Les valeurs foncières augmentent de 32,4% sur l’île de Montréal
Il s’agit de la plus importante hausse de valeur que Montréal a connue depuis 2007

Martin Jolicoeur et Julien McEvoy
Comme anticipé, la surchauffe du marché immobilier aura fait exploser la valeur des propriétés à Montréal avec un imposant bond de 32,4 %, sa plus forte croissance depuis 15 ans.
Martin Jolicoeur, Le Journal de Montréal
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Les anciennes municipalités défusionnées de Montréal-Est, Senneville et Dollard-Des Ormeaux connaissent les hausses les plus marquées avec des progressions stratosphériques de 52,5 %, 45,9 %, et 45,1 % en incluant le non-résidentiel.
À Montréal, ce sont les arrondissements de Lachine et Pierrefonds-Roxboro qui remportent la palme avec des progressions respectives de 42,6 % et 40,8 %.
Jamais depuis 2007, le rôle d’évaluation foncière de l’agglomération de Montréal – qui regroupe 16 villes et 19 arrondissements – n’avait connu pareille augmentation. Cette année-là, le rôle avait crû de 38,6 %. Il y a trois ans, la valeur des immeubles inscrits au rôle avait connu une hausse globale de seulement 13,7 %.
Selon le dernier rôle d’évaluation foncière, présenté mercredi, ce sont les résidences unifamiliales qui ont connu la plus forte croissance de valeur, mis à part les terrains vacants et les immeubles industriels.
Leur croissance a connu une augmentation de 38,6 %, tandis que les copropriétés ont connu une hausse de valeur de 30,7 % en moyenne. Pour leur part, la valeur des plex, ces petits immeubles à revenus de deux à cinq logements, a connu une hausse de 35,5 %.
- Écoutez l'entrevue avec Aref Salem, chef de l’opposition officielle de la Ville de Montréal sur QUB radio :
Prochaine base d’imposition
Les immeubles non résidentiels affichent quant à eux une augmentation moyenne de 25,7 %. C’est dans la catégorie des immeubles industriels que l’on retrouve la plus importante progression de valeurs, avec une croissance de 60,5 %.
Certaines catégories d’immeubles non résidentiels, fortement touchés par le ralentissement occasionné par la COVID-19, affichent une augmentation de valeur inférieure à la moyenne.
C’est le cas de centres commerciaux, d’immeubles de bureaux et de certains autres immeubles à vocation plus touristique, comme les hôtels. Par exemple, les centres commerciaux ont vu leur valeur décroître de 2,1 % en moyenne depuis 2018.
- Écoutez le segment économique d'Yves Daoust diffusé chaque jour en direct 9 h 35 via QUB radio :
Ces valeurs refléteraient l’état du marché, tel qu’il se présentait à Montréal au 1er juillet 2021. Elles seront utilisées comme base d’imposition foncière, à compter du 1er janvier prochain, pour les exercices financiers de 2023, 2024 et 2025.
► L’arrondissement Ville-Marie, qui correspond au centre-ville de Montréal, a connu une croissance de seulement 15,7 %, la plus faible de l’île de Montréal. Cette dernière s’expliquerait principalement par la grande concentration d’immeubles commerciaux et de bureaux sur son territoire, deux catégories parmi les plus durement affectées par la pandémie.
Rien pour atténuer la crise du logement
C’est certain que le nouveau rôle foncier de Montréal va aggraver la crise du logement, reconnaît l’ensemble des acteurs du milieu.
Julien McEvoy, Le Journal de Montréal
« La valeur des plex augmente plus vite que la moyenne », constate la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ).
CORPIQ
Ce qui veut dire que le compte de taxes foncières des propriétaires de duplex, triplex et quadruplex à Montréal va bondir.
« Les augmentations de taxes foncières sont 100 % refilées aux locataires », rappelle le porte-parole de la CORPIQ, Marc-André Plante.
Ce que confirme aussi le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU).
« Ce sont les locataires qui payent les taxes municipales », insiste Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU.
La méthode de calcul pour les augmentations de loyer est ce qu’elle est, répond la CORPIQ, qui ne pourrait pas être accusée de faire les règles.
- Écoutez l'édito économique de Michel Girard diffusé chaque jour en direct 7 h 35 à QUB radio :
Plusieurs hausses
Évidemment, cela ne veut pas dire 32 % d’augmentation, comme celle de la valeur des propriétés.
Mais ça veut certainement dire que les loyers à Montréal, où 63 % des gens sont locataires, vont bondir.
« Les loyers ont déjà beaucoup augmenté. Les locataires sont déjà pris à la gorge », illustre Véronique Laflamme.
Pour la CORPIQ, la nouvelle tombe à point, soit en pleine campagne électorale.
« On demande à Québec de faire des états généraux sur la question du logement. Il y a une crise et on se doit de la régler », réagit Marc-André Plante.
Dans la marge
Si la question ne se règle pas et que les loyers ne font qu’augmenter, « on va laisser des gens dans la marge », assure-t-il.
Le FRAPRU est d’accord.
« On a l’impression qu’on ne s’adresse pas aux locataires dans le contexte de l’inflation. On va envoyer des chèques, mais ça ne règle rien, car les loyers augmentent », plaide Mme Laflamme.
200 000 $ DE HAUSSE

Ce condo de 54 m2 au rez-de-chaussée de la rue Saint-Joseph Est, sur Le Plateau-Mont-Royal, a subi toute une hausse, comme la plupart des immeubles de l’île. Reste à voir comment ça va se traduire sur le compte de taxes...
Ancienne évaluation 469 800 $
Nouvelle évaluation 662 400 $
Attachez votre tuque pour la hausse de taxes foncières

La valeur des propriétés de l’île de Montréal a bondi de 32,4 % en trois ans. Les conséquences monétaires pour les propriétaires seront importantes, reconnaît l’administration Plante.
Julien McEvoy, Le Journal de Montréal
« On ne va pas augmenter les taxes foncières de 32 % », lance d’emblée la responsable du dossier, Dominique Ollivier, présidente du comité exécutif de la Ville.
Elle réagissait au dévoilement du nouveau rôle foncier, un exercice qui a lieu chaque trois ans.
Les plex, les maisons et les condos ont tellement pris de valeur à Montréal que le défi, maintenant, est de savoir de combien l’impôt foncier va augmenter.
« Chaque fois qu’on reçoit le rôle foncier, on diminue la taxe foncière », dit-elle.
Oui, mais combien ?
L’inverse serait aberrant. Mais la vraie question, c’est de savoir de combien va augmenter le compte de taxes de ceux dont la valeur de la propriété a explosé.
Tous ceux dont la propriété a pris plus de valeur que la moyenne seront touchés. Ils peuvent aller consulter l’état des choses sur le site de la Ville.
Dix-huit arrondissements sur 19 sont touchés et c’est dans le prochain budget, dévoilé fin novembre, qu’on va connaître l’augmentation de la taxe foncière.
« On ne peut pas aller plus haut que 3 % », a commenté mercredi le chef de l’opposition, Aref Salem.
Ce qui a fait bondir l’administration. « Notre administration va faire le nécessaire pour limiter les augmentations de taxes tout en respectant les besoins et responsabilités de la Ville », répond le cabinet de la mairesse Valérie Plante.
Capacité de payer
Dominique Ollivier a aussi beaucoup insisté sur « la capacité de payer des Montréalais ».
C’était sa ligne de communication pour rappeler que les propriétaires, grâce à l’impôt foncier, payent déjà plus de 60 % du budget de la Ville.
« Ce n’est pas viable de demander aux propriétaires de payer plus de 60 % de notre budget », a-t-elle répété 10 fois plutôt qu’une.
Reste que, quand viendra novembre, l’augmentation sera salée. La présidente du comité exécutif, une femme transparente et intègre de l’avis de tous, ne s’est pas faite très rassurante.
« On n’a jamais dit qu’on allait limiter la hausse de taxes foncières à 3 %, mais je pense qu’on n’ira pas à 8 %, ce serait très surprenant », a-t-elle affirmé.
Les Montréalais peuvent donc s’attendre à une hausse de taxe foncière de l’ordre de 3 % à 8 % en 2023. Qu’ils se le tiennent pour dit.
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