Des fêtes de la F1 bien surveillées
Une cinquantaine de policiers les ont eus à l’œil, les criminels, tout le week-end du Grand Prix, à Montréal


Camille Payant
Il n’y a pas que les touristes qui profitent du Grand Prix pour sortir dans les bars branchés de la métropole, mais aussi les criminels de toutes allégeances qui y voient une expérience de réseautage.
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« Ce soir, on veut se gâter en matière de renseignements », lance le commandant David Paradis à la cinquantaine de policiers présents au quartier général du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) en ce début de vendredi soir.

Son équipe Éclipse, destinée principalement à combattre la violence armée et à collecter des renseignements sur les groupes criminels de la métropole, ne chômera pas lors de cette deuxième journée des festivités du Grand Prix du Canada.

Accompagnés de confrères venus de Laval, Longueuil, Roussillon et de la Sûreté du Québec, les policiers et agents de renseignements de l’escouade ont passé la nuit à sillonner les établissements des artères bien en vue de Montréal pour observer les criminels.

Dès leur arrivée dans un club à ciel ouvert de la rue Peel, à 21 h, l’équipe d’une quinzaine de policiers repère une table avec plusieurs visages familiers, où le vin et le fort coulent déjà à flots.

Filmés par les clients
Rapidement, les clients ciblés sortent leur téléphone afin de filmer la scène, où des policiers en rang tentent de reconnaître des visages et noter les noms des individus présents.
Selon les estimations, environ 80 % de la vingtaine de personnes présentes dans ce conteneur transformé pour l’occasion sont connues des milieux policiers.

« S’ils ont des armes, ils vont se tenir tranquilles », précise le lieutenant-détective Pierre-Marc Houle.
Une vingtaine de minutes plus tard, le groupe de policiers poursuit son chemin vers le fond de ce bar éphémère. Une table retient leur attention, car des motards criminalisés, dont certains Hells Angels, y sont attablés.

Des individus remarqués plus tôt à l’avant, qui sont, eux, liés aux gangs de rue, viennent alors les rejoindre.
« Ça se parle entre les deux », fait remarquer un agent.
Sur le coup de 22 h, le groupe de policiers quitte finalement les lieux et poursuit sa route sur la rue Peel, sous une pluie ayant fait fuir plusieurs touristes et amateurs de voitures de course.

Les agents attirent l’attention
Leur présence imposante se fait remarquer des passants.
« C’est une armée ! Je n’ai rien fait ! » rigole un jeune homme en les croisant.
« Oh shit ! » s’exclame plutôt une jeune femme, quelques mètres plus loin.

À partir du trottoir, les patrouilleurs jettent un coup d’œil aux terrasses des divers restaurants où le homard et d’autres mets raffinés garnissent les tables.
Ils discutent aussi avec des portiers et propriétaires d’établissements afin d’établir de nouveaux liens.
« Ils nous rappellent parfois ensuite, quand ils voient quelque chose », mentionne M. Houle.

Vers 22 h 40, les policiers se déplacent vers le bar en vogue d’un hôtel cinq étoiles de la rue Drummond, où une petite file s’était déjà formée à l’extérieur.

Dès les premières minutes, ceux-ci ne se sentent pas les bienvenus dans les salles luxueuses qui font tantôt office de restaurant, tantôt de club.

Présence dérangeante
Signe que le tourisme sexuel bat son plein, les policiers ont pu observer des « offres de services » sur place.

« Ici, notre présence dérange un petit peu », dit l’agent Martin Bernard.
Mais leur visite dans cet établissement n’a finalement pas été en vain. À quelques pas de la sortie, les policiers croisent un important acteur de la mafia italienne montréalaise, visiblement contrarié de leur présence.

Les agents ne l’importuneront pas, mais se promettent de revenir afin de noter avec qui il sera attablé, d’ici la fin de leur nuit, à 4 h hier matin.

♦ Puisque les opérations d’Éclipse de vendredi soir visaient les clients et non les établissements eux-mêmes, Le Journal a préféré ne pas mentionner les noms des endroits visités.
Les objectifs de l’opération Vigie Nocturne
- Assurer la sécurité autour des bars et à l’intérieur
- Intervenir en matière de violence armée autour des bars et des établissements licenciés
- Lutter contre le proxénétisme dans le contexte du Grand Prix
- Collecter des informations à propos des sujets criminalisés qui sont vus dans les endroits visités
Policiers de partout
- Le groupe Éclipse du SPVM a accueilli des confrères des services de police de Laval, Longueuil, Roussillon et de la Sûreté du Québec pour le week-end.
« Il y a des individus qui vont venir [des banlieues] que nos policiers ne connaissent pas nécessairement, donc ça facilite notre travail », explique le commandant du SPVM David Paradis.
- La cinquantaine de policiers ont alors pu s’échanger de précieux renseignements sur des individus habitant d’autres villes.
- Plusieurs de ces corps de police s’étaient également retrouvés en mai dernier, lors de la première fête liée aux Hells Angels depuis le début de la pandémie.
« C’est une pratique qu’on veut mettre de l’avant de façon plus régulière, parce qu’on est beaucoup plus efficace quand on le fait comme ça », dit M. Paradis.
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