Feux de forêt: «La moindre étincelle suffit» pour que la situation au Québec s’envenime
Raphaël Pirro
Tous les éléments sont réunis pour que le Québec s’embrase comme l’ouest du pays et la Nouvelle-Écosse, alors que la province connaît un «indice d’inflammabilité extrême».
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«Précipitations, humidité, vitesse des vents: ce cocktail fait en sorte que tout est extrême. La moindre étincelle suffit», a expliqué Mélanie Morin, porte-parole de la SOPFEU (Société de protection des forêts contre le feu), en entrevue avec l’Agence QMI.
Des dommages sont déjà évidents, comme en font foi les 250 000 clients privés d’électricité en raison des feux qui affectent les infrastructures d’Hydro-Québec sur la Côte-Nord. Le nombre d'incendies sur le territoire québécois fluctuait aux alentours de 70 en fin d'après-midi jeudi, selon les chiffres de la SOPFEU.
Les prévisions météo ne sont rien pour aider: les prochaines précipitations sont attendues seulement au courant de la semaine prochaine. Bien qu’il s’agisse de la saison des incendies, «ça fait quelques années qu’on n’en a pas connu autant pendant cette période», a relaté Mme Morin.
La sécheresse est telle que Québec a publié un avertissement pour «restreindre au maximum les déplacements en forêt au cours des prochains jours». Les feux à ciel ouvert en forêt ou à proximité sont déjà interdits «sur tout le territoire».
Les 350 employés saisonniers de la SOPFEU, pour la majorité des pompiers spécialisés en feux de forêt, sont actuellement à pied d’œuvre, de même que les 15 avions-citernes et les hélicoptères qui permettent les déplacements sur le territoire.
Les pompiers québécois ont pu dépanner l’Alberta au début du mois de mai, mais la situation au Québec requiert désormais l’ensemble du personnel disponible.
«Nous reconnaissons que la situation évolue rapidement et nous gardons un œil attentif sur le Québec alors que les incendies commencent à toucher la province», a déclaré Stéphane Lauzon, secrétaire parlementaire au Développement économique rural à Ottawa.
Les communautés cries de la Première Nation de Waskaganish et la bande des Innus de Pessamit sont les plus à risque étant donné leur proximité avec les zones affectées.
Après l’ouest du pays et les provinces de l’Alberta et de la Saskatchewan en début mai, c’est au tour de l’est du pays et de la Nouvelle-Écosse d’être touchés par des «feux sans précédent».
«Ces conditions, à ce stade de la saison, sont absolument sans précédent et évidemment sont source de préoccupation», a déclaré Bill Blair, ministre canadien de la Sécurité publique.
Actuellement, 211 feux de forêt font rage dans le pays et 82 sont hors contrôle, a-t-il précisé.
«On sait qu’on est dans une trajectoire où il va y avoir de plus en plus d’incendies», a affirmé Yves Bergeron, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en écologie et aménagement forestier et professeur à l’UQAM et l’UQAT.
Les projections climatiques pointent vers deux tendances qui aggraveront forcément les feux de forêt au Québec: des hivers plus courts, synonymes de saisons des feux plus longues, ainsi qu’une fréquence plus élevée de feux sur le territoire.
Des feux dévastateurs dans l’Ouest canadien et en Nouvelle-Écosse
L’équivalent d’environ 5 millions de terrains de football a été réduit en cendres par des feux de forêt particulièrement intenses depuis le début de l’année au pays, et c’est surtout les provinces de l’Ouest canadien et maintenant la Nouvelle-Écosse qui en font les frais.
Depuis le 10 mai, 450 militaires sont déployés en Alberta, alors que d’autres sont en route vers la Nouvelle-Écosse, dont la demande d’aide a été reçue et approuvée jeudi.
Avec 16 feux actifs, la province des Maritimes connaît une saison particulièrement dévastatrice: plus de 16 000 personnes ont dû être évacuées de la banlieue principale d’Halifax, tandis qu’un feu près du lac Barrington a déjà ravagé 20 000 hectares, ce qui en fait le feu le plus important de l’histoire de la Nouvelle-Écosse.
En plus des Forces armées canadiennes, la Garde côtière canadienne prêtera main-forte pour le transport de personnel, le ministère des Transports fera de la surveillance aérienne et l’Agence de santé publique du Canada fournira des lits et des couvertures aux personnes forcées de fuir.
«Nous sommes loin d’être sortis d’affaire. Nous sommes toujours confrontés à une situation très dangereuse et volatile», a expliqué David Steeves du ministère des Ressources naturelles de la Nouvelle-Écosse.