Drummondville en feu sur le marché immobilier: les acheteurs se ruent vers la ville aux maisons abordables

Amanda Moisan
Des Québécois fuient les prix fous de Montréal et prennent l'autoroute 20, direction Drummondville, où les maisons s’arrachent comme des billets de loterie. Avec une hausse explosive de 33% des ventes au premier trimestre – deux fois plus qu’à Montréal –, la ville devient le nouvel eldorado des acheteurs en quête d’un chez-soi abordable.
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Cette explosion de la demande à Drummondville contraste fortement avec la performance des autres marchés immobiliers québécois. Alors que la ville du Centre-du-Québec connaît un véritable boom, Montréal et Gatineau enregistrent des hausses beaucoup plus modestes de 15% et 14% respectivement pour la même période, selon l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ).
L’avantage financier qu’offre ce marché explique en grande partie cette migration vers la région.
«Pour les premiers acheteurs, les jeunes familles ou les nouveaux arrivants, la différence est considérable. Produit à produit, on parle d’un écart de 100 000 à 150 000$ comparativement aux grands centres. L’accès à la propriété devient réellement plus accessible», explique Éliane Valérie Viau, courtière immobilière chez RE/MAX Élite.

Cette ville, qui comptait près de 83 000 habitants en 2024, mise sur deux atouts majeurs pour attirer les acheteurs: des prix immobiliers compétitifs et des taxes municipales parmi les plus basses de la province. Une combinaison particulièrement séduisante pour les premiers acheteurs et les télétravailleurs en quête d’un meilleur rapport qualité-prix.
En poste depuis 2021, la mairesse Stéphanie Lacoste reconnaît l’effervescence du marché local ces dernières années. «Quand une maison se met en vente, ce n’est pas très long qu’elle soit vendue. On s’est amélioré, mais on ne baisse pas les bras à augmenter l’offre sur le marché», estime-t-elle.

- Écoutez la mairesse Stéphanie Lacoste en entrevue à LCN:
De la campagne à Drummondville
Au début du mois, Jessica Lafond, 36 ans, a acheté une maison unifamiliale de sept chambres à Drummondville. Cette esthéticienne et professionnelle en assurances a quitté Saint-Cyrille-de-Wendover avec son conjoint et leurs trois enfants, attirée par les prix accessibles et la situation géographique avantageuse.
«On avait besoin d’espace pour les enfants et mes activités. Les prix sont trop élevés ailleurs, alors on a choisi Drummondville», explique l’entrepreneure de 36 ans. Une maison qu’elle n’aurait jamais pu s’offrir ailleurs à ce prix, selon elle.

«On est bien situés entre Montréal et Québec, c’est le meilleur des mondes pour nous, ajoute Jessica, qui cherchait un lieu pour tout concilier, en plus d’avoir une famille d’accueil. La Ville explose, plein de gens viennent. Même mes beaux-parents songent à s’y installer.»
Des acheteurs de Montréal
Plusieurs courtiers rencontrés par l’Agence QMI observent une arrivée d’acheteurs de Montréal, phénomène amplifié depuis la pandémie qui pousse les gens à s’éloigner des grands centres urbains. Selon Nicolas Turcotte, courtier chez Équipe BL, ils cherchent un meilleur cadre de vie tout en restant près de Montréal.
«Facilement trois acheteurs sur cinq viennent de Montréal ou les alentours. Drummondville est un accès facile pour se retirer des grands centres sans s’éloigner trop de la famille, par exemple», avance M. Turcotte.

Une croissance à double tranchant
Cette popularité croissante des dernières années s’accompagne toutefois de nouveaux défis. Drummondville peine à suivre le rythme de la demande et tente de combler son retard en matière de construction résidentielle face à des villes comme Sherbrooke ou Trois-Rivières.
«On recommence à prendre le dessus. Pour la demi-année 2025, des permis ont été émis pour 564 portes», assure la mairesse Stéphanie Lacoste, alors qu’il y a eu une délivrance d’un nombre record de 1200 permis en 2024.
La Ville n’avait pas anticipé cet afflux massif de nouveaux résidents depuis la pandémie, ce qui a ralenti les investissements en infrastructures et en logements, explique l’économiste Frédéric Laurin.
«Personne n’avait vu venir la pandémie. Des milliers de personnes ont quitté Montréal, c’était inespéré pour plusieurs régions, dont Drummondville, souligne M. Laurin, professeur d’économie à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Les promoteurs immobiliers sont mal pris et tentent de rattraper et la Ville doit refaire son schéma d’urbanisme.»

Face à ces défis, la Ville a mis en place plusieurs mesures: simplification des procédures d’urbanisme, crédit de taxes foncières pour les logements locatifs et accélération de la délivrance de permis.
Boom d’achat de maisons abordables
Autre preuve récente du boom immobilier, Drummondville se distingue comme la municipalité de moins de 100 000 habitants où il s’est vendu le plus de maisons unifamiliales entre le mois de janvier 2024 et le 31 mai 2025, soit 815 propriétés à moins de 450 000$, selon l’outil interactif de suivi des transactions immobilières du Journal.
Cette performance place Drummondville loin devant ses concurrentes régionales. Shawinigan, en Mauricie, suit avec 634 transactions, tandis que Victoriaville, dans les Bois-Francs, complète le podium avec 566 ventes.
Drummondville en chiffres
▪Croissance démographique: +1200 nouveaux habitants par année pour une population dépassant 80 000 habitants (+1,5%/an), soit une hausse de 12,4% depuis 2014.
▪Prix médian des maisons: Plus que doublé en 10 ans, mais demeure 25% inférieur à la moyenne québécoise.
▪Logement locatif: Taux d’inoccupation passé de 0,5% à 1,5%.
▪Loyer deux chambres: 40% moins cher qu’en banlieue de Montréal, soit jusqu’à 1000$ d’économie mensuelle.
▪Attractivité régionale: La MRC de Drummond se classe 26e sur 104 au Québec (Source: Statistique Canada, janvier 2025).
