Le mystère de l'île de Pâques

Isabelle Hontebeyrie
À 3525 km à l’ouest des côtes du Chili et dans l’archipel de la Polynésie se trouve Rapa Nui, ou Isla de Pascua en espagnol. Il s’agit de l’île de Pâques, dont les statues géantes – les moaï – continuent de fasciner, tant le public que les archéologues. Plongeons dans l’énigme que soulèvent ces géants de pierre...
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L’archéologue américaine Jo Anne Van Tilburg, spécialiste de l’île de Pâques, a dénombré pas moins de 1043 moaï, et leur taille varie de quelques mètres à plus de 20 mètres pour le moaï le plus grand, «El Gigante», à moitié enfoui dans la carrière. Le poids moyen de ces statues est de 13,78 tonnes, les plus imposantes atteignant... 80 tonnes. Le mystère ne réside donc pas tant dans leur fabrication, mais plutôt dans leur transport. Car les moaï ont été taillés dans le tuf volcanique (une pierre volcanique poreuse, faite de cendres solidifiées) de Rano Raraku, le «volcan aux statues», puis transportés sur une distance d’environ 18 km aux XIIIe et XVe siècles, donc sans les moyens technologiques actuels ni l’aide d’animaux de trait.
Des géants de pierre qui marchent
Pendant des décennies, la théorie dominante, popularisée notamment par Jared Diamond dans son livre Effondrement, était que les Rapa Nui avaient roulé les statues sur des rondins de bois, une activité qui aurait mené à une déforestation catastrophique, entraînant l'effondrement de leur société.
Mais pour Terry Hunt, de l’Université d’Hawaï, et Carl Lipo, de l’Université Long Beach, en Californie, les moaï n’ont pas été transportés en utilisant des rondins — et donc en détruisant la végétation de l’île —, mais en étant roulés au moyen de cordes. Ils auraient donc «marché» jusqu’à leurs ahu, les plateformes cérémonielles sur lesquelles ils sont disposés. Les deux hommes ont entrepris une démonstration pour le compte de National Geographic et sont parvenus à bouger une réplique «de cinq tonnes et de trois mètres de haut avec une équipe de seulement 18 personnes et trois cordes solides». Comme le souligne Terry Hunt: «Nous avons mené des expériences avec des répliques de moaï, montrant qu'il était tout à fait possible de les faire basculer d'un côté à l'autre, les faisant avancer progressivement avec des cordes et des groupes de personnes.»
Et il semble que cette manière de faire soit la bonne puisque Suri Tuki, un guide touristique de l’île de Pâques, a indiqué au magazine: «Nous connaissons la vérité: les statues marchaient.»
Pourquoi «Pâques»?
L'île de Pâques doit son nom actuel à l'explorateur néerlandais Jakob Roggeveen. C'est lui qui, au cours d'une expédition pour le compte de la Société commerciale des Indes occidentales, accosta sur cette île isolée de l'océan Pacifique le dimanche de Pâques, le 5 avril 1722. Il décida alors de la baptiser Paasch-Eyland, ce qui signifie «île de Pâques» en néerlandais.
Le nom polynésien de l'île utilisé aujourd’hui est Rapa Nui, un nom signifiant «la grande Rapa», qui date du XIXe siècle et qui a été donné en opposition à Rapa, une petite île située en Polynésie française.
À quoi servaient les moaï?
La fonction la plus largement acceptée des moaï est qu'ils représentent des ancêtres importants, souvent des chefs ou des figures marquantes du passé de la communauté. Ces statues étaient considérées comme des «visages vivants des ancêtres» et servaient de lien entre les vivants et les esprits de leurs défunts, assurant que leur héritage et leur pouvoir continuent de veiller sur la tribu. Les habitants de Rapa Nui croyaient que les moaï étaient des réceptacles de «mana», une énergie spirituelle ou un pouvoir sacré. Une fois dressées sur les plateformes cérémonielles (les ahu) et, dans certains cas, dotées d’yeux en corail, les statues étaient censées activer cette mana, protégeant la communauté, assurant la fertilité des terres et l'abondance des ressources. «C’est ma théorie personnelle: que les moai sont des conteneurs dans lesquels ces esprits en mouvement peuvent être capturés et maintenus en sécurité afin qu’ils puissent continuer à aider les personnes qui ont été abandonnées», indique Jo Anne Van Tilburg.