«La Maison d’Hortense»: Maryse Rouy décrit la vie d’un groupe d’amis habitant sur le Plateau Mont-Royal avant la Deuxième Guerre mondiale


Marie-France Bornais
Romancière exceptionnelle, autrice d’une quarantaine d’ouvrages, Maryse Rouy décrit la vie quotidienne sur le Plateau Mont-Royal juste avant le déclenchement de la Deuxième Guerre mondiale dans le troisième tome de sa série à succès, La Maison d’Hortense. Nous sommes à l’été 1938 et un nouveau chapitre commence pour son héroïne Justine Tourville, qui apprivoise autant la vie conjugale que le marché du travail. La vie suit son cours... mais la menace de la guerre plane au-dessus de Justine, de son amie Germaine et de leur entourage.

Justine et Germaine mènent leur vie bien différemment. Des fiançailles réussies ont bien préparé l’union de Justine avec Étienne. Elle a pu faire des études et s’est trouvé un emploi comme parajuriste. Germaine, de son côté, vit plus difficilement le début de la vie conjugale avec Antoine.
Dans ce troisième tome de la série, les pensionnaires de la Maison d’Hortense sont unies par une grande solidarité, peu importe leur origine ou leur classe sociale. Elles luttent pour se faire une place dans le monde, à une époque où rien n’est gagné d’avance pour les femmes.
Maryse Rouy, en entrevue, explique que les trois tomes se déroulent à peu près à un an d’intervalle. «Ça commence en 1935 et ça se termine, après le troisième, en septembre 1939. On sent que la guerre va éclater d’un moment à l’autre. C’est une période qui est quand même très intéressante, je trouve, parce qu’on sent monter ces choses-là. Il y a des gens qui n’y croient pas. Mais il y a des gens qui sont tout à fait conscients.»
Au carré Saint-Louis
L’action se déroule à Montréal, au carré Saint-Louis, dans une maison de famille où il y a un certain nombre de femmes. Des amies de ces femmes habitent dans la maison voisine.
Maryse Rouy ajoute qu’on retrouve, à peu de choses près, les mêmes personnages dans les trois tomes. «À chaque tome, il y en a un qui prend de l’importance sur les autres. Dans le premier tome, c’était Justine qui était importante: une jeune fille qui voulait s’affranchir du carcan familial et faire des études de droit.»

Le coût d’un divorce
Dans le deuxième tome, Justine est toujours importante mais on voit que sa mère, Célina, s’épanouit. «Célina était complètement sous la coupe de sa propre mère. Mais sa mère est morte. Et en plus, elle divorce.»
«Un divorce, pour la femme, avant la Révolution tranquille, c’était synonyme d’exclusion sociale. Quelles que soient les circonstances, la faute était attribuée à la femme. Célina, ça aurait dû l’écraser, mais au contraire, cette injustice l’a fouettée et lui a permis de s’épanouir.»

Vouloir être heureux
Dans le troisième tome, Germaine, qui est une amie de Justine, qui était très effacée et qui semblait sans personnalité, montre qu’elle a de la ressource, résume l’autrice. «À travers son personnage, on découvre la façon dont on éduquait les jeunes filles à l’époque, entre autres par rapport à leur corps.»
«C’était absolument terrible», poursuit Maryse Rouy. «Elles étaient complètement ignorantes et le soir des noces, elles étaient livrées à leur mari. Elles n’avaient même pas idée de la façon dont le corps de leur mari était fait. Et je parle des bourgeoises: elles ne savaient rien. Elles se retrouvaient ainsi, le soir des noces... et dans certains cas, elles étaient traumatisées pour le reste de leur vie.»
Germaine et son mari Antoine, qui n’était pas plus dégourdi qu’elle, étaient néanmoins des gens généreux. «Ils avaient envie d’être heureux et donc découvrent ensemble qu’une relation de couple, ça peut être harmonieux. On les voit cheminer pendant le tome trois, en suivant en même temps la vie des autres personnages de la Maison d’Hortense.»

La maison d’Hortense, tome 3 : Été 1938, Été 1939
Maryse Rouy
Éditions Hurtubise
328 pages
- Maryse Rouy a longtemps enseigné au primaire avant de se consacrer à l’écriture.
- Elle a publié Une jeune femme en guerre (série en 4 tomes), Mary l’Irlandaise et Au nom de Compostelle, tous parus chez Québec Amérique.
- On lui doit la série à succès Azalaïs : La vie courtoise, qui se déroule au 12e siècle et qui a été publiée dans les années 1990. Avis aux intéressés : le manuscrit d’un roman se déroulant à l’époque médiévale dort dans un de ses tiroirs... voilà une période qu’il serait tellement agréable de revisiter!
- Maryse Rouy a publié récemment À l’hôtel des Pays d’En-Haut chez Hurtubise.
«À la sortie de la messe, Justine affichait un visage radieux et plus de complicité avec Étienne qu’il n’était décent d’en montrer. Cela contrastait avec le comportement de Germaine et Antoine, dont la respectabilité était exemplaire.
Danielle chuchota à l’oreille de Lucette :
– L’une a trouvé un amant et l’autre, un mari.
Les deux jeunes couples saluèrent leurs voisins et, en réponse à leurs questions, s’extasièrent, qui sur Gaspé, qui sur Niagara, avant de suivre les parents Bilodeau pour partager leur repas dominical.»
– Maryse Rouy, La maison d’Hortense, tome 3 : Été 1938, Été 1939, Éditions Hurtubise
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