Epstein et Trump: de l’État profond à l’État superficiel


Loïc Tassé
Si j’étais Ghislaine Maxwell, je craindrais pour ma vie. Énormément. Maxwell purge une peine de 20 ans de prison à cause de son association avec Jeffrey Epstein dans ses affaires crapuleuses. Elle pourrait détenir des informations susceptibles d’embarrasser Donald Trump.
Elle vient de subir pendant deux jours un interrogatoire mené par Todd Blanche, aujourd’hui vice-procureur général et, surtout, ex-avocat de Trump. Cherche-t-il une entente avec elle pour rassurer les adeptes trumpistes des théories du complot?
Maxwell coordonnait le réseau de prostitution d’Epstein. Elle connaît les noms et les goûts particuliers de certains clients. Mais que vaut sa parole étant donné ses mensonges devant les tribunaux?
Suicide maquillé?
S’il y a quelque chose de potentiellement vrai dans le fatras de théories complotistes des croyants du mouvement MAGA, c’est bien le possible maquillage du suicide d’Epstein.
Cet homme, emprisonné dans une cellule dite anti-suicide, serait malgré tout parvenu à se suicider? La veille, il avait été privé de son compagnon de cellule et ce dernier n’avait pas été remplacé. Au moment de son suicide, les gardiens n’ont effectué aucune ronde pendant 3 heures, alors qu’ils devaient le faire toutes les 30 minutes. Le médecin légiste a diagnostiqué chez Epstein une fracture de la pomme d’Adam, une blessure qui normalement ne découle pas d’une pendaison, mais d’un étranglement.
Le magazine Wired vient d’analyser les vidéos de surveillance de la prison où Esptein était emprisonné. Sa conclusion est qu’elles ont été manipulées et qu’il y manque environ trois minutes.
Or, le Département de la Justice des États-Unis a déclaré que ces vidéos étaient intègres. Cela est faux.
Aucun élément précédent ne permet à lui seul de conclure à un assassinat. Cependant, leur coïncidence est préoccupante. Elle nourrit les théories complotistes portant sur de supposées manipulations à l’intérieur de l’État américain. L’État dit «profond».
Trump complotiste
Trump s’est fait le champion de la lutte contre ces prétendues manipulations.
Les complotistes républicains sont donc très déçus de la tournure des événements. Selon eux, Trump devrait vigoureusement dénoncer les incohérences autour du suicide d’Epstein.
S’il ne le fait pas, c’est donc peut-être qu’il est lui-même impliqué dans le complot.
Cela pourrait inciter ces fanatiques du complot à ne pas voter pour les républicains aux prochaines élections de mi-mandat. Ils sont assez nombreux pour priver les républicains de leur majorité.
Détourner l’attention
En contrepartie, l’affaire Esptein, qui n’en finit plus de rebondir, éloigne l’attention des médias sur des problèmes beaucoup plus importants.
L’Ukraine, Gaza, les tarifs douaniers, la rivalité avec la Chine, la dette, l’environnement, pour ne mentionner que ceux-là, sont relégués au second plan.
Trump lui-même tente de détourner l’attention avec son voyage en Écosse ou ses attaques contre le président de la Réserve fédérale.
En fait, la seconde administration de Trump n’encourage pas la consolidation d’un hypothétique État profond, mais plutôt celle d’un État superficiel.