a fait avancer le droit.
Et dans le cas du jugement accordant l’absolution à l’ingénieur Simon Houle, elles rappellent que la cause sera portée en Cour d’appel, qui est souvent sensible aux phénomènes de société.
LES TROIS AUTRES ABSOLUTIONS DEPUIS 18 MOIS DANS DES CAS D’AGRESSION SEXUELLE
■ 11 janvier 2022
Un trentenaire d’Alma est entré dans la chambre de sa cousine de 17 ans pour lui toucher l’épaule pendant qu’elle dormait nue. Il s’est excusé, en plus d’effectuer un suivi psychologique et sexologique.
■ 8 juin 2021
Un Montréalais de 36 ans a profité du sommeil d’une connaissance pour lui agripper les fesses et la poitrine. La victime lui a dit non. Il s’est excusé et a quitté la chambre.
■ 4 février 2021
Un Lavallois avoue avoir baissé les culottes d’une amie et avoir tenté de la pénétrer, avant d’être stoppé net par la femme, en 2013. Après l’analyse de la preuve et parce qu’il a «repris ses sens et s’est arrêté avant de poser des gestes plus intrusifs», l’accusé qui avait à l’époque 23 ans a été absous.
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