Hydro-Québec: la demande d’électricité industrielle en baisse depuis 2006 au Québec
Hydro soutient que la situation a changé du tout au tout au cours des 18 derniers mois


David Descôteaux
Alors qu’Hydro-Québec répète être submergée de demandes pour son électricité, la demande des industries depuis 20 ans a pourtant stagné, totalisant à peine 0,1 % d’augmentation.
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Si on exclut la construction de la phase deux d’Aluminerie Alouette en 2005, dernier gros ajout pour la demande, c’est même une courbe négative qu’a suivie la demande industrielle d’électricité entre 2006 et 2022.
«Après 2006, on est négatif, effectivement», confirme Maxence Huard-Lefebvre, porte-parole d’Hydro-Québec. «On a eu une croissance de la demande au début des années 2000, notamment grâce au secteur minier, mais ensuite beaucoup d’usines de pâtes et papiers ont fermé ou réduit leur production. En tout, ça a représenté environ 8 TWh (térawattheures) de décroissance sur la demande.»
Changement de paradigme
Ce chiffre de 0,1 % est tiré du mémoire qu’Hydro-Québec a déposé devant la commission parlementaire chargée d’étudier le projet de loi 2, qui vise à plafonner le taux d’indexation des tarifs d’Hydro. Le chiffre surprend à première vue et donne l’impression qu’il n’y a eu aucun nouveau projet industriel au Québec depuis 20 ans.
«C’est un changement de paradigme total, qui est arrivé assez vite et qui a pris un peu tout le monde par surprise», explique Maxence Huard-Lefebvre. «Ce qui change, [c’est] que les joueurs industriels veulent se décarboner. Et les réseaux électriques aussi, notamment ceux encore alimentés par du charbon. Cette évolution-là de la demande, on ne la voyait pas dans nos plans stratégiques avant l’arrivée de Sophie Brochu. C’est dans les 18 derniers mois environ que cette demande-là s’est concrétisée», explique-t-il.
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Des surplus évaporés
C’est ce qui explique entre autres pourquoi le surplus de 40 TWh d’Hydro-Québec, dont on parlait encore en 2021, est devenu en quelques mois un manque à gagner de 100 TWh d’ici 2050. «Mais 2050, c’est encore loin, on a du temps pour s’adapter», note Maxence Huard-Lefebvre.
Rappelons que des entreprises, notamment dans les secteurs des batteries et de l’hydrogène vert, ont récemment transmis à Hydro-Québec des demandes d’alimentation totalisant 23 000 mégawatts, ce qui équivaudrait à la construction de 13 complexes comme celui de la rivière Romaine.
Dur de faire des affaires ici
Mais d’autres facteurs expliquent cette faible demande depuis 20 ans, notamment le coût global de faire des affaires au Québec.
«La main-d’œuvre est plus chère au Québec, les coûts de construction sont plus élevés, les coûts de conformité environnementale plus élevés, les coûts bureaucratiques plus lourds, les coûts de transport plus élevés à cause de la géographie, la fiscalité, etc. Ce sont toutes des raisons pourquoi peu d’usines sont construites ici», dit Jocelyn B. Allard, président de l’Association québécoise des consommateurs industriels d’électricité.
«Or, l’électricité, c’est notre avantage concurrentiel et il faut l’utiliser. Le tarif L et l’ensemble des tarifs d’électricité pourraient être plus bas, notamment en calculant de façon transparente et publique les coûts réels de produire, transporter et distribuer l’électricité par Hydro-Québec», explique-t-il.
Un énorme revirement de situation
- Entre 2000 et 2022 : hausse de seulement 0,1 % de la demande d’électricité des industries, une baisse a même été enregistrée entre 2006 et 2022
- 2022 : Hydro-Québec annonce des demandes d'alimentation par des entreprises totalisant 23 000 mégawatts
- Entre 2021 et 2022 : le surplus de 40 TWh estimé est devenu un manque à gagner de 100 TWh d’ici 2050
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