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L'article provient de Le Journal de Montréal
Monde

Des milliers d’Ukrainiens fuient les villes bombardées

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AFP

2022-03-08T09:50:20Z
2022-03-09T02:51:41Z
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KYÏV | Des milliers d’Ukrainiens fuyaient mardi leurs villes bombardées ou encerclées par les forces russes, alors que le conflit a conduit deux millions de personnes à l’exode et que les cours du pétrole s’envolaient à l’annonce d’un embargo américain sur les hydrocarbures russes.

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Des civils ont notamment commencé à évacuer la ville ukrainienne de Soumy, bombardée la veille.

Au moins 21 personnes ont été tuées lundi soir dans des frappes aériennes russes contre cette ville située à 350 km au nord-est de Kyïv, près de la frontière russo-ukrainienne.

Après un premier convoi de bus de civils évacués de cette ville de 250 000 habitants dans la matinée, un deuxième s’est ébranlé dans la journée en direction de Poltava, au sud de Soumy, a annoncé le gouverneur de la région, Dmitry Lunin.

À Marioupol, grand port stratégique sur la mer d’Azov (sud-est), quelque 300 000 civils restaient en revanche coincés, selon Kyïv, qui accuse les Russes de ne pas respecter le couloir humanitaire.

«L’ennemi a lancé une attaque exactement en direction du couloir humanitaire», a dénoncé le ministère ukrainien de la Défense. 

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La Russie avait annoncé lundi soir vouloir instaurer des couloirs humanitaires pour la population de cinq métropoles particulièrement exposées : la capitale Kyïv, Soumy, Marioupol, Kharkiv, deuxième ville du pays, et Tchernihiv, après plusieurs tentatives avortées depuis vendredi. 

  • Écoutez l'entrevue de l'envoyé spécial de TF1 et France 2 en Ukraine, Christopher Kenck, avec Benoit Dutrizac sur QUB Radio:  

Mais la plupart des voies d’évacuation proposées par Moscou passent par la Russie ou le Bélarus, allié de Moscou, option inacceptable pour Kyïv et qualifiée de «cynique» lundi par le président français Emmanuel Macron.

«Je ne voulais pas partir»

Sur le terrain, les forces russes ont continué à se déployer autour des grandes villes ou intensifié leurs bombardements, au treizième jour de l’invasion, selon des responsables ukrainiens.

Parmi les victimes de cette invasion, trois adultes tués et trois enfants blessés mardi par une mine antipersonnel dans la région de Tchernihiv, au nord de Kyïv, a affirmé Liudmyla Denisova, chargée des droits humains auprès du Parlement ukrainien, soulignant que l’usage de ces armes est prohibé par le droit international.

Une femme et son enfant évacuent Irpin, non loin de la capitale Kyïv.
Une femme et son enfant évacuent Irpin, non loin de la capitale Kyïv. Photo AFP

Dans cette région située au nord de la capitale, la situation humanitaire est de plus en plus critique dans plusieurs localités, sous le feu ennemi. L’eau, le gaz, l’électricité et la nourriture commencent à manquer, selon les autorités ukrainiennes.

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«L’occupant n’accorde pas de couloirs humanitaires, pas de garantie de cessez-le-feu», a déclaré le chef de l’administration de la région de Kyïv, Oleksiy Kuleba.

À Boutcha, aux portes nord de Kyïv, les habitants essaient désespérément de quitter la ville. «Il y a des gens dans chaque appartement, chaque maison. Le plus important c’est de faire partir les enfants. Il y a beaucoup d’enfants et de femmes», a confié une habitante, Anna, à l’AFP. 

À Irpin, l’AFP a vu des centaines de personnes patienter en file indienne pour franchir à pied la rivière du même nom, sur des passerelles de fortune faites de planches, de palettes en bois et de carcasses métalliques, en direction de Kyïv, seule direction encore non occupée par l’armée russe. Environ 2000 habitants ont pu s’extraire de la ville, selon la police ukrainienne.   

Sous les précipitations de neige, des soldats aidaient hier une dame à traverser dans un chariot un pont détruit dans la ville d’Irpin.
Sous les précipitations de neige, des soldats aidaient hier une dame à traverser dans un chariot un pont détruit dans la ville d’Irpin. Photo AFP

«Je ne voulais pas partir, mais il n’y a plus personne dans les maisons autour, et plus d’eau, de gaz, ni d’électricité», a déclaré Larissa Prokopets, 43 ans, qui a dit être restée cachée plusieurs jours dans le sous-sol de sa maison.

De violents combats ont aussi eu lieu dans la ville d’Izioum (est), mais les troupes russes ont battu en retraite, a affirmé l’état-major ukrainien. L’hôpital central y est totalement détruit, a annoncé la mairie.

2000 à 4000 Russes tués

Le ministère ukrainien de la Défense a par ailleurs affirmé que le général russe Vitali Guerassimov avait été tué près de Kharkiv, information non confirmée à Moscou et invérifiable dans l’immédiat de source indépendante.

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Selon le Pentagone, «2000 à 4000» soldats russes ont été tués en Ukraine depuis le début de l’offensive le 24 mars. 

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Le 2 mars, la Russie avait fait état de 497 morts dans ses rangs, mais n’a donné aucun nouveau bilan depuis.

Le porte-parole de l’armée russe, Igor Konachenkov, a annoncé de son côté qu’un l’aérodrome militaire situé au sud de Jitomir, à 150 km à l’ouest de Kyïv, avait été détruit.

À Mykolaïv (sud), près d’Odessa, des queues de voitures remplies de civils fuyant l’avancée des combats s’étiraient sur des kilomètres, alors que résonnent les tirs depuis la ligne de front dans la partie orientale de la ville, a constaté une autre journaliste de l’AFP.  

À l’hôpital local, les victimes de bombardements affluent. «Les deux premiers jours, nous avons eu 160 soldats blessés, mais depuis quelques jours ce sont des civils qui arrivent, certains gravement blessés», a raconté Dmitri Sykorsky, chirurgien en chef.

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Dans ce contexte, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé ne plus insister sur une adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, une des questions qui ont officiellement déclenché l’invasion russe de son pays, dans un entretien à la chaîne américaine ABC.

Autre ouverture apparente en direction de Moscou, il s’est dit prêt à un «compromis» sur le statut des territoires séparatistes de l’est de l’Ukraine dont le président russe Vladimir Poutine a reconnu unilatéralement l’indépendance juste avant de lancer sa guerre le 24 février.

L’invasion de l’Ukraine, plus grave conflit militaire en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, a provoqué l’une des plus graves crises humanitaires du continent.

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Les Ukrainiens continuent à prendre massivement la route de l’exode. La guerre a déjà poussé plus de deux millions de personnes à se réfugier dans les pays voisins, a indiqué mardi l’ONU.

La Pologne en a accueilli à elle seule plus de la moitié, devant la Hongrie et la Slovaquie. L’Europe s’attend à recevoir cinq millions d’exilés si le conflit se poursuit.

Des familles attendaient hier des autobus pour continuer leur chemin en Pologne.
Des familles attendaient hier des autobus pour continuer leur chemin en Pologne. Photo AFP

Le brut en hausse de 5 %

À la ville frontalière polonaise de Przemysl, des femmes affluaient exténuées après de longs périples, laissant derrière elles maris et fils restés combattre.

Des enfants se reposaient dans un refuge temporaire mis sur pied dans un centre commercial situé près de la frontière entre la Pologne et l’Ukraine.
Des enfants se reposaient dans un refuge temporaire mis sur pied dans un centre commercial situé près de la frontière entre la Pologne et l’Ukraine. Photo AFP

«Nous avons perdu notre vie, notre sécurité. Nous ne savons pas de quoi demain sera fait», lâche Anastasia Kazankina, hébétée, tenant son fils d’une main et un chien en laisse de l’autre.

Les répercussions économiques du conflit et des sanctions occidentales inédites adoptées par les pays occidentaux contre la Russie ne cessent par ailleurs de s’amplifier.

Les cours du pétrole grimpaient de plus de 5 %, le Brent atteignant les 130 dollars le baril, peu avant que le président américain Joe Biden n’annonce un embargo sur le pétrole et le gaz russe aux États-Unis.

Si le pétrole russe ne représente que 8 % des importations américaines de pétrole, les Européens, dépendants eux à 30 % du brut russe, se sont pour l’instant refusés à aller aussi loin. Seul le Royaume-Uni s’est dit prêt à arrêter lui aussi les importations de pétrole russe d’ici fin 2022.

«Nous appelons tous les États à arrêter d’acheter du pétrole, du gaz et du charbon russes, et à arrêter de financer la machine de guerre de Poutine et ses atrocités barbares en Ukraine», a déclaré sur Twitter le ministre ukranien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba. 

Deuxième exportateur mondial, «la Russie n’est pas un producteur dont les extractions peuvent être aisément compensées par d’autres», a cependant souligné Giovanni Staunovo, analyste chez UBS.

Le géant pétrolier britannique Shell a de son côté décidé qu’il allait se retirer «graduellement» du pétrole et du gaz russes.

À Londres, la cotation du nickel, utilisé dans les batteries de voitures électriques, a dû être suspendue après avoir atteint les 100 000 dollars la tonne, en raison de craintes sur les approvisionnements russes.

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