PKP nouveau propriétaire des Alouettes: «Je suis un fier Montréalais»
Philippe Asselin
MONTRÉAL – Pour la première fois en 36 ans, les Alouettes sont la propriété d’un Québécois: Pierre Karl Péladeau.
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Le président et chef de la direction de Québecor en a fait l’annonce vendredi, dans une conférence de presse pendant laquelle il était accompagné du commissaire de la Ligue canadienne de football (LCF), Randy Ambrosie.
Quand le nom de M. Péladeau a commencé à être mentionné dans les rumeurs d’acquisition, plusieurs ont soulevé des interrogations sur les difficultés financières des Alouettes, qui perdent des millions de dollars chaque année, et sur le fait que les droits de télédiffusion appartiennent à un compétiteur.
«Il ne s’agit pas d’une opération financière ou économique, mais de fierté, a déclaré M. Péladeau. Mon engagement est à long terme. C’est une vision qui se déclinera au fil du temps.»
«Je suis un fier Montréalais. Je suis né à Montréal, à Cartierville. J’ai eu le privilège d’étudier à Montréal. [...] Je tiens à le dire, car l’essor du football universitaire au Québec depuis des décennies est très important et c’est dans cette foulée que mon acquisition des Alouettes s’inscrit», a-t-il ajouté.
«En tant que président et chef de la direction de l’une des plus grosses entreprises montréalaises et comme individu, je crois que je peux amener quelque chose aux Alouettes. Voici pourquoi j’ai décidé de m’impliquer. Le sport, ça rassemble! Les gens se rassemblent dans la fierté qu’ils partagent pour leur équipe.»
- Écoutez l'entrevue avec Annie Larouche, vice-présidente opérations de l’équipe de basketball Alliance de Montréal et ex-responsable de l’équipe de meneuses de claque pour les Alouettes de Montréal durant 25 ans sur QUB radio:
Une première en plus de 30 ans
M. Péladeau a acheté le club de la métropole en son nom personnel, ce qui fait de lui le premier propriétaire québécois de la concession depuis Charles Bronfman.
Ce dernier a possédé les Alouettes, qui ont été rebaptisés les Concordes pendant quelques années, de 1982 jusqu’à la dissolution de l’équipe avant la saison 1987.
L’homme d’affaires devient également le premier propriétaire francophone des «Als» depuis le fondateur Léo Dandurand, aux commandes de 1946 à 1953.
Le président par intérim des Alouettes, Mario Cecchini, a résumé ce que signifie l’arrivée de M. Péladeau pour les partisans du club.
«C’est quelqu’un ayant à cœur sa communauté. Il va se faire parler de son équipe par les amateurs quand il va aller au dépanneur. Ce sera une motivation supplémentaire pour livrer un produit et un service exceptionnel», a affirmé celui qui quittera les Alouettes dans les prochaines semaines pour assumer ses nouvelles fonctions de commissaire de la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ).
De l’expertise
À plusieurs reprises, M, Péladeau a indiqué qu’il avait l’intention «d’investir pour avoir une équipe gagnante».
C’est pour cette raison qu’il a choisi d’acheter l’organisation en son nom personnel.
Il ne s’empêchera toutefois pas de bénéficier de l’expertise du secteur Sports et divertissement de Québecor Média, qui possède notamment les Remparts de Québec et l’Armada de Blainville-Boisbriand, deux formations de la LHJMQ.
«Cela nous permettra d’amener de la faveur ajoutée. Ce sera important d’investir pour avoir l’une des meilleures équipes de la ligue sur le terrain, mais la commercialisation sera également très importante.»
En résumé, M. Péladeau souhaite que les amateurs de football de la province aient accès aux acteurs de son club.
«Nous voulons que les citoyens de Montréal et du Québec soient encore plus fiers de leur équipe. Nous avons les moyens et les outils pour faire en sorte que cette proximité soit encore plus importante», a soutenu M. Péladeau.
La fin d’une période sombre

L’arrivée de Pierre Karl Péladeau chez les Alouettes met officiellement fin à une période peu glorieuse en ce qui concerne les propriétaires de l’équipe.
La LCF a mis les «Als» sous tutelle le 14 février dernier, après un fiasco qui a duré près de trois ans.
Le club de Montréal avait été vendu à deux hommes d’affaires ontariens en décembre 2019, soit Sid Spiegel et son gendre Gary Stern.
Le premier, qui possédait 75% des parts de l’équipe, est décédé en 2021 et sa succession n’a jamais vraiment été intéressée par les Alouettes.
De la bisbille entre cette dernière et Stern a mis plusieurs bâtons dans les roues des dirigeants des «Moineaux».
À la fin de ce règne, le directeur général Danny Maciocia n’avait même plus la permission d’offrir des contrats à des joueurs, ce qui a grandement complexifié son boulot lors de l’ouverture du marché des joueurs autonomes.
Fidèle à lui-même, le commissaire Randy Ambrosie n’a pas admis que son circuit avait commis une erreur en choisissant des Ontariens il y a trois ans. Il les a plutôt remerciés d’avoir gardé le fort pendant la saison annulée en 2020 et la campagne écourtée en 2021.
Sa façon de parler de M. Péladeau en disait toutefois beaucoup sur ce qui différencie ce dernier de ses prédécesseurs.
«Quand Pierre Karl a eu l’opportunité de rencontrer nos gouverneurs, c’est sa passion à l’endroit de Montréal, du Québec et de sa communauté qui est ressortie du lot. [...] L’un des éléments que nous avons le plus apprécié, c’est son engagement sur le long terme envers les Alouettes», a déclaré Ambrosie.

Un président ou une présidente
En achetant les Alouettes, M. Péladeau met la main sur une organisation qui loue toutes ses installations, dont les bureaux du personnel administratif au stade où elle dispute ses matchs.
Beaucoup de questionnements entoureront cette situation dans les mois à venir, mais la prochaine étape sera d’embaucher un président ou une présidente. Il faut d’ailleurs s’attendre à ce qu’une nomination se fasse assez rapidement.
«Nous ne sommes pas en mesure d’en faire l’annonce, mais ça arrivera dans un avenir rapproché», a affirmé M. Péladeau.
«Nous cherchons un homme ou une femme d’expérience dans son métier. Ce métier-là, c’est le football ou le sport professionnel. L’aspect marketing sera également important. [...] C’est le profil que nous cherchons chez les candidats et candidates que nous avons déjà identifiés.»
Mentionné par le collègue Éric Leblanc, le nom d’Annie Larouche a fait réagir.
Cette dernière est actuellement la vice-présidente aux opérations chez l’Alliance de Montréal. Disons simplement qu’elle a «le profil».
M. Péladeau a aussi tenu à souligner la besogne qu’a abattue l’actuel président par intérim des Alouettes, Mario Cecchini.
Ce dernier a fait des miracles pour redresser la situation financière de l’équipe, malgré la pandémie et l’attitude des anciens propriétaires.
«Je tiens à remercier très sincèrement Mario, qui a tenu le fort dans cette période d’instabilité», a-t-il dit à propos de l’homme qui assurera la transition pour encore quelques semaines.

De Léo Dandurand à PKP
Il faut remonter à plus d’un demi-siècle pour parler de la dernière fois qu’un Montréalais francophone a possédé les Alouettes.
Avant Pierre Karl Péladeau, un seul homme possédait ces deux caractéristiques: Léo Dandurand.
L’ancien copropriétaire du Canadien de Montréal (1921 à 1935) a fondé les «Als» en compagnie du Torontois Eric Cradock et de l’Américain Lew Hayman en 1946.
Huit ans plus tard, c’est un autre Montréalais, mais anglophone, qui a acheté l’équipe.
En effet, l’homme d’affaires Ted Workman est devenu l’actionnaire principal des «Moineaux».
Les Alouettes n'ont pas connu beaucoup de succès sous Workman, qui a décidé de ventre ses parts à Joe Atwell en 1967.
Le natif de Hamilton était l’un des propriétaires minoritaires du club depuis déjà deux ans à ce moment.
En deux saisons sous la gouverne d’Atwell, les «Als» n’ont jamais participé aux éliminatoires. Il a vendu son équipe à l’Ottavien Sam Berger après la campagne 1969.
À ce moment, Berger a choisi de vendre ses parts dans une autre équipe de la LCF, soit les Rough Riders d’Ottawa.
Les Alouettes ont connu d’excellents moments sous son régime de 12 ans (1969 à 1981), remportant au passage trois coupes Grey.
En 1981, à l’âge de 81 ans, Berger a vendu l’équipe à l’homme d’affaires de Vancouver Nelson Skalbania, connu notamment pour avoir fait signer un contrat à un Wayne Gretzky de 17 ans pour l’attirer dans l’Association mondiale de hockey.
Avec les Alouettes, il a dépensé une fortune pour charmer des vedettes de la NFL. Il n’obtiendra cependant pas le succès escompté. Un an après son acquisition, l’équipe est endettée pour plus de cinq millions $.
Dans ce contexte, la LCF dissout l’organisation.
Le propriétaire des Expos de Montréal de l’époque, le richissime Montréalais anglophone Charles Bronfman, a aussitôt pris les rênes d’une nouvelle organisation à Montréal.
Pour des raisons légales, l’équipe ne pouvait pas prendre le nom des Alouettes et est baptisée les Concordes jusqu’en 1986.
En grande difficulté financière, l'équipe a mis finalement la clé sous la porte le 25 juin 1987, tout juste avant le début de la saison.
Les amateurs montréalais ont dû attendre jusqu’à 1996 pour renouer avec leur équipe de football.
Cette année-là, les Stallions de Baltimore ont déménagé à Montréal et ont pris le nom des Alouettes.
Le club est acheté en 1997 par un groupe d’investisseurs dirigé par Robert C. Wetenhall.
Deux décennies plus tard, soit en 2019, la famille Wetenhall a vendu les «Als» à la LCF, pour que cette dernière trouve de nouveaux acheteurs.
Quelques mois plus tard, les Ontariens Sid Spiegel et Gary Stern achetaient l’équipe à la ligue.
Cela s’est finalement avéré un échec après le décès du premier et le manque d’intérêt flagrant de sa succession.
Ce qu'ils ont dit
«C’est un engagement personnel que Pierre Karl prend et je trouve ça particulièrement rassurant pour les employés, les partisans et les commanditaires.» - Le président par intérim des Alouettes, Mario Cecchini
«C’est excitant d’avoir quelqu’un d’aussi passionné et de compétent. C’était inspirant de le voir parler avec fierté de Montréal et des Alouettes.» - Le coordonnateur offensif et l’entraîneur des quarts-arrières des Alouettes, Anthony Calvillo
«Dans un esprit de pragmatisme et de fierté montréalaise, il n'y a absolument rien de négatif à dire sur l'achat des Alouettes par Pierre Karl Péladeau. Quand on se noie, on ne critique pas le sauveteur qui nous sauve. Les Alouettes sont sauvés. C'est une bonne journée.» - L’homme d’affaires montréalais Mitch Garber
«C’est la plus belle annonce qu’on pouvait avoir pour les Alouettes. Ce dont ils ont besoin depuis longtemps, c’est de la stabilité, des propriétaires québécois qui connaissent non seulement le milieu des affaires, mais aussi le milieu du divertissement, parce que c’est ce que c’est.» - L’ex-joueur des Alouettes Étienne Boulay
«Une bonne nouvelle pour la relance des Alouettes» - Le député péquiste Pascal Bérubé
«Pas mal de bonnes nouvelles en une! Le désir de suivre le football de la LCF, l’ami Pierre Karl Péladeau propriétaire d’une grande équipe, le sentiment que les Québécois y brilleront et s’y reconnaîtront. Bravo Pierre Karl!» - Le chef du Bloc Québécois, Yves-François Blanchet
«Une excellente nouvelle! Les Alouettes de Montréal de retour entre les mains d'un propriétaire fièrement Québécois! Mon ami Pierre Karl Péladeau saura certainement ramener au sein de l'équipe une administration forte qui priorisera le talent québécois. Bien hâte de voir ça sur le terrain!» - Alain Therrien, député du Bloc Québécois
«Les Alouettes de Montréal reviennent à la maison avec son acquisition par Pierre Karl Péladeau. Soyons fiers que le club revienne en force pour la saison 2023, ici même, à Montréal. L'histoire d'amour entre la population montréalaise et le football continue de durer!» - Valérie Plante, mairesse de Montréal
«L’organisation de l’Armada tient à féliciter notre partenaire et actionnaire Pierre Karl Péladeau pour l’acquisition des Alouettes de Montréal et pour son engagement envers la communauté de la grande région de Montréal!» - L’Armada de Blainville-Boisbriand, via son compte Facebook
«Notre objectif dans ce processus était de mettre les Alouettes sur la voie du succès à long terme, avec un actionnariat local et solide. Ce but a été atteint. C'est une journée spéciale pour cette concession, ainsi que pour ses partisans à Montréal et aux quatre coins du Québec. La passion de Pierre Karl pour le sport, pour le divertissement et pour sa communauté est remarquable. Je sais qu'il fera un travail formidable pour guider les Alouettes» - Le commissaire de la LCF, Randy Ambrosie
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