«Je peux pas croire qu’il m’a menti»: la mère de l'incendiaire de Chapais brise le silence
L'incendiaire de 38 ans avait juré à sa mère qu'il n'avait rien à voir avec les incendies criminels qu'on lui reproche.


Vincent Desbiens
CHIBOUGAMAU | Une enfance difficile et un intérêt marqué pour les théories complotistes, voilà ce qui pourrait expliquer pourquoi Brian Paré a allumé 14 incendies qui ont forcé l’évacuation de centaines de citoyens du Nord-du-Québec, l’été dernier.
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Dans sa cuisine de Chibougamau, Gabrielle Veilleux Boutet, la mère d’un des pires incendiaires de l’histoire du Québec, était toujours sous le choc dans les jours qui ont suivi la décision de son fils de plaider coupable à 13 chefs d’accusation d’incendie criminel et un autre d’incendie criminel avec mépris de la vie humaine, alors qu’il lui avait juré être innocent.
«C’est extrêmement difficile à accepter. On dirait que je ne le réalise pas encore. Brian avait déjà eu son lot de problèmes, mais je n’aurais jamais pensé qu’il pourrait faire ça», confie-t-elle en entrevue avec Le Journal.

Parmi les incendies allumés par Paré, celui du lac Cavan, allumé le 31 mai, a fait pas moins de 872 hectares de dommages, en plus de forcer près de la moitié de la population de Chapais à quitter son logis.
Avec une voix tremblotante, sa mère s’est remémoré les douloureux événements des derniers mois, qui se sont conclus par un plaidoyer de culpabilité de son fils au palais de justice de Chibougamau, le 15 janvier dernier.
«J’ai fait une crise de cœur en janvier 2023 et je pensais en refaire une quand mon fils a été arrêté en septembre. Il m’avait dit qu’il n’avait pas fait ces choses-là. Il m’a dit “Maman, j’ai jamais mis le feu à nulle part”. Puis il a dit le contraire aux policiers. Je peux pas croire qu’il m’a menti.»
«Il y a toujours une raison»
Selon sa mère, Brian Paré souffre de graves problèmes d’anxiété depuis l’enfance. Elle est persuadée que le contexte de violence conjugale dans lequel il est né et «l’enfance difficile» qui s’en est suivie ont quelque chose à voir avec les nombreux ennuis judiciaires qu’il connaît depuis plus de 15 ans.

«Je ne veux pas excuser ses gestes, pas du tout. C’est très très grave et ça me fait énormément de peine. Par contre, je trouve ça important de dire aux gens que c’est pas arrivé par hasard. Il y a toujours une raison», fait valoir Mme Veilleux.
Elle raconte que son fils passait seulement les congés scolaires et l’été à Chibougamau et qu’il a fait sa scolarité chez son père, à Saint-Hyacinthe, jusqu’à sa majorité.
«Quand il venait ici, il était bien et ça se voyait. Brian, c’est un garçon gêné et solitaire qui aime énormément le bois. Il était tout le temps avec mon mari», soutient-elle.
Adepte des théories du complot
Lors d’un interrogatoire de sept heures avec la Sûreté du Québec à la suite de son arrestation le 7 septembre dernier, Brian Paré a affirmé que la principale motivation de ses crimes était de «faire des tests pour savoir si la forêt était réellement sèche ou non».
«Avec la COVID, on dirait qu’il s’est mis à voir des complots partout, admet sa mère. On a essayé de le raisonner je ne sais plus combien de fois. De lui expliquer que le gouvernement ne cherche pas à nous contrôler, qu’il n’y a pas de nouvel ordre mondial. Mais il a la tête très dure. Ça s’est empiré avec les feux de forêt, il était convaincu qu’on nous cachait des choses.»

Sa mère a depuis longtemps perçu qu’il était paranoïaque et méfiant envers les autres, «mais c’était de pire en pire» depuis un certain temps, affirme-t-elle.
Un collègue de l’incendiaire chez Entretien industriel Éco, un sous-traitant de la scierie Barrette-Chapais, Éric Asselin, abonde dans le même sens. Il décrit Paré comme un homme «très spécial» et il avait vu des changements dans son comportement.
Ce qu'ils ont dit:
«Au printemps, il était tout le temps en train de regarder les cartes pour voir l’évolution des feux et ça le stressait beaucoup. Il disait des affaires qui n’ont pas d’allure. Il pensait que le gouvernement ne voulait pas qu’on aille en forêt parce qu’il mettait le feu pour ouvrir des mines de lithium. Il nous montrait des vidéos et il en parlait tous les midis.»
- Éric Asselin, collègue de Brian Paré chez Entretien industriel Éco
«Il était tout le temps dans le bois. C’est là qu’il était bien. On n’aurait pas pu faire grand-chose pour éviter ça.»
- Éric Corbin, propriétaire d’Entretien industriel Éco
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