Elle parle à Isabelle Maréchal et se fait mettre en demeure par la DPJ
Alice Fournier
Une mère a reçu mercredi matin une mise en demeure de la DPJ pour avoir parlé de la détresse de sa fille à l’émission d’Isabelle Maréchal à QUB diffusé au 99,5 FM.
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«Ça fait un an qu’on me dit de me taire», souffle Julie* en larmes. Élise*, sa fille de 14 ans prise en charge par la DPJ, a tenté de mettre fin à ses jours dans le Centre jeunesse de Laval, mardi. Conduite à la Cité-de-la-Santé, elle doit être transférée vers Rivière-des-Prairies dans la journée.
«Va-t-on attendre le décès de ma fille avant de considérer l’urgence de la retirer de ces centres?» demande sa mère, qui se sent forcée de témoigner sous couvert de l’anonymat par peur de représailles de la part des centres jeunesse.
«Je vais virer folle, il faut sortir ma fille de là», lance-t-elle comme un cri du cœur au micro d’Isabelle Maréchal. Elle n’a aucun retour de la part de l’avocat qui représente son enfant. Le sien dit ne pas être disponible.
Julie habite à Chandler, en Gaspésie. Il a fallu plus de 24 heures avant qu’on lui dise qu’Élise allait être transférée à nouveau au Centre jeunesse de Laval. La DPJ l’a mise en encadrement intensif à cause de son comportement autodestructeur.
«Mais mon enfant va toujours réagir comme ça... donc elle ne sortira jamais?» interpelle Julie.
Séjours traumatisants
Les séjours d’Élise dans les centres jeunesse ont empiré l’état de la jeune fille. Elle a confié à sa mère avoir subi une fouille à nu et d’autres attouchements.
En décembre dernier, elle s’est retrouvée en situation de crise. Julie a tenté de la faire hospitaliser, mais les intervenants en santé auraient menacé la jeune fille de la retourner en Centre jeunesse si «elle ne parvenait pas à se gérer». Le lendemain matin, Julie l’a retrouvée en train de se tailler les bras.
«Plus l’enfant réagit, plus on l’éloigne de sa famille, et plus c’est un cercle vicieux qui n’en finit plus. On n’arrive pas à les sortir de là», déplore l’avocate en droits de la famille, Me Valérie Assouline.
Au Centre, Élise a caché des médicaments. Elle se cognait la tête sur les murs à répétition. Selon sa mère, on a ignoré le comportement de sa fille qui «voulait se détruire».
Processus sans fin
Intimidée à l’école, l’adolescente a subi 23 déplacements entre les hôpitaux et les Centres jeunesse en seulement deux ans. Elle a développé un comportement de défense agressif à l’école à partir de sa 6e année en raison d’intimidations répétées. C’est à ce moment que la DPJ est intervenue.
Selon un rapport complémentaire médical du Centre de pédopsychiatrie de Québec datant du 20 septembre 2024, le psychiatre écrit qu’«une tentative de retour dans le milieu familial nous apparaissait actuellement l’option la plus viable à moyen terme». Une décision ignorée par la DPJ. Me Assouline est sans appel: l’enfant doit retourner dans sa famille.
«Ma fille, un simple câlin suffit à la calmer et à l’apaiser», soupire Julie.
«C’est un système répressif qui fait penser au système carcéral, avec des petites cellules où on enferme les enfants... [un système] qui les victimisent à nouveau», s’exclame l’autrice Nancy Audet, ex-enfant de la DPG.
Mme Audet rappelle que la DPJ compte de bons intervenants, mais se demande comment un système censé protéger les enfants peut leur faire subir une telle situation.
Ce matin, le gouvernement a mis sous tutelle la DPJ de la Mauricie et du Centre-du-Québec. Cette décision survient alors que d’autres abus ont été dévoilés dans les médias. Le ministre des Services sociaux Lionel Carmant a confirmé que des inspections seraient effectuées dans tout le Québec.
*Julie et Élise sont des prénoms fictifs utilisés pour protéger l’anonymat des témoignages.