«Je ne veux pas mourir dans la rue»: une femme itinérante se confie à l'approche de l'hiver

Axel Tardieu
Après 12 ans dans la rue, Dominique Martel craint le pire pour les femmes en situation d'itinérance. Les services offerts par les refuges diminuent pour les femmes, même si elles représentent 30% de la population itinérante au Québec.
«L’hiver s’en vient et ça me fait peur. Beaucoup de femmes vont mourir dans la rue», s'inquiète Dominique Martel, une femme de 57 ans en situation d'itinérance.
«Il n'y en a pas de ressources pour les femmes», regrette-t-elle.
«Je trouve ça triste, parce que les hommes ont plus de ressources que nous et dans le fond, c’est nous les plus vulnérables, les femmes dans la rue», ajoute celle qui affirme s'être retrouvée dans la rue après avoir développé un des symptômes de trouble de stress post-traumatique après un évènement violent.
En entrevue à 24 heures, Dominique Martel raconte avoir arrêté de compter le nombre de «sœurs de rue» mortes à cause de la drogue ou du froid.
Comme sa maison
Dominique Martel essaie aujourd'hui de s’en sortir avec l’aide de La rue des Femmes. L’organisme l'héberge à la Maison Jacqueline, un de ses centres réservés aux femmes.
«C’est comme ma maison. Je ne vais pas vraiment ailleurs. T’as trois repas. T’as des intervenantes à qui parler», explique Dominique Martel. Elle peut y dormir trois nuits, mais doit ensuite laisser la place à d’autres avant de revenir trois jours plus tard.
Avant, elle pouvait aussi compter sur l'aide de Chez Doris, un autre organisme de Montréal pour femmes en situation de précarité et d’itinérance.
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Mais depuis fin septembre, Chez Doris a réduit ses services. L'organisme ne sert plus de repas et ce n'est plus possible d'aller chercher de l'aide auprès d'intervenantes. Seul reste ouvert le refuge de jour du lundi au vendredi.
«Si la Maison Jacqueline n’existait pas, ça ferait longtemps que je me serais suicidée», confie la femme sans-abri.
«Je ne veux pas mourir dans la rue. Je veux mourir dignement. Le gouvernement fait rien pour nous aider.»
Ce qui lui donne la force de continuer: sa petite-fille, avec qui elle voudrait reprendre contact. «C’est ma raison de vivre», dit celle qui compte suivre une thérapie cet hiver pour guérir ses blessures.

Pas assez de refuges
Selon le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal, les refus d’accès à des hébergements pour les femmes ont augmenté de plus de 70% au cours des 12 dernières années.
Pour répondre à la demande − et pour venir en aide aux femmes −, les organismes demandent ainsi plus d'argent de Québec.
Si les femmes représentent 29% de la population itinérante, les données d’Infrastructure Canada révèlent que seulement 13% des lits d’urgence au Québec se trouvent dans des centres réservés aux femmes.
C'est un problème, parce que bien des femmes qui sont dans la rue évitent les refuges mixtes.
«Elles ne veulent pas partager les mêmes espaces que les agresseurs et subissent des violences à l’intérieur comme à l’extérieur de ces centres», expliquent la coordinatrice à La rue des Femmes, Ann-Gaël Whiteman.
Si vous-même ou un de vos proches êtes en détresse:
► Appelez le 1 866 APPELLE (277-3553)
► Textez le 535353
► Clavardez sur suicide.ca