Irréaliste de penser payer le pont de l'île d'Orléans par péage
Un expert note le faible achalandage et le coût important de l'infrastructure

Stéphanie Martin
Il est irréaliste de penser amortir par un péage l'investissement de 2,75 milliards $ pour un pont de remplacement à l'île d'Orléans, estime un expert.
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«Si vous faites les calculs avec 12 000 passages sur le pont par jour et essayez d'amortir 2,75 milliards $ sur 30 ans, vous allez voir que ça fait cher le passage s'il fallait que le pont soit vu comme étant payé par ses usagers. Selon moi, ce n'est pas réaliste, c’est beaucoup trop cher pour que les usagers puissent le payer.»
C'est l'analyse que fait Jean-Philippe Meloche, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal, qui s'est penché, lors de ses récentes recherches, sur l'avenir des péages routiers au pays.
Professeur en urbanisme Photo d'archives
Coût très élevé par passage
Si on vise à rembourser la totalité de l'investissement par le péage, le coût par passage serait très élevé, note-t-il. Si tous les paramètres restaient constants, il en coûterait en effet autour de 20$ par passage et bien davantage si on excluait les quelque 7000 résidents de l'île.
Au Québec, il existe deux infrastructures à péage: le pont de l'autoroute 25 et le pont de l'autoroute 30, tous deux dans la région de Montréal. Deux infrastructures beaucoup plus achalandées que le pont de l'île et qui ont coûté moins cher.
Dilemme
Avec la nouvelle infrastructure à l’île d’Orléans, on se retrouve pris dans un dilemme, soutient M. Meloche.
«Ici, on est pris dans une situation impossible où on va faire un pont qui coûte trop cher par rapport aux gains potentiels qu'on peut en retirer en tant que société. Et on ne sera jamais capable de le faire payer par les usagers parce que c'est un pont qui n'a pas d'allure. Mais en même temps, la situation de ne pas mettre le pont n'a pas plus de sens. On ne peut pas décoloniser l'île d'Orléans. Ce n'est pas réaliste. On est mal pris, pris au piège dans une dépense d'infrastructure. Ça hypothèque beaucoup de faire un pont pour ces 7000 à 8000 habitants.»
Pour lui, l’appui des Québécois au péage est peu surprenant, puisque les gens préfèrent que le pont soit payé par ceux qui l’empruntent. Et ils se disent qu’ils ne seront pas soumis à ce tarif parce qu’ils ne le fréquenteront pas ou peu, dit-il. «Quand vous avez des ponts à très haut débit comme le pont Champlain, les gens vont se dire que s’il est payant, ils vont devoir un jour ou l’autre passer dessus.» L’appui au péage diminue alors.
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