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Le vrai danger des «incels»: une étude épluche les messages que s’envoient ces hommes célibataires frustrés

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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2024-10-21T11:00:00Z
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61 000: c’est le nombre de commentaires contenant le terme «viol» qui ont été laissés entre 2017 et 2024 sur une plateforme d’échanges destinée aux hommes célibataires frustrés.

Ces hommes, qui perçoivent leur célibat comme une injustice attribuable aux femmes qui les rejettent, appartiennent à un mouvement qu’on appelle «incels», un diminutif de involuntary celibate.

Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université Dalhousie a épluché les messages que se sont échangés par les utilisateurs de incels.is, la plateforme la plus populaire de cette communauté.

Ils ont découvert que 35,6% des usagers, soit 5151 hommes, ont utilisé une variation du mot «rape» (viol) dans leurs commentaires. Le mot revenait dans 61 000 messages publiés entre novembre 2017 et mai 2024.

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Si certains de ces commentaires contenaient des appels au viol, une majorité encourageait la violence genrée de manière moins directe, précisent les chercheurs.

Ils ont identifié trois grandes tendances de discours qui avaient comme effet de «célébrer, encourager et faciliter la violence contre les femmes».

D’abord, la violence sexuelle est vue comme une manière de se venger de femmes qui n’auraient pas été réceptives aux avances d’incels ou de «remettre à leur place» des femmes qui se «pensent trop bonnes» pour eux.

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Le viol est aussi vu comme une manière d’accéder à une masculinité dominante de laquelle ils se sentent exclus.

Certains incels invoquent finalement à tort la science pour affirmer que les femmes sont «prédisposées» à «aimer le viol» et les hommes, eux, à commettre des viols. La violence sexuelle envers les femmes serait donc «l’ordre naturel», selon ce discours.

La vraie menace

Même si les incels sont devenus célèbres à la suite d’attentats, ces données montrent que la menace principale liée à ces communautés est plutôt une violence genrée, plus insidieuse et moins médiatisée.

Les hommes qui s’abreuvent aux discours véhiculés sur ces plateformes ont plus de chance de commettre des violences dans leurs relations interpersonnelles que de commettre des tueries de masse.

Comment expliquer que des hommes rejoignent les incels?

Ce qui peut unir ces hommes, d’âges et de profils très différents, c’est cette impression d’être mis de côté ou «de ne pas atteindre ce qu’on s’estime en droit d’atteindre», explique Louis Audet Gosselin, directeur scientifique et stratégique au Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV).

Bien des hommes qui se reconnaissent dans le discours des incels se sentent rejetés de la société qui fait aujourd'hui une plus grande place aux femmes et aux personnes de la diversité sexuelle, précise-t-il.

«Ils arrivent à l’âge adulte dans un monde qui leur est imposé sans conscience organique des mouvements sociaux qui ont mené à ça», ajoute M. Gosselin

D’autres facteurs qui peuvent faciliter l’adhésion à ce genre de discours, comme le parcours de vie, la santé mentale, les débats polarisés dans la sphère publique, mais surtout l’isolement.

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Quoi faire si un proche s’implique avec des incels et se radicalise?

Essayer de garder un contact avec la personne et de discuter de manière neutre et sans jugement des idées qu’il défend, suggère Louis Audet Gosselin. «C’est souvent une détresse qui s’exprime», souligne-t-il.

Restez vigilant: beaucoup d’hommes qui fréquentent les sphères incels ont des pensées suicidaires. «La violence envers soi-même est valorisée», précise le chercheur.


Si vous avez besoin d’aide

1 866 APPELLE (277 3553)

Texto: 535 353

https://suicide.ca/fr

Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV)

514-687-7141 #116 (Montréal)

1-877-687-7141 #116 (Ailleurs au Québec)

https://info-radical.org/fr/

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