Publicité
L'article provient de Le Journal de Montréal
Politique

«C’était une maudite cochonnerie»: un témoignage accablant de l’ex-contrôleur financier de la SAAQ à la commission Gallant

L’ex-contrôleur financier de la SAAQ a livré un témoignage accablant sur SAAQclic à la commission Gallant

Partager
Photo portrait de Nicolas Lachance

Nicolas Lachance

2025-05-29T17:13:55Z
Partager

La SAAQ aurait fermé les yeux sur le non-respect du contrat de SAAQclic, les risques de fraude, des taux horaires injustifiés de 350$ et des factures incomplètes, selon l’ex-contrôleur financier de l’organisation. «C’était une maudite cochonnerie», a déclaré Jérôme Verreault.

• À lire aussi: Contrat SAAQclic: «Perception de favoritisme» envers une entreprise

• À lire aussi: Lancement de SAAQclic: Le nouveau système est vulnérable aux attaques informatiques et ça ne semblait pas intéresser le PDG Éric Ducharme

À l’image des trois singes de la sagesse, la haute direction de la SAAQ ne voulait «rien entendre, rien voir et rien dire» sur les dérives du projet SAAQclic, et ce, dès 2018.

Le témoignage-choc de Jérôme Verreault, ancien contrôleur financier de la SAAQ, est troublant.

«Si on avait bien fait les choses tout au long des différentes phases de livraison... peut-être que la facture totale de 458 millions n’aurait pas été atteinte», a-t-il déclaré.

Publicité

Il a livré le fond de sa pensée devant la commission Gallant, chargée de faire la lumière sur le fiasco du projet SAAQclic.

M. Verreault a décrit en détail comment la direction du contrôle et des opérations financières ainsi que la vice-présidence aux finances avaient ignoré la mauvaise gestion du dossier.

Découragé, il a quitté l’organisation 18 mois après son arrivée.

«Mes notes n’étaient pas prises au sérieux», a-t-il affirmé sous serment.

Durant son témoignage, M. Verreault a dénigré le premier volet du projet CASA/SAAQclic qui a été livré en 2019.

Cette portion servait à gérer la comptabilité et la gestion des ressources humaines. Or, selon le témoin, elle ne remplissait son rôle qu’à 10% en matière de facturation.

«Des fois, je n’avais pas des mots tendres auprès de mes collègues. Je disais que c’était une maudite cochonnerie», a-t-il déclaré.

Le Vérificateur général du Québec a révélé que les dépenses prévues de 638M$ pour le projet SAAQclic allaient finalement dépasser 1,1G$.

Des salaires injustifiés

Selon lui, ni la SAAQ ni l’Alliance SAP-LGS n’ont respecté le contrat.

L’ex-PDG Nathalie Tremblay et le vice-président Karl Malenfant soutenaient que le contrat était plafonné à 458 M$ et que l’Alliance travaillerait gratuitement au-delà de ce montant. Pourtant, la facturation démontrait le contraire.

«L’Alliance avait faim et voulait être nourrie par les fonds de la SAAQ», a-t-il lancé. «Plus rien n’était conforme au contrat.»

Par exemple, les ressources de l’Alliance étaient rémunérées pour corriger les anomalies détectées lors des tests, bien qu’elles soient responsables de ces bogues.

Publicité

Un consultant recevait 100$ par «plage», une notion qui n’était pas définie dans le contrat, a précisé M. Verreault.

Le commissaire Gallant a tourné cette situation en dérision par une analogie.

«T’es responsable de me livrer quelque chose qui marche, ça ne marche pas, je te repaye encore. Mon plombier est venu pour faire le job, je le rappelle, puis il me charge encore là», a illustré Denis Gallant.

14M$ de trop

Dès 2018, les vérificateurs internes de la SAAQ ont tiré la sonnette d’alarme: certaines ressources, initialement payées 82$ l’heure, étaient désormais facturées à 350$ l’heure, après avoir obtenu sans justification solide le profil «expertise de pointe».

Chargé d’analyser ce changement, Jérôme Verreault a rédigé un rapport confirmant que 26 des 50 ressources n’auraient jamais dû obtenir ce titre. Résultat: la modification a coûté plus de 14,5 millions $ supplémentaires par an à la SAAQ.

M. Verreault n’a jamais reçu de justification valable. «C’est encore obscur à ce jour pour moi», a-t-il confié.

Par ailleurs, certaines factures soumises par l’Alliance ne comportaient aucune justification.

«Il manquait une note détaillant le travail effectué par le Bureau de programme», a-t-il écrit dans un rapport remis à ses supérieurs.

Malgré cela, l’organisation payait les factures, ce qui représentait un risque de fraude, a-t-il reconnu.

Pire encore, les honoraires de la firme externe Ernst & Young (EY) étaient facturés par l’Alliance directement à la SAAQ.

«Cela peut nuire à l’indépendance de la firme, ou du moins à son apparence», avait-il également noté.

Vous avez un scoop à nous transmettre?

Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?

Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.

Publicité
Publicité