Le superministre Pierre Fitzgibbon démissionne; ses responsabilités confiées à d’autres ministres

Le superministre Pierre Fitzgibbon souhaitait quitter ses fonctions en décembre prochain. Mais, au terme d’une discussion avec François Legault, la décision a été prise de mettre fin à son mandat immédiatement.

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Toutefois, le départ du puissant ministre de l’Économie et de l’Énergie n’entraînera pas de remaniement ministériel. Selon nos informations, ses importants portefeuilles seront plutôt confiés à d’autres ministres déjà en poste.

Visiblement, les questions sur l’avenir politique de Pierre Fitzgibbon agaçaient le premier ministre.

Une source bien informée explique que François Legault a rencontré son ami de longue date à deux reprises, au mois d’août, afin de savoir s’il comptait terminer son mandat.

Depuis plusieurs mois, déjà, ce dernier laissait planer le mystère à ce sujet.

Pierre Fitzgibbon a finalement convenu de revenir avec une réponse au terme du long week-end de la fête du Travail. Lundi, il a avisé le premier ministre de son intention de partir en décembre, après l’adoption probable de son vaste projet de loi pour bonifier la production d’électricité.

Mais, au terme d’une discussion et d’un «accord commun», selon la formule consacrée, la décision a plutôt été prise pour une démission immédiate.

Adieux

Pierre Fitzgibbon quitte donc à la fois ses fonctions et son poste de député.

Le superministre fera ses adieux à ses collègues à l’occasion d’un souper mardi, à la veille du caucus de la CAQ en vue de la rentrée parlementaire.

«On a un souper qui était prévu depuis longtemps avec tous les députés ce soir. Pierre Fitzgibbon va d’abord parler aux députés ce soir et je vais vous rencontrer demain matin avec Pierre Fitzgibbon pour vous donner tous les détails», a déclaré François Legault mardi.

Le président du caucus, François Jacques, a de son côté affirmé qu’il s’agissait «d’une surprise pour tout le monde» et que Pierre Fitzgibbon «était très respecté par tous ses collègues du gouvernement».

Superministre

Son départ entraînera une élection partielle dans la circonscription de Terrebonne, qu'il représentait depuis 2018. 

Pierre Fitzgibbon est un poids lourd du gouvernement Legault. En plus de son important projet de loi pour augmenter la production d’électricité au Québec, il a investi des milliards$ afin d’attirer l’industrie des véhicules électriques au Québec.

Ces investissements semblent désormais à risque, avec le ralentissement de la production chez plusieurs constructeurs automobiles.

Franc-parler

Depuis son entrée en politique, Pierre Fitzgibbon s’est aussi fait connaître pour son franc-parler, ce qui l’a parfois mis en porte-à-faux avec le premier ministre François Legault.

La semaine dernière, le superministre a notamment déclaré qu’il y aurait «des hausses importantes» des tarifs d’Hydro-Québec d’ici cinq à dix ans, alors que François Legault venait de réitérer que «les tarifs des Québécois n’augmenteraient pas de plus que 3% par année» tant qu’il serait premier ministre.

Son passage en politique a également été marqué par de nombreux enjeux en matière d’éthique.

La commissaire à l’éthique de l’Assemblée nationale lui a attribué trois blâmes dans cinq dossiers soumis à son bureau.

En juin 2021, il avait d’ailleurs brièvement démissionné de ses fonctions après avoir été blâmé pour ses intérêts dans deux entreprises, soit Immervision et White Star Capital, qui le plaçaient en opposition avec le code de déontologie.

À la suite de la vente de ses actions, il a réintégré le Conseil des ministres.

Avec la collaboration de Nicolas Lachance et Marc-André Gagnon

Pierre Fitzgibbon en quelques dates   

• Âgé actuellement de 69 ans, il célébrera son 70^e anniversaire le 10 novembre 2024.  
• Élu sous la bannière caquiste le 1^er octobre 2018, dans la circonscription de Terrebonne.  
• Réélu le 3 octobre 2022, avec près de 13 000 votes de majorité.  
• Il devient ministre de l'Économie et de l'Innovation le 18 octobre 2018.  
• En novembre 2018, il fait l'objet d'une première enquête de la commissaire à l'éthique et à la déontologie de l'Assemblée nationale concernant les actions qu'il détient dans Héroux-Devtek, un important fournisseur de Bombardier.  
• Il fait l'objet d'une deuxième enquête de la commissaire en 2019, concernant ses actions dans Move Protéine, l’entreprise du fils de Guy LeBlanc, fraîchement nommé à la direction d’Investissement Québec.  
• Au cours de la même année, il suscite la controverse en investissant près de 20 millions dans Flying Whales, un projet français de dirigeables. Trois ans plus tard, Québec allonge 50 millions $ additionnels dans l'aventure.  
• Une troisième enquête débute en janvier 2020, concernant ses actions dans différentes entreprises ayant des liens avec le gouvernement.  
• En mars 2021, une quatrième enquête est lancée concernant sa participation dans Immervision et White Star Capital.  
• Le 2 juin 2021, il quitte ses fonctions ministérielles après la publication d'un rapport de la commissaire, qui recommande de le suspendre. François Legault le remet en poste en septembre 2021 et lui ajoute le dossier du Développement économique régional.  
• Après les élections de 2022, François Legault reconduit M. Fitzgibbon en tant que ministre de l'Économie et lui confie aussi le poste de ministre de l'Énergie.  
• En décembre 2022, Fitzgibbon frappe l'imaginaire en suggérant qu'il faudra bientôt démarrer son lave-vaisselle la nuit. Il plaide pour la sobriété énergétique et promet une vaste réforme.  
• Toujours en décembre 2022, notre Bureau d'enquête révèle que M. Fitzgibbon a participé à une partie de chasse au faisan sur une île privée du lac Memphrémagog appartenant à un groupe de riches hommes d’affaires bénéficiant de subventions gouvernementales. Les partis d'opposition obtiennent une sixième enquête de la commissaire. Fitzgibbon réplique aux journalistes: «Ce n'est pas de vos affaires, [...] c'est ma vie privée.»  
• En février 2024, il débranche Le Panier Bleu, une plateforme ayant reçu 4 millions $ en subvention, et dans laquelle Investissement Québec a injecté 12 millions $.  
• En avril 2024, après 1 milliard $ investis dans la filière batterie, dont 567 millions $ dans Northvolt, Pierre Fitzgibbon annonce qu'il faut ralentir la cadence en raison de la taille du déficit.  
• Le 7 juin 2024, il dépose sa réforme sur l'énergie, qui ouvre la porte à une modulation des tarifs d'Hydro-Québec et qui doit se retrouver en commission parlementaire cet automne.