Il plaide l’intoxication dans le but d’éviter une condamnation pour tentative de meurtre sur sa voisine de 82 ans
La consommation excessive de Roger Bergeron aurait modifié son comportement au point de soulever un doute raisonnable sur son intention réelle de tuer la victime, croit son avocat


Pierre-Paul Biron
Un homme de Québec qui a violemment battu sa voisine de 82 ans plaide l’intoxication volontaire pour tenter d’éviter une condamnation de tentative de meurtre. Son avocat estime que sa consommation d’alcool a suffisamment modifié son comportement pour soulever un doute raisonnable sur son intention réelle.
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Roger Bergeron est accusé d’avoir battu sa voisine de palier le soir du 3 mai 2023.
Irrité par les bruits émanant de l’appartement de la femme, particulièrement son apprentissage nocturne de la guitare, le septuagénaire aurait disjoncté et s’en est pris à la victime.
D’autres résidents de l’immeuble de l’avenue De Bourlamaque, témoins de l’agression, avaient décrit le comportement de Roger Bergeron comme celui d’un homme «complètement hystérique» à l’ouverture du procès à l’automne.
Comportement «hautement inhabituel»
Or, l’avocat de ce dernier a plaidé qu’une telle agressivité n’a rien à voir avec la personnalité de celui qui n’a aucun antécédent judiciaire.
Il rejette la faute de ce comportement violent sur l’importante quantité d’alcool que Bergeron a bue ce soir-là, lui qui avait l’habitude de «s’assommer» pour fuir le bruit causé tant par ses acouphènes récurrents que par sa voisine.
Me Sébastien St-Laurent a insisté lors de sa plaidoirie lundi sur le fait que son client a fait la preuve lors de son témoignage de sa personnalité non violente.
«Une telle rupture dans le comportement de monsieur démontre qu’il n’était pas dans son état habituel», soutient l’avocat.
Même les propos troublants qu’a tenus l’homme militent en ce sens, selon lui.
Rappelons que des témoins ont entendu Roger Bergeron répéter: «Je vais la tuer! Je vais la tuer!», à propos de sa voisine, Aline Dupré.
Il aurait aussi fait des verbalisations à un policier, soutenant qu’il aurait dû la battre «dès le début».
«Enfin, je vais bien dormir», aurait-il ajouté.
«Ce sont des propos qu’on a de la difficulté à lui attribuer aujourd’hui tellement ce n’est pas qui il est», a plaidé Me St-Laurent.
Perte de mémoire
Roger Bergeron a témoigné devant la juge Chantale Pelletier lundi.
Chétif, les épaules voûtées vers l’avant, la voix faible; l’homme de 70 ans détonne en effet avec «l’enragé» qu’ont décrit les témoins de l’agression.
Il dit n’avoir aucun souvenir après le moment où il a titubé vers sa chambre pour se mettre au lit après s’être enfilé des bières fortes et trois grands verres de brandy.
Une bouteille de 500 ml a d’ailleurs été retrouvée fracassée sur les lieux.
Son «réveil» a eu lieu à l’hôpital, dit-il, «perdu», «ahuri».
«Pour moi, lire le dossier, c’est comme lire un roman. Ça ne réveille rien en moi, c’est inimaginable d’avoir une perte de mémoire comme ça», a-t-il témoigné.
Le procureur au dossier a relevé des contradictions entre son témoignage et son interrogatoire policier, notamment quant à la quantité d’alcool bue qui s’est multipliée au procès.
Pour Me Alexandre Morency, le témoignage de Roger Bergeron ne devrait tout simplement pas être considéré par la juge sur ces aspects tant il semble servir uniquement la thèse de l’intoxication plaidée par la défense.
Voies de fait graves?
Mais Me Sébastien St-Laurent n’en démord pas.
Selon lui, l’intoxication excessive de son client et les changements qu’elle a provoqués dans son comportement le soir du 3 mai 2023 doivent soulever un doute raisonnable dans la tête de la juge Pelletier.
Surtout que le mobile du «bruit de la voisine» a été minimisé par l’accusé lors de son témoignage, lui qui s’est dit prêt à déménager.
Pour l’avocat, il est donc impossible de prouver que Roger Bergeron avait réellement l’intention consciente de tuer sa voisine, concluant que ses gestes se rapprochent plus du deuxième chef d’accusation porté, soit celui de voies de fait graves.
Roger Bergeron est détenu depuis son arrestation dans ce dossier.
La juge doit rendre sa décision le 19 juin.
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