Le français et les affaires: dérapage linguistique dans une publicité de pneus d’hiver

Gabriel Côté
Le détaillant de pneus Point S a lancé une campagne publicitaire qui contient une faute de français grosse comme le bras.
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«Attends pas qui neige», peut-on lire sur d’immenses panneaux publicitaires dans la région de Québec.
Cette courte phrase de quatre mots contient, à proprement parler, deux erreurs. Si l’on était tatillon, il faudrait en effet écrire: «N’attends pas qu’il neige», comme le rappelle la linguiste Ariane Caron-Lacoste, également éditrice aux Éditions du Journal.
Évidemment, on comprend que l’entreprise a voulu rendre à l’écrit la sonorité de la langue que l’on parle tous les jours. C’est d’ailleurs ce qu’a expliqué un porte-parole de l’entreprise en réponse à nos questions.
«Notre choix d’utiliser des guillemets visait précisément à souligner une citation. Notre approche se veut respectueuse et toujours en phase avec le ton juste. Elle reflète une manière dont les gens s’expriment au quotidien, avec authenticité et simplicité», a-t-on fait valoir.
Guillemets ou pas, la confusion entre «qui» et «qu’il» est une «grosse faute», selon Mme Caron-Lacoste.
«Même quand on transpose l’oral à l’écrit, il faut conserver des notions de grammaire. C’est une faute très courante qu’on rencontre souvent. Sur un panneau publicitaire, elle n’a tout simplement pas été corrigée», ajoute-t-elle.
Anecdote, ou symptôme?
On fait grand cas au Québec de la présence du français dans l’espace public, mais on parle moins souvent de la qualité de la langue.
Or, l’Office québécois de la langue française a observé dans une étude réalisée en 2021 que l’affichage de 74% des entreprises contenait des fautes. Plusieurs étaient liées aux messages éphémères, par exemple sur les ardoises ou dans les menus au restaurant, parce que ces textes n’étaient pas relus.
Il n’est donc pas surprenant qu’on rencontre des fautes partout, pour peu qu’on ouvre l’œil. Dans les derniers mois, Le Journal a relevé le véritable massacre du français sur les écrans des pompes à essence, et les traductions bâclées accompagnant certains produits de sport en vente à Canadian Tire, pour ne citer que deux cas.
Défendre la qualité du français
La présidente de la société Saint-Jean-Baptiste, Marie-Anne Alepin, déplore la présence d’autant de fautes dans l’affichage. «Les entreprises peuvent et doivent en faire davantage pour la qualité du français», a-t-elle réagi en entrevue.
«Elles ont un pouvoir pour participer à la vitalité de la langue. C’est d’ailleurs notre responsabilité à tous. Défendre le français, c’est aussi défendre la qualité du français», ajoute-t-elle.