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L'article provient de TVA Nouvelles
Politique

La nomination d’un ami de Simon Jolin-Barrette comme juge «crée un malaise sérieux», disent les partis d’opposition

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Gabriel Côté | Agence QMI

2023-05-12T14:38:10Z
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Le ministre de la Justice Simon Jolin-Barrette a été «très imprudent» en nommant un ami comme juge, selon les partis d’opposition, mais François Legault assure qu’il n’y a pas eu de conflit d’intérêts.  

• À lire aussi: Côte-Nord: le choix du juge de Sept-Îles étonne

«Ça crée un malaise sérieux. Quand on procède à la nomination d’un juge, il faut que ça donne l’image que c’est au-dessus de tout soupçon, c’est exactement ce que le ministre a raté ici», a affirmé le député libéral André Albert Morin.

Vendredi matin, Le Soleil révélait que Simon Jolin-Barrette a recommandé la nomination de Charles-Olivier Gosselin, 36 ans, un ami de longue date dont il a d’ailleurs célébré le mariage, comme juge à la chambre criminelle de la Cour du Québec. 

M. Gosselin est l’avocat qui a porté en Cour suprême le dossier d’Alexandre Bissonnette, le tueur de la Mosquée de Québec, plaidant que les peines consécutives pour les meurtres multiples étaient inconstitutionnelles. Au bout du processus, le plus haut tribunal au pays a invalidé la disposition du Code criminel qui permettait d’imposer des peines de plus de 25 ans d’incarcération. 

En fin d’après-midi vendredi, les libéraux ont adressé une lettre à la commissaire à l’éthique, Ariane Mignolet, pour lui demander d’enquêter à ce sujet afin de déterminer s’il y a eu un conflit d’intérêts dans cette affaire.

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Processus

À Sherbrooke, François Legault a défendu la décision de M. Jolin-Barrette, en rappelant le processus au terme duquel un juge est nommé. 

«Avant, il y avait un post-it et puis on disait: “cette personne-là est partisane de tel parti donc on devrait la nommer”. Ça ne marche plus de même, il y a un comité indépendant qui fait l’analyse. Et là, il y a un maximum de trois noms qui est soumis», a dit le premier ministre en mêlée de presse vendredi. 

Après avoir reçu les recommandations du comité indépendant, le ministre de la Justice doit faire un choix et le soumettre au conseil des ministres.

Pour le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon, c’est là le nœud de l’affaire. «A-t-il été transparent? A-t-il divulgué à ses collègues son apparence de conflit d’intérêts lorsqu’il a recommandé cette candidature-là?» s’est-il interrogé en entrevue avec l’Agence QMI.

Quand des journalistes lui ont posé cette question, François Legault a affirmé qu’il avait appris que le juge Gosselin était l’ami de Simon Jolin-Barrette dans Le journal

«Il y a chaque semaine beaucoup de nominations qui sont adoptées par le conseil des ministres, et la seule question que je pose, c’est “Est-ce que les règles ont été suivies?”», a-t-il ajouté, en précisant qu’il ne pense pas qu’il soit nécessaire de modifier le processus en place.

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Un petit monde

Selon le professeur de droit Patrick Taillon, Simon Jolin-Barrette s’est trouvé dans la «situation bizarre» où se retrouvent souvent les ministres de la Justice, du simple fait que la communauté juridique est «un petit monde».

«Le système n’est pas bien fait, pour que quelqu’un puisse dire: je ne veux pas priver quelqu’un qui le mérite, juste parce que je le connais. Mais en même temps, si je le nomme, je vais être dans l’eau chaude», a-t-il dit.  

Ce qu’ils ont dit

«Le problème, ce n’est pas la personne qui a été nommée, ni l’impartialité de la Cour du Québec. C’est le ministre. Pour des décisions aussi importantes, il a une responsabilité morale, il doit s’assurer qu’il maintient la crédibilité du système.» – André Albert Morin, député libéral de l’Acadie

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«C’est très imprudent de la part de Simon Jolin-Barrette. Il se place dans une situation où même s’il dit que ce n’est pas le cas, il y a une apparence de favoritisme. Je pense qu’il faut trouver des moyens que ça n’arrive pas.» – Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole de Québec solidaire 

«Il y a de sérieuses questions qui se posent, dans la mesure où on ne sait toujours pas si le ministre a formellement divulgué son conflit d’intérêts lorsqu’il a fait sa recommandation au conseil des ministres. Nous lui demandons de dévoiler rapidement cette information, preuves à l’appui» – Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois 

«Le ministre évolue dans le milieu de la justice depuis 15 ans maintenant. Au cours de son parcours, il a développé des liens et des amitiés avec de nombreuses personnes gravitant dans ce milieu et celles-ci ne devraient pas être disqualifiées d’office pour accéder à la fonction de juge.» – Déclaration du cabinet du ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette

Une autre nomination controversée

Une autre nomination survenue au même moment a créé la controverse sur la Côte-Nord. Un avocat de la Montérégie, Alexandre Germain, a été nommé juge par Simon Jolin-Barrette, à la chambre de la jeunesse et à la Chambre criminelle et pénale de la Cour du Québec, à Sept-Îles.

Si cette nomination a créé du remous, c’est d’abord parce qu’il est inhabituel qu’un avocat ne pratiquant pas le droit dans la région accède à la fonction de magistrat sur la Côte-Nord. 

Qui plus est, le processus de nomination s’est fait de façon particulière. Alexandre Germain a été nommé après un deuxième appel de candidatures. Un premier appel avait été lancé l’année dernière, et le comité de sélection avait remis ses recommandations au ministre en décembre dernier, selon un document qu’a pu consulter l’Agence QMI. 

Plutôt que de nommer un juge à la suite de ce rapport, Simon Jolin-Barrette a lancé un second appel de candidatures pour le même poste, mais les avocats ayant soumis leur candidature la première fois n’auraient pas été autorisés à le faire à nouveau. 

Ainsi, après un second rapport transmis au ministre au début du mois d’avril, M. Jolin-Barrette a pris la décision de nommer Alexandre Germain. 

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